Après plusieurs mois d'une "revue complète" du projet, EDF a annoncé lundi s'attendre à un surcoût de 1,5 milliard de livres (plus de 1,8 milliard d'euros) pour cet énorme chantier, ce qui porte l'investissement total à 19,6 milliards de livres, soit environ 24,1 milliards d'euros.
Cette réévaluation s'explique d'abord par "la remobilisation du chantier" et la nécessité de "recaler un certain nombre de choses" dans les contrats avec les fournisseurs, après "les décalages successifs" de la décision finale d'investissement tout au long de 2016, a indiqué Vincent de Rivaz, directeur général d'EDF Energy, la filiale britannique du groupe français, lors d'une conférence téléphonique.
Cette décision finale a été officialisée en septembre 2016 entre le gouvernement britannique, EDF et le groupe chinois CGN, qui détient un tiers du projet aux côtés du Français.
Ensuite, EDF a dû adapter la conception de la centrale à des "demandes des régulateurs", notamment en terme de sûreté.
En revanche, les problèmes qui affectent la cuve de l'EPR de Flamanville (Manche) n'ont eu aucun impact sur la réévaluation des coûts d'Hinkley Point, a assuré M. de Rivaz, qui quittera son poste fin octobre.
Dans la foulée de l'annonce d'EDF, un porte-parole du ministère britannique de l'Energie a prévenu que "tous les coûts de construction, y compris les dépassements" sont à la charge du constructeur.
Depuis l'annonce du projet, la facture de ce chantier colossal n'a cessé de faire polémique en Grande-Bretagne, où certains dénoncent l'impact pour les consommateurs britanniques de l'accord signé avec le gouvernement.
Celui-ci instaure un prix garanti de rachat de l'électricité produite par les deux EPR pendant 35 ans, quel que soit le niveau des prix du marché de gros de l'électricité, actuellement bas.
Le contrôleur des comptes britanniques a ainsi estimé, fin juin, que ce prix garanti pourrait engendrer un surcoût de 30 milliards de livres sur la facture des consommateurs (34 milliards d'euros).
Risque de retard de 15 mois
Le surcoût annoncé lundi pourrait encore s'aggraver d'environ 700 millions le livres (plus de 860 millions d'euros) si le chantier prend du retard sur le calendrier initial, a aussi prévenu EDF lundi.
Le groupe évoque un "risque" de retard de 15 mois pour le premier réacteur, censé entrer en service fin 2025, et de 9 mois pour le second, qui doit démarrer six mois plus tard.
Si retard il y a, la date de mise en service resterait "très en avance, par rapport aux dates qui figurent dans le contrat avec le gouvernement britannique, à partir desquelles il pourrait y avoir une incidence sur la rémunération d'EDF", a précisé M. de Rivaz.
La Grande-Bretagne devra aussi trouver sur le marché des alternatives pour palier le retard de la mise en service des EPR, censés fournir 7% du courant du pays.
Le groupe a confirmé que le début de la construction du premier réacteur était toujours prévu "mi-2019", mais il dépend de la finalisation du design définitif, prévue fin 2018, "dont le calendrier est tendu", selon un communiqué.
Les travaux pour la mise en place des premières structures permanentes de la centrale ont débuté fin mars. Le chantier "avance conformément au planning", a assuré M. de Rivaz.
Même si EDF se veut rassurant, cette annonce met à mal un nouveau projet d'EPR, après les retards colossaux des EPR en chantier en France et Finlande, et les décalages moins importants des deux autres en construction en Chine.
En 2016, alors que la tension faisait rage au sein de l'électricien autour de ce projet, qui avait notamment entrainé la démission de son directeur financier, plusieurs voix s'étaient élevées pour juger peu crédible la durée de construction annoncée par EDF de 72 mois.