Outre les cinq ans d'emprisonnement, dont quatre ans ferme, Gérard Gallas, qui louait une centaine de logements insalubres essentiellement à des étrangers en situation irrégulière ou demandeurs d'asile, dont des familles avec enfants, a été condamné à 75.000 euros d'amende et 300.000 euros de dommages et intérêts.
Le tribunal correctionnel de Marseille a également ordonné la confiscation de deux immeubles et de 220.000 euros saisis sur une assurance-vie.
Absent à la lecture du délibéré, Gérard Gallas, 50 ans, est hospitalisé après avoir été placé en détention dans un autre dossier. Le parquet d'Aix-en-Provence a précisé mercredi qu'il avait été écroué le 17 janvier pour viols et violences habituelles sur conjoint ayant entrainé une infirmité permanente.
Contre son "gestionnaire", Ali Faissoili Aliani, 38 ans, absent au procès à l'automne, lors duquel il avait été présenté comme un "factotum zélé qui n'hésitait pas à faire le coup de poing contre les mauvais payeurs", le tribunal a prononcé une peine de quatre ans de prison ferme avec mandat d'arrêt et 45.000 euros d'amende.
En tout, en son nom propre ou via des sociétés civiles immobilières (SCI), l'ancien policier, qui avait travaillé plus de dix ans au Centre de rétention administrative (CRA) de Marseille, possédait une dizaine d'immeubles dans la deuxième ville de France. Mais seuls quatre de ces bâtiments, dans les quartiers populaires du nord de la ville, lui valaient d'être jugé.
Ses logements, parfois aménagés dans des caves, étaient loués jusqu'à 600 euros, souvent réglés directement par la Caisse des allocations familiales (CAF) ou via un terminal bancaire pour les détenteurs d'une allocation de l'Office français de l'immigration.
"L'impunité, c'est terminé"
A l'audience, plusieurs locataires avaient témoigné de l'insalubrité de leurs "logements", des pièces exiguës, parfois aveugles, sans eau chaude ni chauffage, voire sans électricité, où proliféraient cafards et rats.
Ils avaient aussi dit leur "peur" de l'ancien policier, qui les "menaçait" et se disait "copain avec le commissaire" de quartier, tout en expliquant n'avoir "nulle part ailleurs où aller".
Le tribunal, qui est allé au-delà des réquisitions du procureur, a mis en avant les "circonstances aggravantes" liées à la "pluralité de victimes" et à "la grande ampleur" des faits, "répétés sur plus de trois ans malgré de nombreuses alertes".
L'ancien policier, qui "visait une rentabilité locative maximale", "exploitait sans scrupule la misère d'autrui", a asséné le président du tribunal Pascal Gand.
Il a également souligné la "personnalité trouble" de l'accusé qui, à l'audience, s'était présenté comme un "modèle inspirant", président-fondateur d'une "église catholique traditionnelle, filiation apostolique vieille catholique", expert en exorcisme mais aussi en arts martiaux.
"C'est une grande satisfaction pour toutes les victimes. Ce sont des personnes invisibles qui ont gagné en visibilité, malgré leur statut d'étrangers en situation irrégulière", a réagi Me Aurélien Leroux, avocat de plusieurs locataires et de deux associations marseillaises, Réseau Hospitalité et Un centre-ville pour tous.
"C'est la peine la plus lourde jamais prononcée contre un marchand de sommeil à Marseille", ville gangrénée par l'habitat indigne, avec 40.000 taudis, soit 10% du parc immobilier, et "cette décision s'inscrit dans un ras-le-bol à Marseille et en France", a ajouté l'avocat, rappelant que ce verdict survient quelques heures seulement après l'adoption à l'Assemblée nationale d'un projet de loi contre "l'habitat dégradé" qui prévoit de nouveaux outils pour lutter contre les marchands de sommeil.
"Notre mobilisation contre les marchands de misère porte ses fruits et va être renforcée grâce au projet de loi adopté à l'Assemblée nationale", a réagi Benoît Payan, maire divers gauche de Marseille qui s'était constituée partie civile. "L'impunité, c'est terminé", a-t-il affirmé sur le réseau social X.
Même satisfaction du côté des associations parties civiles, qui ont salué un procès "exemplaire". "C'est un verdict qui montre que ces gens qui exploitent la misère humaine ne resteront pas impunis", a souligné Margot Bonis, de Réseau Hospitalité.