Modi, 70 ans, s'est livré à des rituels hindous lors de la cérémonie inaugurale, officiellement laïque, de la construction du nouveau parlement - un bâtiment censé représenter le coeur de la démocratie pour 1,3 milliard d'habitants de l'Inde.
Le nouvel édifice, beaucoup plus imposant, remplacera l'ancien bâtiment qui, selon Modi jeudi, "a besoin de répit". Une partie de l'ancien parlement sera "rénovée" puis continuera d'être utilisée pour les affaires du gouvernement, certains quartiers du bâtiment seront transformés en musées et d'autres démolis.
"Aujourd'hui est une date historique. C'est une étape importante dans le cheminement démocratique de l'Inde", a déclaré Modi dans son discours inaugural.
"L'ancien bâtiment du Parlement témoigne du parcours de l'Inde, de l'époque coloniale à une nation indépendante", a-t-il ajouté, "il est de notre responsabilité de donner à l'Inde du XXIe siècle un nouveau bâtiment parlementaire". Il devrait être achevé à temps pour le 75e anniversaire de l'Indépendance du pays, en 2022.
Le vieux parlement bâti au début du XXe siècle par l'architecte britannique Edwin Lutyens composait la pièce maîtresse du Raj, l'Empire britannique en Inde, comprenant également le grand boulevard Rajpath, la résidence du président, les bureaux du gouvernement, le museum national et le monument aux morts de la Porte de l'Inde.
Selon les critiques de ce vaste projet de réaménagement dont le coût total s'élèverait à 200 milliards de roupies (2,7 milliards de dollars) dont 130 millions de dollars pour le nouveau parlement, de telles dépenses trouveraient davantage d'utilité dans la lutte contre le Covid-19 et le soutien à l'économie durement heurtée par la pandémie.
Des recours ont été déposés à la Cour suprême contre le programme, et pourraient, si ce n'est le compromettre, du moins le retarder. De son côté, le bureau de Modi argue que ce réaménagement "correspondra aux aspirations d'une Inde nouvelle".
Tikender Singh Panwar, un membre de l'opposition et expert en urbanisation, estime que ce réaménagement est un "grand scandale en devenir".
"Etrangement, pour un projet de cette importance, de cette taille et de ce coût, les détails sont bien sommaires (...)" a-t-il commenté auprès de l'AFP, ajoutant que Modi lui faisait l'effet d'"un leader fasciste voulant laisser l'empreinte de sa gloire sur Delhi".
Selon le commentateur politique Arati Jerath, "cet argent aurait pu être bien dépensé pour soutenir et restaurer l'économie (et) créer des emplois, mais au lieu de cela, il est dépensé pour réaliser les rêves grandioses d'un homme et ce à quoi devrait ressembler une Inde nouvelle".
L'inauguration se déroulait alors que des dizaines de milliers d'agriculteurs en colère contre les réformes agricoles bloquent les accès à la capitale pour la deuxième semaine d'affilée, constituant un défi majeur pour l'autorité de Modi et son programme de réforme.
Lundi, la Cour suprême avait exprimé son mécontentement devant l'empressement du gouvernement à inaugurer le projet avant d'avoir pu les examiner les recours. Elle a toutefois autorisé la poursuite des procédures administratives, y compris la cérémonie de jeudi mais aucune construction ne doit commencer d'ici sa décision.