Son nom restera accolé à la première réforme du quinquennat, celle des ordonnances travail, menée en un éclair et sans grande contestation sociale.
"On nous avait dit qu'en septembre ce serait le feu et cela s'est bien passé", se remémorait, encore presque surpris, un député LREM, plusieurs mois après.
Plafonnement des indemnités prud'homales, ruptures conventionnelles collectives, fusion des instances représentatives du personnel, dans la continuité de la loi Travail de 2016, ces ordonnances promises par le candidat Macron, ont fait l'objet de "300 heures de concertation", se plaît-elle à rappeler. Au passage, elle se met FO dans la poche.
Pour Muriel Pénicaud, les premières semaines, c'"était face Nord", résume-t-elle quelques mois plus tard. Elle considère même avoir fait l'objet "d'attaques personnelles" destinées à faire échouer l'opération ordonnances. Notamment dans l'affaire Business France, organisme public dépendant de Bercy, qu'elle dirigeait depuis 2014, où l'organisation d'une soirée en 2016 à Las Vegas, dont Emmanuel Macron était la guest star, avait été confiée à Havas sans appel d'offres.
L'affaire n'est pas jugée mais la menace judiciaire s'est éloignée pour elle en 2018.
Après les ordonnances, elle enchaîne avec une réforme de l'apprentissage et de la formation professionnelle, et de premières mesures sur l'assurance chômage.
Sa relation avec le Premier ministre Édouard Philippe est rugueuse et elle va plaider sa cause auprès du chef de l'État quand il le faut. "Je suis sociale et libérale", dit-elle pour se définir. Et "plus à gauche qu'Édouard Philippe", ajoute-t-elle en souriant.
"Déterminée et sait ce qu'elle veut", dit d'elle l'ancien patron de FO, Jean-Claude Mailly, qui la connait depuis longtemps. "Elle vient de l'entreprise, cela se voit dans sa politique", tacle un autre syndicaliste. Elle "est sur la même ligne que Macron", grince de son côté un représentant patronal.
Diction qui patine
Malgré des discours officiels vantant le dialogue social et des invitations régulières, les partenaires sociaux se sentent largement ignorés par l'exécutif.
Au sein de son cabinet, elle s'était pourtant entourée d'experts du dialogue social.
Ainsi Antoine Foucher, ancien du Medef, devient son omniprésent directeur de cabinet à qui rien n'échappe, qui contrôle tout et communique.
Ayant vu François Hollande s'embourber dans l'inversion de la courbe du chômage, elle assure d'abord qu'elle ne commentera plus les chiffres du chômage, puis s'écarte de ce principe... dès qu'une embellie arrive.
Mais la réforme de l'assurance chômage, publiée par décret à l'été 2019 et qui durcit les conditions d'accès et d'indemnisation, a mis tous les syndicats vent debout, jusque mettre "les nerfs" à Laurent Berger, le numéro un de la CFDT. Cette réforme, dont une partie a été suspendue jusqu'en septembre, doit faire l'objet d'une "adaptation".
Son refus maladroit d'une proposition de loi allongeant le congé après la perte d'un enfant devant les députés fit polémique cet hiver, obligeant la majorité à revenir sur ses pas après une intervention du chef de l'État. Jusqu'ici, elle avait fait peu de bourdes, si ce n'est parfois celles liées à une diction qui patine et suscite des moqueries sur les réseaux sociaux.
La politique n'est pas inconnue à cette femme qui a l'abord et le contact facile.
Après avoir débuté sa carrière dans les collectivités territoriales, elle devient conseillère de Martine Aubry, ministre de la Formation professionnelle, au début des années 90.
"Tout le monde peut changer. On dit que je l'ai formée, moi je la trouve bien déformée...", avait persiflé son ancienne patronne en 2017.
Muriel Pénicaud avait ensuite bifurqué vers le privé: Danone puis Dassault Systèmes, avant de revenir en tant que DRH du géant de l'agroalimentaire.
Fin février, avec un taux de chômage autour de 8%, la ministre pouvait caresser l'idée de parvenir à l'objectif de 7% à la fin du quinquennat. Las, le coronavirus a tout mis par terre. Elle s'est affairée à adapter le chômage partiel pour en faire un dispositif "massif" et "éviter les licenciements".
Passionné de photographie, elle a déjà exposé en particulier des clichés d'oiseaux.