Le 1er mars 2019, les plus grandes entreprises françaises -- plus de 1.000 salariés -- ont publié leur note globale sur 100, désormais thermomètre de l'égalité professionnelle.
En France, les femmes sont payées en moyenne, tous postes confondus, 25% de moins que les hommes. A poste et âge égaux, l'écart est de 9% alors que le principe "à travail égal, salaire égal" est gravé dans la loi depuis 1972.
D'après le dernier bilan livré en septembre, environ 17% des entreprises de plus de 250 salariés étaient en "alerte rouge" selon les mots de la ministre du Travail Muriel Pénicaud, soit un score en deçà de 75 points qui l'expose à des sanctions financières.
Celles-ci pourront aller jusqu'à 1% de la masse salariale si le tir n'est pas rectifié dans les trois ans. Les entreprises s'exposent aussi à des sanctions si elles ne publient pas leurs notes.
La ministre avait indiqué qu'elle donnerait le nom des entreprises qui, au 1er mars 2020, pour leur deuxième publication donc, étaient en dessous de 75/100.
Cet index comprend cinq critères: l'écart de rémunération femmes-hommes (40 points), l'écart dans les augmentations annuelles (20 points), l'écart dans les promotions (15 points), les augmentations au retour de congé maternité (15 points) et enfin la présence de femmes parmi les plus gros salaires de l'entreprise (10 points).
S'agissant des grandes entreprises, les premières publications avaient confirmé le problème connu du "plafond de verre" (peu de femmes dirigeantes, donc peu de femmes dans les dix plus gros salaires d'une entreprise), ainsi que celui de l'augmentation au retour de congé maternité. Le top 10 du géant de l'énergie Engie, par exemple, compte une femme de moins depuis le récent départ d'Isabelle Kocher, directrice générale dont le mandat n'a pas été renouvelé.
Pour Sophie Binet, spécialiste de ces questions à la CGT, les critiques formulées quand le gouvernement a lancé cet index sont toujours d'actualité.
"Circulez il n'y a rien à voir"
Les principaux syndicats avaient en effet critiqué la formule de calcul choisie, qui du fait de certains éléments (barème, pondération, seuil de pertinence) "masquent" selon eux une partie des écarts de rémunération. FO avait estimé que "bon nombre de salariés passent sous les radars".
Un an après sa mise en place, Sophie Binet juge l'outil "contre-productif car permettant à des entreprises de dire +circulez il n'y a rien à voir+". Paradoxalement, "des entreprises qui avaient de bonnes pratiques" ont eu des notes moyennes "parce qu'elles n'avaient pas grugé".
Elle fait le pari que les notes des grandes entreprises vont "beaucoup progresser" car elles se seront adaptées, en augmentant "a minima" les femmes de retour de congé maternité par exemple.
Au passage, elle s'inquiète de la "disparition du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle", qui va se fondre avec le Haut Conseil à l'égalité, et devant lequel un premier bilan promis pour l'automne dernier par le gouvernement n'a jamais été présenté.
"Il ne manquerait pas grand-chose" pour que l'outil fonctionne, explique néanmoins Mme Binet, qui demandait sa création.
De son côté, le gouvernement explique que déjà l'index a le mérite de forcer les entreprises à se pencher sur un problème que parfois elles ignoraient.
Les plus petites entreprises, entre 50 et 250 salariés, ont jusque samedi minuit pour publier leur note. Pour elles, ce calcul est basé sur quatre critères (augmentations et promotions sont fondus). Pour les aider, le ministère a installé une hotline qui reçoit 300 appels quotidiens depuis début janvier, a indiqué la Direction générale du travail, interrogée par l'AFP.
Comme le relève l'Apec (Association pour l'emploi des cadres) dans une étude sur les inégalités salariales femmes/hommes dans l'encadrement, "les grandes entreprises sont mieux informées sur les inégalités salariales et plus contraintes à les combattre".