D'une capacité de 17 mégawatts, ses 47.000 panneaux photovoltaïques s'étendront sur 17 hectares à la surface du lac et pourront couvrir la consommation de plus de 4.700 foyers, détaille Akuo Energy dans un communiqué.
Actuellement, n'ont été expérimentés en France que quelques très petits parcs solaires flottants de quelques dizaines de kilowatts, mais cette centrale sera la première d'une taille aussi significative.
Si le solaire flottant est déjà bien développé en Asie, en particulier au Japon et en Chine, l'Europe ne dispose encore d'aucune centrale de taille comparable à celles qui sont installées sur terre.
Les systèmes flottants ont l'avantage de réduire les conflits d'usage avec l'agriculture par exemple, qui peuvent freiner l'expansion du solaire à terre.
Pour son projet, Akuo Energy utilise la technologie développée par le leader mondial du secteur, la PME française Ciel et Terre, avec qui il a signé un accord de licence pour la France.
La centrale de Piolenc a été financée en partie par un financement participatif, ouvert aux personnes ayant une résidence dans le Vaucluse. La mairie de la commune a également investi dans le projet.
L'électricité sera vendue sur le marché et bénéficiera du système public de soutien du complément de rémunération pour garantir un prix minimum à l'électricité qui sera produite.
Les centrales flottantes, nouvelle frontière de l'énergie solaire
Installer des panneaux solaires sur l'eau pour limiter l'emprise terrestre des centrales: cette technologie commence à émerger, en particulier en Asie, et certains rêvent même de coloniser la mer, malgré les difficultés techniques.
Jeudi, l'entreprise française Akuo Energy a lancé la construction de la première centrale de taille commerciale en France. Elle sera située dans le Vaucluse, à la surface d'un lac formé sur une ancienne carrière.
Selon Eric Scotto, son PDG, il s'agira aussi de la plus importante installation en Europe.
Alors que le solaire installé à terre, au sol et sur les toits des bâtiments est en pleine expansion, grâce notamment à la baisse de ses coûts, l'idée d'installer des panneaux photovoltaïques sur les plans d'eau intéresse de plus en plus de pays.
"L'avantage est de ne pas occuper du foncier agricole ou forestier", alors que la pression foncière dans certaines régions est très importante, explique Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER).
De nombreux plans d'eau, comme les lacs de barrage, des bassins industriels ou d'irrigation, peuvent accueillir des panneaux photovoltaïques. Ils ont aussi l'avantage d'améliorer le rendement des panneaux, naturellement refroidis par la proximité de l'eau.
"L'intérêt du flottant est d'offrir la possibilité de réhabiliter des espaces dégradés par l'homme, comme des anciennes carrières inondées, sans concurrence avec d'autres usages", défend Eric Scotto.
Certains pays, comme le Japon ou Taïwan, ont pris le virage du flottant depuis plusieurs années.
"Nous avons signé notre premier projet au Japon en 2013 et nous en avons aujourd'hui entre 70 et 80 dans ce pays", explique Camille Marlière, directrice Marketing de Ciel et Terre.
Cette PME française est devenue le leader mondial du secteur, grâce à sa technologie de flotteurs et de fixation. Implantée dans une dizaine de pays, dont le Japon, l'Inde, les Etats-Unis ou la Chine, elle a réalisé 125 projets représentant 250 mégawatts de capacités.
Impact environnemental
En Chine, elle construit actuellement une centrale de 70 mégawatts sur un ancien lac minier. Ce pays accueille d'ailleurs la plus grande centrale du monde (40 MW) sur un lac ayant recouvert une ancienne mine de charbon.
Si aujourd'hui cette technologie reste en général plus chère que le solaire au sol puisqu'il faut ajouter aux panneaux des flotteurs et un système de fixation et de câblage particulier, elle est déjà compétitive là où le foncier coûte très cher, selon Mme Marlière.
Des projets de petite taille existent en Belgique, au Portugal, aux Etats-Unis ou encore en Inde.
En France, cinq projets ont été lauréats l'an dernier d'un appel d'offres dédié au solaire innovant. Engie et EDF réfléchissent aussi à équiper des lacs de barrages qu'ils exploitent.
"La France compte 705 km³ de lacs artificiels et si 30% de leur surface était recouverte de panneaux solaires, cela représenterait la consommation d'environ 4 millions de foyers", évalue Charlotte de Lorgeril, du cabinet Sia Partners.
En sélectionnant les lacs situés à moins de 5 km d'un point de raccordement au réseau électrique, Akuo Energy estime le potentiel à 3.000 mégawatts en France.
Des enjeux environnementaux se posent toutefois. Certaines associations environnementales s'inquiètent de l'impact sur les oiseaux migrateurs ou sur la faune sous-marine.
Sur le projet d'Akuo Energy dans le Vaucluse, l'Autorité environnementale a recommandé un contrôle de la qualité de l'eau et le suivi pendant cinq ans de l'impact de l'installation sur les oiseaux.
Les producteurs mettent eux avant d'autres avantages: une réduction de l'évaporation des plans d'eau, ou une moindre prolifération d'algues.
Maintenant que la technologie en eau douce est maîtrisée, certains envisagent de conquérir les mers et les océans, une perspective beaucoup plus complexe.
"Il ne faut pas de vagues trop hautes et il y a [la question] de la corrosion", relève Jean-Louis Bal.
Mais la start-up autrichienne Swimsol a déjà développé une plate-forme flottante adaptée au littoral des petites îles des régions tropicales, avec une première installation expérimentale aux Maldives.