Après la réforme des retraites et le relèvement de l'âge de départ à 64 ans, les syndicats voulaient obtenir des garanties sur le maintien en emploi et les conditions de travail des seniors, avant de donner leur aval à la modification des règles d'indemnisation des chômeurs âgés.
Par avenant à la convention d'assurance chômage négociée à l'automne dernier, mais qui n'est pas encore entrée en vigueur, les bornes d'âge ouvrant à une période d'indemnisation plus longue doivent être relevées de deux ans: de 53 à 55 ans pour avoir droit à 22,5 mois (au lieu de 18 pour les plus jeunes), et de 55 à 57 ans pour avoir droit à 27 mois.
La signature de cet avenant était prévue ce mercredi dans la foulée de l'accord sur l'emploi des seniors qui finalement ne verra pas le jour.
La ministre du Travail Catherine Vautrin se demandait mercredi si les partenaires sociaux allaient quand même signer ce document.
"Les partenaires sociaux nous ont dit qu'ils rendaient leur copie le 15 avril. Tout ce que je sais, c'est qu'ils avaient une réunion ce matin, qu'elle est annulée. J'ignore si le non-accord (sur l'emploi des seniors) emporte tout ou s'ils vont revenir sur l'assurance chômage avec une proposition", a-t-elle déclaré à l'issue du conseil des ministres.
"S'il ne devait pas y avoir d'accord sur l'assurance chômage, là nous ferions ce qu'on appelle un décret de carence, c'est-à-dire que nous reprendrions (la main) parce que par définition, il faut qu'au 1er juillet, nous ayons un élément sur l'assurance chômage", a-t-elle ajouté.
"Forte attente sociale"
Les règles qui régissent actuellement l'indemnisation des chômeurs expirent en effet au 30 juin.
Elles avaient été fixées par un décret de carence pris par le gouvernement en 2019, déjà en l'absence d'accord entre partenaires sociaux. Il expirait au 31 décembre dernier. Ces règles ont ensuite été prolongées de six mois par un "décret de jointure" en attendant que la nouvelle convention entre en vigueur.
Un nouveau décret de carence viendra-t-il durcir les règles avant même l'envoi d'une nouvelle lettre de cadrage aux partenaires sociaux pour renégocier dès cette année afin de rendre le modèle social français plus "incitatif" au retour à l'emploi, conformément au voeu du Premier ministre Gabriel Attal ?
Interrogé par l'AFP, le ministère du Travail n'a pas répondu à ce stade.
En outre, certaines mesures proposées par le patronat dans son projet d'accord sur l'emploi des seniors, ainsi que d'autres qui n'y figurent pas comme le compte épargne temps universel (Cetu), pourraient être reprises par le gouvernement dans un projet de loi, a confirmé Catherine Vautrin.
"Si le gouvernement veut que ces éléments soient repris, c'est au gouvernement de prendre un véhicule législatif pour reprendre tout ou partie de ces éléments et de leur donner force de loi", a-t-elle indiqué, citant le "CDI spécifique pour les gens de plus de 60 ans", un "bilan à mi-carrière à 360 degrés" ainsi que l'usure professionnelle.
"Gâchis"
Dans un communiqué publié mercredi soir, FO "regrette que cette négociation n'ait pas permis de déboucher sur de nouveaux droits pour les salariés" et estime que "l'intransigeance du patronat fait planer à l'avenir une menace forte sur le paritarisme et la négociation collective interprofessionnelle".
Par conséquent, "le bureau confédéral de Force Ouvrière, réuni ce jour, a décidé de ne pas signer ce projet d'accord", a ajouté FO, qualifiant de "gâchis" le résultat de ces négociations.
"Il y a une réforme des retraites qui repousse les carrières de deux ans dans les entreprises. Il faut le prendre en compte et donc parler des questions de travail et de conditions de travail" pour les seniors, avait plaidé plus tôt sur franceinfo Yvan Ricordeau, le négociateur de la CFDT.
Dans la nuit de mardi à mercredi, après l'échec du dernier round avec les représentants patronaux, il avait jugé que "le patronat ne voulait pas de cette négociation depuis le départ", ajoutant qu'"il a essayé de la retourner dans son sens" pour mieux l'évacuer.
"On a négocié de bonne foi de part et d'autre, [mais] finalement on était très encadrés par la règle de cadrage du gouvernement qui nous interdisait toute marge de manoeuvre financière", a déclaré pour sa part le président du Medef Patrick Martin sur RMC.