Simplifier la réglementation de la construction pour abaisser les coûts
Enjeux
De nombreuses réglementations, des milliers de normes s’imposent aux bâtiments. Leur intention est louable : il s’agit d’offrir aux habitants des logements sûrs, de qualité, et respectueux de l’environnement. Mais leur empilement a transformé l’opération de rénovation ou de construction en un labyrinthe décourageant les investisseurs et les ménages.
Il ne s’agit pas de diminuer les exigences de qualité, mais de mieux articuler les différentes réglementations existantes autour d’un projet de construction, de fixer des exigences de résultats et non de moyens, de mutualiser les procédures lorsque c’est possible, de réduire les risques de contentieux.
Leviers d’action
50 premières mesures de simplification de la réglementation. Elaborées avec les professionnels, ces mesures permettront de faire baisser les coûts de construction et de faciliter la conception des projets. Elles concernent notamment les questions de confort et d’hygiène, de sécurité incendie, de solidité, de lutte contre les termites, d’accessibilité… Elles seront proposées aux instances consultatives obligatoires dès cet été pour une mise en œuvre à l’automne au plus tard.
Quelques exemples de mesures de simplification
- Privilégier les résultats plutôt que les moyens : le local à vélo est obligatoire dans les bâtiments collectifs neufs, et doit aujourd’hui absolument être réalisé à l’intérieur du bâtiment. C’est même parfois assez peu pratique.Possibilité d’installer le local à vélo sur la parcelle tant qu’il est clos, couvert et éclairé.
- Dépoussiérer la réglementation : le code de la construction interdit que le cabinet de toilettes donne sur le séjour ou la cuisine, ce qui impose la présence d’un « sas » entre les toilettes et les autres pièces. La suppression de ce sas permet d’optimiser l’espace, notamment dans les logements de petites surfaces. Cela laissera aux architectes une plus grande liberté dans la conception.
- Mieux proportionner les règles par rapport aux enjeux : si une commune d’un département, aussi petite soit elle, est identifiée comme zone contaminée par les termites, tout le département se voit appliquer les prescriptions spécifiques pour la lutte contre les termites pour les bâtiments neufs !
Proportionner le zonage à l’enjeu, en affinant la maille d’application des prescriptions et ne plus avoir une approche administrative pure.
- Faire évoluer la réglementation en fonction des retours d’expérience de terrain : quand on veut agrandir sa maison, il faut que l’extension respecte la totalité de la réglementation thermique 2012 si elle a une surface supérieure à 30% de la maison. Pour les maisons de petite ou moyenne surface, ce seuil est vite atteint, et rend très complexe en pratique la réalisation de l’extension (nécessité d’une étude thermique globale sur le bâtiment…). Les règles seront adaptées pour les petits logements et faciliteront la réalisation d’extensions. Les exigences de moyens continueront à s’appliquer pour atteindre les objectifs de performance.
Pour les bâtiments neufs, la réglementation sur l’accessibilité impose que toutes les fenêtres puissent être manipulées par une personne à mobilité réduite. Si le principe ne fait pas débat, cela a pour conséquence, par exemple, la quasi-impossibilité de placer une fenêtre au dessus d’un évier ou d’une baignoire.
La règle sera adaptée pour permettre la création de fenêtre dans les pièces humides. Cela redonnera également plus de liberté dans la conception des logements.
- Gommer les incohérences liées aux spécificités des territoires : la réglementation incendie ne tient pas toujours compte des spécificités des Outre-Mer. Par exemple, elle impose des portes coupe-feu dans les coursives, alors que celles-ci sont généralement en plein air dans les DOM, rendant la réglementation inapplicable.
La réglementation incendie sera révisée pour mieux prendre en compte le contexte ultramarin et supprimer les incohérences.
- Encourager les matériaux bio-sourcés : le bois, dont les propriétés physiques de résistance au feu sont aujourd’hui reconnues par tous les professionnels, est interdit pour les façades des grands bâtiments !
Suppression de cette interdiction dans la réglementation et possibilité d’utiliser le bois en façade dès lors qu’il répond aux mêmes exigences techniques (résistance au feu…) que les autres matériaux.
L’exercice de simplification ne doit pas être un exercice ponctuel mais une préoccupation permanente. Si les mesures concernent essentiellement les normes existantes, certaines visent également à agir sur les normes à venir :
- Ouverture d’un espace dédié sur le site Internet du ministère du Logement et de l’Egalité des territoires, qui permettra dès cet été aux professionnels et à l’ensemble des acteurs de continuer à faire remonter leurs propositions pour simplifier encore la réglementation.
- Installation du conseil supérieur de la construction pour réguler le flux de règles et normes à venir. Réunissant l’ensemble des professionnels, il évaluera l’impact économique de toute nouvelle règle concernant la construction et veillera à la bonne articulation des réglementations entre elles. Les professionnels de la construction seront par ailleurs mieux associés à la gouvernance de l’élaboration des normes, dont plus de 4 000 concernent le bâtiment.
Calendrier
- 50 premières mesures de simplification de la réglementation : mise en œuvre cette année
- Ouverture d’un espace Internet dédié pour faire remonter les contributions des professionnels : juillet 2014
- Installation du conseil supérieur de la construction : septembre 2014
- Simplifier la réglementation en matière d’urbanisme pour accélérer les procédures d’aménagement
En complément de ces mesures de simplification pour la construction, le gouvernement a engagé un chantier pour accélérer les procédures d’aménagement dans leur ensemble.
La première étape a été franchie en 2013 avec les ordonnances prises pour accélérer les projets de construction, et qui sont en vigueur.
Les principales mesures sont :
- la création de la Procédure intégrée pour le logement (PIL), qui permet de réduire les délais de réalisation des projets de construction de logements et d’en faciliter la réalisation ;
- la réduction des délais de traitement des contentieux et la lutte contre les recours malveillants dans le domaine de l’urbanisme ;
- la simplification des démarches des porteurs de projets, en palliant les difficultés liées à la complexité des législations ou à la pluralité des acteurs et des autorités compétentes ;
- l’incitation à densifier, en facilitant la réalisation de logements dans les zones tendues.
Cette dernière mesure prise par ordonnance favorise et facilite la construction de logements dans des secteurs où la demande est la plus forte, en créant les conditions favorables à l’optimisation des ressources foncières disponibles en ville. Elle permet en effet de déroger à certaines règles du document d’urbanisme en vigueur pour transformer des locaux obsolètes et vides depuis des années, surélever des immeubles en s’alignant sur la hauteur de l’immeuble voisin, exploiter les gisements fonciers que sont les dents creuses et enfin alléger les obligations en matière de stationnement pour les logements situés à proximité des transports en communs.
Il s’agit maintenant d’aller plus loin dans la continuité des travaux du conseil de la simplification : l’article 7 du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier la vie des entreprises, présenté le mercredi 25 juin 2014 en conseil des ministres, permet de conforter une approche opérationnelle de l’aménagement des zones urbaines.
Ces dispositions sont destinées à :
- déterminer des modalités de participation du public, alternatives à l’enquête publique, pour les décisions de permis de construire ou d’aménager, portant sur certains projets soumis à étude d’impact. L’objectif est de parvenir à une accélération de la réalisation des constructions et des aménagements concernés, tout en maintenant une participation du public aux décisions d’urbanisme, qui doit être proportionnée au niveau d’incidence des projets concernés sur l’environnement. Des modalités moins longues et plus modernes que l’enquête publique peuvent donc utilement être mobilisées ;
- élargir le champ d’application des dérogations aux documents d’urbanisme pour faciliter la réalisation de projets dans les secteurs où le foncier est rare et où les projets de construction sont soumis à davantage de contraintes ;
- réduire les obligations de création de parking dans les zones tendues et bien desservies par les transports. Il s’agit d’étendre le champ de la réglementation existante qui limite l’obligation de réaliser des aires de stationnement, lors de la construction ou la transformation de logements locatifs, à une place par logement. Elle s’appliquera aussi aux résidences étudiantes et aux établissements d’hébergement pour personnes âgées, et s’accompagnera d’une réduction de la norme pour toutes les constructions de logements situées à moins de 500 m d’une gare ou d’une station de transport collectif guidé.
- favoriser le développement de projets de construction de logements dans les zones à dominante commerciale, par l’établissement d’un bonus de constructibilité, sous réserve de bonne desserte par les transports en commun et de mixité fonctionnelle. Il s’agit d’encourager les constructions sur plusieurs niveaux et d’améliorer la qualité urbaine des zones commerciales en leur permettant d’accueillir d’autres fonctions.
Ces mesures ont toutes pour objectif une intensification de la ville qui répond à une volonté de prise en compte de ses qualités urbaines, architecturales et paysagères. Elles s’accordent avec les initiatives existantes en matière d’écoquartier, qui favorisent un habitat dense et respectueux de l’environnement.
Le respect du cadre de vie local est un enjeu majeur de l’aménagement des territoires, il se traduit par une exigence d’intégration harmonieuse des projets issus de ces nouvelles dérogations.
Le rapport Pelet, commandé par le Premier ministre proposant la mise en place de l’Institut de la ville durable, est destiné à coordonner les initiatives, rassembler les compétences au service des collectivités pour avoir une vision internationale sur la ville française.
Calendrier
Ces mesures feront l’objet d’une ordonnance qui sera prise dans un délai de neuf mois après la publication de la loi habilitant le Gouvernement à simplifier la vie des entreprises (présenté le mercredi 25 juin 2014 en conseil des ministres)
Développer l’innovation
Enjeux
Pour construire et rénover plus, mieux et à coûts maîtrisés, l’innovation dans le bâtiment doit dès aujourd’hui être une priorité. C’est une condition indispensable pour atteindre les besoins nationaux de logements construits et rénovés, mais également pour garantir la compétitivité de nos entreprises, à l’échelle européenne et mondiale.
Leviers d’action
- Lancement dès cet été de l’appel à manifestation d’intérêt « méthodes industrielles pour la rénovation et la construction de bâtiments » par l’Ademe pour développer des procédés constructifs innovants.
Dans le domaine du bâtiment, des méthodes prometteuses sont développées pour permettre de construire ou de rénover des logements, mais de nombreux freins existent pour leur diffusion. Cet appel à manifestation d’intérêt a pour objectif de développer de nouvelles solutions technologiquement et économiquement viables pour un déploiement à grande échelle de la rénovation énergétique du parc immobilier français. Il favorisera également l’expérimentation de nouvelles façons de construire. Ces solutions innovantes doivent permettre une réduction forte des besoins des usages énergétiques, des impacts environnementaux, ainsi que des temps d’intervention sur chantier et donc des coûts de la construction.
Exemples : utilisation d’imprimantes 3D, recours aux techniques du numérique dans l’élaboration des maquettes, etc.
- Lancement avec les acteurs de la construction des travaux sur le label de performance environnementale des bâtiments.
Alors que la réglementation actuelle se concentre sur le seul critère de la consommation énergétique des bâtiments, une expérimentation achevée en 2013 sur un grand nombre de bâtiments a montré la nécessité de prendre en compte les différents impacts environnementaux, sur l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment : ressource en eau, déchets, changement climatique… Il s’agit ainsi d’éviter les transferts de pollutions d’un impact à un autre et de pouvoir envisager des bâtiments encore plus efficaces, qu’ils soient à énergie positive, bas carbone ou hautement recyclables.
Les travaux pour l’amélioration de la performance environnementale des bâtiments neufs vont ainsi être engagés dès septembre 2014. Cette démarche sera progressive et entièrement volontaire. Elle aboutira au 1er trimestre 2015 à la mise en place d’un affichage environnemental des bâtiments.
A moyen terme, l’analyse des résultats obtenus donnera lieu à un label volontaire qualifiant le bâtiment à faible impact environnemental.
- Installation de plates-formes de l’innovation pour le bâtiment sur l’ensemble du territoire, à l’image de l’expérience pionnière menée entre l’Alsace et le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB).
Un réseau territorial partenarial d’accompagnement des innovateurs dans le bâtiment sera développé en renforçant la pédagogie sur les dispositifs d’évaluation à l’aptitude à l’emploi des produits et procédés. Ce réseau s’associera pleinement aux plateformes locales du bâtiment, et devra permettre une fluidification de l’accès au marché des produits innovants et la détection précoce des produits à haut potentiel d’export notamment.
Par exemple, le CSTB a mis en place un partenariat en octobre 2013 avec Alsace EnergieVie, qui est un pôle de compétitivité dédié à l’efficacité énergétique dans le bâtiment et orienté vers l’objectif du bâtiment à énergie positive (BEPOS). Le CSTB pourrait se voir confier la responsabilité de développer et d’animer un tel réseau ayant comme objectif de fournir sur tout le territoire un accompagnement de qualité au plus près des innovateurs.
- Nomination d’un ambassadeur du numérique dans le bâtiment pour diffuser ces techniques dans les procédés de conception et faciliter le travail collaboratif.
Bertrand Delcambre, président du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), est nommé ambassadeur du numérique dans le bâtiment. Il sera chargé de définir et de mettre en œuvre un programme opérationnel pour développer les applications et innovations numériques dans le processus de construction. L’utilisation des outils numériques dans le bâtiment permettra de moderniser le processus de construction et les coopérations entre les acteurs, d’améliorer la qualité sur les chantiers et de réduire les coûts de construction. Ces outils, et notamment le « Bâtiment et Informations modélisées » (BIM), permettront également aux maîtres d’ouvrage de disposer de possibilités accrues pour s’approprier leurs projets avant réalisation et pour mieux anticiper les risques, les nécessités et les coûts de l’exploitation future.
Calendrier
- Lancement de l’appel à manifestation d’intérêt de l’Ademe : juin 2014
- Mise en place d’un affichage environnemental des bâtiments : 1er trimestre 2015
- Déploiement de plates-formes de l’innovation pour le bâtiment sur l’ensemble du territoire d’ici fin 2015
- Nomination d’un ambassadeur du numérique dans le bâtiment : juin 2014