Cette audience intermédiaire était destinée à examiner les exceptions de nullité soulevées par les avocats de la défense sur la citation directe visant leurs clients.
La citation directe permet à la victime d'une infraction de saisir directement un tribunal pénal. Dans ce genre de procédure, il n'y a pas d'investigations menées par des magistrats. Charge aux plaignants de collecter les éléments de preuve et de désigner les suspects.
Celle-ci a été adressée à quatorze anciens représentants de ministères, des dirigeants d'entreprises ou des médecins, âgés de 62 à 84 ans, qui auraient cherché à retarder l'interdiction de la fibre cancérigène, intervenue en 1997.
Les plaignants souhaitent qu'ils répondent de leurs liens avec le Comité permanent amiante (CPA), décrit dans un rapport sénatorial de 2005 comme un "lobby" pro-amiante actif entre 1982 et 1995, alors que toutes les variétés d'amiante étaient classées cancérigènes par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1977.
Lors de cette audience technique émaillée de passes d'armes et de critiques acides avec Me Antoine Vey, conseil de près de 2.000 plaignants, les avocats de la défense ont notamment pointé "l'imprécision" de la citation directe, qui n'énonce pas "le fait poursuivi", "la période d'exposition" ou encore le lien entre les faits et les parties civiles.
"Lorsqu'on saisit un tribunal le périmètre du débat doit être intangiblement fixé lors de l'audience", a tonné Me Georges Holleaux, avocats de deux personnes citées.
La procureure et cheffe du pôle santé publique Laëtitia Costantini, qui a également soulevé des "dysfonctionnements" et des "anomalies" dans la citation, a demandé au tribunal de prononcer sa nullité, ce qui empêcherait la tenue d'un procès sur le fond.
"C'est une démarche qui a été faite en conscience, par des milliers de gens", a rétorqué Me Vey, expliquant que ses clients souhaitaient surtout avoir "un débat contradictoire" avec les responsables cités et pas forcément les voir condamnés in fine.
Depuis environ trois ans, la plupart des dossiers de l'amiante instruits à Paris se sont conclus par des non-lieux.
En 2012, les autorités sanitaires estimaient que l'amiante pourrait causer d'ici à 2025 trois mille décès chaque année par des cancers de la plèvre ou des cancers broncho-pulmonaires.