Si l'atterrissage du marché du logement neuf se poursuit, avec une baisse des permis, des mises en chantier mais aussi des ventes, l'activité constructive demeure pour l'instant vigoureuse avec des carnets de commandes à haut niveau et un segment des locaux d'entreprise qui reste bien orienté. Quant au secteur des travaux publics, l'optimisme reste de mise dans un climat de reprise confirmée. Toutefois, les points de vigilance se multiplient : d'un côté, se profile le freinage du marché résidentiel et de l'autre se font jour de nombreuses tensions comme les pénuries de main-d'oeuvre, de moyens de transport ou encore la hausse des prix des matières premières et de l'énergie.
Un bon deuxième trimestre
Les données provisoires du mois de juin viennent clore un deuxième trimestre et un premier semestre sur des tendances plutôt encourageantes. En effet, les livraisons de granulats ont progressé de +1,8% par rapport à mai et de +8,3% par rapport au mois de juin 2017 (données CVS-CJO). Ainsi, après un repli de -2,6% au premier trimestre (et une stagnation sur un an), l'activité des granulats s'est redressée sensiblement au deuxième trimestre, de +5% par rapport au trimestre précédent et de +6,1% par rapport au même trimestre d'il y a un an. En cumul sur les six premiers mois de l'année, la production enregistre une progression de +3,1%, soit un rythme plus soutenu que la hausse constatée sur les douze derniers mois (+2,5%).
Du côté du BPE, le mois de juin est en léger retrait pas rapport à mai (-1,6%) mais reste supérieur de +6% par rapport à juin 2017 (données CVS-CJO). Là aussi, les productions ont marqué un net rebond par rapport au premier trimestre 2018 qui était en repli de -1,1% par rapport au quatrième 2017 et en stagnation sur un an. Les volumes ont en effet grimpé de +6,1% entre le premier et le deuxième trimestre et de +7,3% au regard du deuxième trimestre de 2017. De fait, les cubages produits au premier semestre 2018 affichent une hausse de +5,2% sur un an, soit là aussi une hausse plus soutenue que celle enregistrée sur les douze derniers mois (+3,7%).
Du côté de notre indicateur matériaux, les mêmes tendances se constatent. Après un premier trimestre en recul de -0,8% sur un an, l'activité du panier de matériaux se raffermit de +5% au deuxième trimestre laissant le cumul sur les six premiers mois de l'année à +2,4% sur un an, en données provisoires.
Bâtiment : le logement s'essouffle
L'indicateur du climat des affaires de la dernière enquête mensuelle du bâtiment menée par l'INSEE en juillet reste solide. Bien qu'un peu moins confiants que ces derniers mois, les industriels jugent leurs carnets de commandes comme étant bien garnis et tous les soldes d'opinion demeurent à haut niveau. Il est vrai que la conjoncture reste bien orientée du côté du non résidentiel. A fin mai, et en dépit d'un tassement ces trois derniers mois, les surfaces autorisées progressaient de +7,5% en cumul depuis janvier, le segment des bureaux (+26,6%) dépassant de loin celui des locaux industriels ou administratifs (+9,6% et +5,1% respectivement).
Quant aux surfaces commencées, elles grimpaient de +13,3% sur la même période. En liaison avec la hausse des investissements des collectivités locales, à l'approche des échéances électorales de 2020, on observe un rebond des mises en chantier des bâtiments administratifs (+28%) mais aussi des bureaux (+22,5%) même si tous les segments contribuent à cette dynamique de -5,6% par rapport à la même période de l'an passé. En cumul sur douze mois, la progression n'est plus de que +1,5% (à 491 400 permis), la contraction étant plus marquée dans le segment de l'individuel pur (-10,6% sur le trimestre et -1,5% sur douze mois).
Comme le suggère la Fédération Française du Bâtiment dans son dernier point de conjoncture, le rabotage de certaines mesures de soutien (PTZ, Pinel) et les modifications institutionnelles (logement social, APL accession) commencent sans doute à produire leurs premiers effets. Du reste, le nombre de PTZ accordés a baissé de 61% entre le premier trimestre 2018 et le premier trimestre 2017 dans l'individuel neuf. Quant aux ventes « Pinel » dans le neuf, elles se sont repliées de -7,4% au premier trimestre sur un an, la part des investisseurs représentant 52% du total des acheteurs contre 57% l'été dernier. Toutefois, si le caractère moins incitatif des dispositifs d'aide à la pierre peut peser sur la dynamique des permis, il n'est pas seul responsable.
Selon la Fédération de Promoteurs Immobiliers en effet, d'autres facteurs structurels comme les difficultés d'accès au foncier, les procédures excessives de pré-instructions de demandes de permis, l'inflation des normes, les recours abusifs ou encore les modifications de PLU et PLUI à l'aube des prochaines échéances électorales de 2020, contribuent également à ralentir la dynamique des projets des promoteurs dont la politique d'offre n'est pas à la hauteur des besoins. L'augmentation du taux d'annulation des permis dans le collectif, qui dépasse 25% sur les cinq premiers mois de 2018 (contre 17% en moyenne depuis 2000) est peut-être un bon indicateur de ces difficultés.
TP : l'activité se consolide
Dans un contexte encore marqué par une certaine hétérogénéité territoriale, les professionnels du secteur des travaux publics confirment la poursuite du redressement de leur activité en mai. Sur les cinq premiers mois de l'année, les facturations progressent de près de +9% en valeur sur un an dans un contexte de hausse des coûts de production en partie liée à la facture énergétique. Les carnets de commandes, dont la lisibilité est « brouillée » par les attributions des projets liés au Grand Paris de 2017, semblent néanmoins se situer à un niveau supérieur à celui de l'an passé et se regarnissent dans la plupart des métiers des TP. C'est aussi ce que constatent les professionnels de la route. En effet, à fin mai, les carnets de commandes de travaux routiers affichaient une hausse de +8,7% sur un an tandis que les facturations progressaient de +5,1%.
Des perspectives encourageantes, à condition que la poursuite des chantiers ne soit pas perturbée par la montée des tensions (pénurie de transporteurs, insuffisance de main-d'oeuvre, etc.).