Ce programme destiné aux propriétaires occupants ou bailleurs, est ouvert en priorité aux propriétaires occupants qualifiés de « modestes » ou de « très modestes ». Il avait comme objectif entre 2010 et 2017, la rénovation de 300.000 logements du parc privé pour obtenir une baisse de la consommation énergétique de 30% en moyenne.
Contrairement aux autres dispositifs fiscaux qui visent un objectif énergétique, tels que le crédit d’impôt transition énergétique (CITE) ou la TVA à 5,5 % ouverts plus largement, le programme « Habiter Mieux » s’adresse à un public ciblé dans le cadre d’une enveloppe programmée de crédits. Il est mis en œuvre dans le cadre de 184 territoires de gestion recouvrant les délégations déconcentrées de l’ANAH et les collectivités locales délégataires de l’aide à la pierre : cette gestion de proximité facilite le respect des objectifs du programme et permet la mobilisation des acteurs pour sensibiliser et accompagner les bénéficiaires des subventions.
Un programme qui a souffert du manque de stabilité de ses moyens et de sa réglementation
Le programme « Habiter Mieux » permet d’apporter un complément aux aides habituelles de l’ANAH1 qui incitent les particuliers à effectuer des travaux de rénovation dans leur logement. Son financement repose sur une convention du 14 juillet 2010 et trois avenants successifs, qui prévoient une enveloppe spécifique, dite « fonds national d’aide à la rénovation thermique » (FART), au sein de la mission ville-logement du programme d’investissement d’avenir (PIA).
Initialement fixée à 500 M€ pour la période 2010-2017, cette enveloppe a connu par la suite de nombreuses évolutions. Au cours des dix révisions de son montant intervenues depuis sa création, le niveau de l’enveloppe est tombé à 365 M€ en 2013 pour remonter à 695 M€ au 31 décembre 2016.
Cette instabilité financière n’a pas permis d’établir un régime d’aide suffisamment pérenne pour attirer tous les bénéficiaires potentiels de ces aides. Les montants alloués ont connu cinq modifications en sept ans, tout en passant d’un mode forfaitaire à une indexation sur le montant des travaux. Plafonnées à un montant individuel de 1.600 € à l’origine, les subventions destinées aux propriétaires occupants ont atteint 3.500 €, pour redescendre finalement à 2.000 € maximum depuis 2016.
Ces variations de l’enveloppe du FART et du régime des aides ont eu une incidence sur le ciblage des publics. Ouvert aux propriétaires occupants, puis aux propriétaires bailleurs liés par une convention de loyer à caractère social et enfin aux syndicats de copropriété, le programme « Habiter Mieux » a bénéficié en définitive principalement aux propriétaires occupants (88 % des dossiers) et, parmi ces derniers, à ceux qui sont définis comme « très modestes2 » (83 % des dossiers de propriétaires occupants).
Des résultats contrastés et encourageants
Fondé sur un objectif de rénovation de 300.000 logements entre 2010 et 2017, le programme « Habiter Mieux » a effectivement financé au 31 décembre 2017, 243.239 dossiers de travaux et ainsi atteint son objectif à 81%. La cible de 100.000 logements supplémentaires pour 2017, fixée par l’ANAH pour tenter d’atteindre les 300.000 logements attendus, s’est néanmoins révélée hors de portée puisque, après une tendance décroissante du nombre de dossiers entre 2015 et 2016, l’agence a financé 52.061 logements dans le cadre de ce dispositif.
Sur le plan des performances énergétiques, le programme a dépassé ses objectifs, puisque la moyenne des gains s’est élevée à 41,9 % en 2015 et 43,2 % en 2016 pour une moyenne escomptée de 30 %. Ces résultats favorables doivent néanmoins être nuancés : d’une part, les gains enregistrés n’ont pas permis systématiquement une amélioration de l’étiquette énergétique attachée à chaque logement ; d’autre part, les types de travaux engagés par les propriétaires pour atteindre une amélioration énergétique ont été disparates et leur réalisation parfois discutable en termes de sécurité et de choix de matériels, faute d’une information pleinement satisfaisante des consommateurs.
En définitive, il parait possible d’améliorer l’efficacité du programme « Habiter Mieux » – exprimée en termes de nombre de rénovations ou de niveau des étiquettes énergétiques des logements – par une programmation pluriannuelle des crédits, par une plus grande stabilité du régime d’aide, et par une ouverture plus large du programme aux propriétaires occupants « modestes », qui sont comparativement en capacité financière de mener des travaux plus ambitieux.
Au total, la procédure d’instruction des dossiers, consommatrice d’emplois administratifs, mais aussi créatrice d’emplois chez les opérateurs prestataires de l’ANAH, apparaît bien gérée et évaluée : l’existence d’une double visite de l’opérateur chez le demandeur avant et après les travaux, de contrôles sur place effectués par les instructeurs de l’ANAH et de procédures globales d’évaluation du dispositif contraste, dans ce domaine, avec l’absence généralisée de vérifications pour les aides fiscales.
En définitive, c’est au regard de résultats contrastés et encourageants qu’il convient d’apprécier la capacité du programme à contribuer à la réalisation des ambitieux objectifs fixés fin novembre 2017 dans le cadre du Grand Plan d’Investissement 2018-2022. Le gouvernement a en effet annoncé son intention de renforcer sur cette période d’1,2 Md€ le programme « Habiter Mieux », dans le cadre d’un nouveau plan de rénovation énergétique inclus dans l’objectif général de rénover toutes les « passoires thermiques » du parc privé d’ici 2025, soit environ 7 millions de logements classés en étiquettes F ou G. Dans cette perspective, l’ANAH a reçu une enveloppe budgétaire complémentaire, a décidé d’adopter des procédures simplifiées à compter de 2018 pour une partie des aides, et envisage désormais de généraliser des expériences de gestion dématérialisée qui ont été engagées en 2017, ce qui, selon ses responsables, devrait lui permettre d’atteindre les 75.000 logements rénovés par an visés par le gouvernement sans augmentation de ses effectifs. Cette ambition ne pourra cependant pas être satisfaite sans le renforcement des partenariats entre les services de l’État, l’ANAH et les collectivités territoriales délégataires de ce programme.
Enfin, le gouvernement ayant parallèlement indiqué son intention de ne reconduire que pour 2018 le CITE avant de le transformer en prime, cette future suppression de la plus importante des dépenses fiscales actuelles prévues pour la rénovation énergétique devra être l’occasion d’une réflexion globale, dans le cadre de la préparation de la loi de finances pour 2019, sur l’intérêt d’un rapprochement entre le futur dispositif et le programme « Habiter Mieux » et, par ailleurs, sur l’intérêt que pourrait présenter pour les ménages la mise en place d’un guichet unique pour l’ensemble des aides à la rénovation énergétique des logements.
Les 7 recommandatations de la Cour des comptes
- Préciser le ciblage du programme « Habiter Mieux » à partir du critère de la réduction de la précarité énergétique, afin de mieux définir ses objectifs énergétiques et sociaux
- Assurer pour la nouvelle procédure simplifiée, grâce à un diagnostic préalable, une garantie technique minimale de la justification des attributions d’aides
- Stabiliser la réglementation des aides au cours de la période couverte par les objectifs pluriannuels des plans de rénovation énergétique
- Encourager les délégations de type 2 et 3 accordées aux collectivités territoriales
- Inscrire le programme « Habiter Mieux » dans le contrat pluriannuel d’objectifs et de performance de l’ANAH
- Rendre opérationnelle à brève échéance la simplification des procédures d’octroi des aides, en s’appuyant notamment sur leur dématérialisation
- Développer la communication sur le programme « Habiter Mieux » et l’information des publics concernés
L'Anah se félicite de ces conclusions et confirme sa mobilisation pour la poursuite de la réussite de ce programme
Nathalie Appéré, présidente de l'Anah, se félicite des conclusions du rapport remis par la Cour des Comptes sur le programme Habiter Mieux qui soulignent la tenue des objectifs en matière écologique et sociale, et une gestion efficace appuyée sur l'adaptation aux territoires et la délégation aux collectivités locales.
« De tous les dispositifs destinés à réduire la consommation énergétique des logement, le programme Habiter Mieux est celui qui présente le plus de caractéristiques satisfaisantes sur le plan de la gestion assurée depuis son lancement en 2010 par l'Anah. Ce programme qui attribue des aides financières aux propriétaires modestes, aux propriétaires bailleurs et aux syndicats de copropriétaires est créateur d'emplois chez les opérateurs [en charge de l'accompagnement des ménage] ».
Comme énoncé dans les recommandations, l'Anah est d'ores et déjà mobilisée pour atteindre l'objectif qui lui est fixé dans le cadre du plan de rénovation énergétique des bâtiments : aider chaque année 75.000 foyers modestes à faire les travaux nécessaires pour retrouver du confort et du pouvoir d'achat en réduisant leurs factures d'énergie.
Le budget 2018 de l'Anah est stabilisé : c'est un signal fort en direction des collectivités pour qu'elles s'engagent dans des opérations programmées d'amélioration de l'habitat et offrent un accompagnement complet aux ménages les plus modestes.
Le programme s'est quant à lui étoffé d'une nouvelle aide Habiter Mieux agilité, destinée aux propriétaires occupants, en maison individuelle. Cette aide se déploie en secteur diffus comme en secteur programmé.
Habiter Mieux agilité permet à ces ménages modestes de faire réaliser un des troix types de travaux de rénovation énergétique parmi les plus efficaces : changement de système de chauffage ou de chaudière, isolation des combles aménagés ou aménageables ou isolation des murs. Cette nouvelle aide est une solution qui:
- répond à des situations d'urgence sociale en simplifiant le travail pour les opérateurs-conseil qui oeuvrent auprès de l'Anah ;
- permet de compléter une rénovation déjà engagée en diminuant le reste à charge ;
- ou encore, permet de réaliser une première phase de travaux qui améliore sensiblement le confort du logement tout en restant compatible avec les capacités financières du ménage.
Avec le service en ligne : monprojet.anah.gouv.fr, l'accès aux aides de ce programme est de plus en plus facilité. Ce service en ligne est disponible pour les propriétaires occupants dans les régions Grand Est, Bourgogne Franche Comté, Hauts de France, Normandie, Pays de Loire et Occitanie. Fin 2018, il couvrira tout le territoire national et permettra également le traitement des dossiers des syndicats de copropriétaires et des propriétaires bailleurs.
La mobilisation de l'Anah et de ses partenaires dans les territoires est quotidienne. Ce vendredi 6 avril, ce réseau de proximité est réuni pour la première fois à l'occasion d'une journée de travail : le « Moment Pro Habiter Mieux » pour échanger sur ses bonnes pratiques et son savoir-faire en matière de lutte contre la précarité énergétique.
Le rapport complet de la Cour des comptes est disponible ici.
1 Aides pour la réalisation de travaux lourds destinés aux logements indignes ou très dégradés, travaux d’amélioration de la sécurité et salubrité de l’habitat, travaux en faveur de l’autonomie de personnes âgées ou handicapées…
2 Pour une personne seule, le plafond des revenus de la catégorie très modeste s’élevait à 14.308 € (19.803 € en Île-de-France) en 2016.