Dans sa déclaration de politique générale, Michel Barnier a plaidé en faveur de "mesures rapides pour relancer l'investissement locatif et l'accession à la propriété, notamment pour les primo-accédants", pour qui il souhaite "l'extension du prêt à taux zéro sur tout le territoire".
Cette mesure, qui permet un accès plus facile au crédit, est réclamée par les professionnels de l'immobilier depuis des mois et pourrait permettre selon eux de relancer la construction de logements neufs.
Pour la construction de logements neufs, le PTZ est actuellement réservé aux zones dites "tendues", qui concernent plus de 1.800 communes, et uniquement aux appartements, les maisons ayant été exclues du dispositif compte tenu des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols.
"Nous devons simplifier au maximum les normes qui pèsent sur la construction des logements neufs ou la réhabilitation des anciens", a ajouté Michel Barnier sans plus de précisions.
Le Premier ministre a aussi indiqué que le diagnostic de performance énergétique (DPE) serait "simplifié" et son calendrier "adapté".
Le DPE classe les logements de A à G en fonction de leur consommation d'énergie et de leur impact sur le climat et c'est sur cette base que la loi "Climat et Résilience" de 2021 prévoit d'interdire progressivement la location des logements énergivores.
Selon le calendrier actuel, les logements classés G ne pourront plus être loués à partir du 1er janvier 2025, puis les logements F à partir de 2028 et enfin les logements E à partir de 2034.
Un ajustement pourrait donc signifier un report de la date d'interdiction des passoires énergétiques.
Un premier ajustement du mode calcul du DPE est entré en vigueur le 1er juillet dernier concernant les logements de moins de 40 mètres carrés, afin de corriger un "biais" qui désavantageait les petites surfaces.
Sur le volet du logement social, Michel Barnier estime que "les bailleurs doivent pouvoir réexaminer régulièrement la situation de leurs locataires" et souhaite "donner plus de pouvoir aux maires dans l'attribution" de logements sociaux.
Plus d'un an après l'assouplissement de l'objectif "zéro artificialisation nette" des sols (ZAN) pour lutter contre la bétonisation des terres, Michel Barnier s'est dit favorable à une nouvelle évolution de la réglementation lors de sa déclaration de politique générale.
Appelant à "agir sur le logement", premier poste de dépense des Français, le Premier ministre a dit souhaiter "revitaliser la construction de logements", ce qui nécessite "du foncier".
"Nous devons faire évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation +zéro artificialisation nette+ pour répondre aux besoins essentiels de l'industrie et du logement", a-t-il déclaré devant les députés, une revendication toujours très forte des élus locaux.
Chaque année, entre 20.000 et 30.000 hectares de terres agricoles et de milieux naturels sont consommés du fait de l'urbanisation.
Inscrit dans la loi Climat et résilience de 2021, l'objectif de "zéro artificialisation nette" des sols vise à stopper l'étalement urbain d'ici 2050 pour mieux lutter contre les conséquences du dérèglement climatique, tout en préservant la biodiversité et les terres agricoles.
A cette date, toute nouvelle surface urbanisée devra être compensée par la renaturation d'une surface équivalente.
Un objectif intermédiaire prévoit de diviser par deux le rythme d'artificialisation des sols d'ici 2031 par rapport à la période 2011-2021.
Face à la fronde des élus locaux, qui dénoncent des règles d'application trop complexes, la mise en œuvre du ZAN a déjà été assouplie par la loi du 20 juillet 2023, introduisant notamment un droit minimal à construire pour les communes.
Les réactions des organisations de professionnels et des associations
La Fédération nationale de l'immobilier
La Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) s'est félicitée de la "réelle prise de conscience de l'urgence à agir".
Elle salue l'annonce d'une "nécessaire adaptation du calendrier de la rénovation énergétique". Son président Loïc Cantin se félicite aussi d'un retour du PTZ partout en France.
La Fondation Abbé-Pierre
Selon Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre, il n'y a "rien de positif pour les mal-logés à retenir du discours".
Le responsable associatif déplore notamment le "report des obligations de rénover les passoires", les "attributions HLM aux mains des maires" et des bailleurs sociaux "abandonnés sans coup de pouce financier".
La Fédération Française des Constructeurs de Maisons Individuelles
Pour Damien Hereng, Président de la FFC : « Nous ne pouvons que nous féliciter des annonces du 1er Ministre, lors de sa déclaration de politique générale, concernant le logement neuf. Le retour du PTZ partout sur l’ensemble du territoire sera de nature à relancer l’accession à la propriété des primo-accédants et donc la construction neuve sous toutes ses formes. Par ailleurs, la prise de conscience des conséquences catastrophiques de la politique du ZAN sur les territoires périphériques est une excellente nouvelle. Le 1er Ministre et sa ministre du logement peuvent compter sur notre soutien total pour mettre en œuvre ces mesures tant attendues par les professionnels, les concitoyens et les territoires. »
La Fédération Française du Bâtiment
La FFB se félicite que le Premier ministre ait pris acte de la crise du logement qui frappe le pays.
Dans son discours de politique générale, il a ainsi indiqué la nécessité de « mesures rapides pour relancer l’investissement locatif et l’accession à la propriété ». Comme proposé par la FFB, il s’est dit « favorable à l’extension du prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire ». C’est une mesure indispensable pour relancer la primo-accession, là où s’expriment les besoins de nos concitoyens.
Le Premier ministre, soulignant que la rénovation énergétique des bâtiments constituait une préoccupation majeure pour lui, a aussi annoncé un « plan d’isolation des bâtiments de l’État ».
Enfin, il a indiqué relancer les travaux de simplification. La FFB tient à la disposition du gouvernement une panoplie de propositions de nature à faciliter l’acte de construire ou de rénover. Certaines ont d’ailleurs été reprises par la Cour des comptes dans son récent rapport sur le permis de construire.
Pour Olivier Salleron, Président de la FFB : « Ces premières annonces, notamment le PTZ, constituent une vraie bouffée d’air pour le secteur. Elles arrivent au bon moment, alors que le marché du crédit immobilier se réouvre très progressivement. La FFB souhaite maintenant leur concrétisation rapide, ainsi que la confirmation de la stabilité des règles s’appliquant à MaPrimeRénov’. Les artisans et entreprises de bâtiment sont prêts ! »
Intercommunalités de France
Après la déclaration de politique générale du Premier ministre Michel Barnier, Intercommunalités de France se satisfait de la main tendue aux collectivités locales, notamment sur les questions liées aux finances publiques ou à la transition écologique. De nombreuses thématiques abordées, comme l’eau, l’habitat, les transports, ou le ZAN sont au cœur des compétences des intercommunalités. Mais les moyens concrets à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs affichés mériteraient d’être précisés. Dans le cadre des échanges à venir avec les membres du Gouvernement, les élus des instances d’Intercommunalités de France souhaitent obtenir des clarifications sur les politiques qui seront mises en œuvre et leur feront part des propositions de l’association.
Concernant les finances, la volonté du Premier ministre de faire « avec les collectivités locales, et non pas contre elles ou sans elles » est un signal encourageant après de nombreuses accusations injustifiées faites à l’endroit des collectivités. Intercommunalités de France réaffirme l’esprit de dialogue et de concertation cher à l’association qui présidera dans les échanges avec les ministres de l’Économie et du Budget.
Bien que la priorité soit également donnée à la transition écologique, au cœur des compétences des communautés de communes, agglomérations et métropoles, Intercommunalités de France s’interroge sur les arbitrages qui seront faits sur le fonds vert, nécessaire au financement des politiques en faveur de l’environnement dans les territoires.
Les élus d’Intercommunalités de France sont tout particulièrement sensibles à la question de la gestion de l’eau, priorité de l’association. Si la création d’une « grande conférence nationale » consacrée aux « enjeux stratégiques liés à l’eau » est un signal intéressant, Intercommunalités de France appelle le Premier ministre à réaffirmer l’engagement de l’exécutif pour le maintien du transfert de la gestion de l’eau potable et de l’assainissement en 2026 aux intercommunalités. Il en va de l’impératif de sobriété dans un contexte de raréfaction de la ressource.
Plus globalement, les mots-clefs « écoute, dialogue et contractualisation avec les collectivités locales et les élus locaux » affichés par le Premier ministre sont un signal positif, mais qu’il convient de mettre en œuvre concrètement. Intercommunalités de France espère que des réponses seront apportées lors de sa 34e convention au Havre du 16 au 18 octobre prochains.
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