Une seconde vie pour les anciens bâtiments
Avec la pandémie, les mesures de santé publique ont transformé des maisons en bureaux et laissé des immeubles de bureaux vides. Si certains de ces changements se sont atténués, l’utilisation des bâtiments a véritablement changé : la fréquentation des bureaux ne sera plus la même, le télétravail et travail hybride vont perdurer et le commerce physique ne récupérera jamais complètement le terrain perdu.
En parallèle, l’immobilier résidentiel fait face à une pénurie de logements que les nouvelles constructions ne peuvent combler en raison d’un manque de matériaux, de main-d'œuvre et de terrains. Dans un secteur où certains types de biens sont surabondants, alors que d’autres sont insuffisants, les entreprises devront faire de réels efforts pour relever les défis de la réaffectation des bâtiments, qui constituent des opportunités importantes afin de répondre à l'évolution des besoins immobiliers.
L'énergie au cœur de la refonte de l'utilisation des bâtiments
Les évolutions observées dans l'utilisation des bâtiments au cours des deux dernières années, sont survenues alors que des changements avaient déjà été opérés afin de répondre à la pression réglementaire et sociétale pour une plus grande efficacité énergétique. Cela implique de meilleures approches de l’efficacité des bâtiments, en termes de conception, modernisation et système de gestion de l’énergie des bâtiments.
Par exemple, l'adoption croissante des véhicules électriques, entraînera une demande accrue d'énergie électrique. Dans le même temps, les arguments économiques en faveur des énergies renouvelables à petite échelle entraineront les déploiements de panneaux solaires. Ces développements conduiront les bâtiments à devenir à la fois consommateurs et producteurs d'électricité. On parlera alors de "prosumers" pour décrire la manière dont les propriétaires gèrent cette nouvelle relation avec l'électricité. La façon dont les bâtiments interagissent avec l'infrastructure énergétique est depuis longtemps essentielle. Néanmoins, l’impact de l’évolution des besoins des consommateurs sur le réaménagement des bâtiments conduira à renforcer cette interaction. Les appels d'offres devraient donc être naturellement de plus en plus axés sur les questions de gestion énergétique.
La digitalisation comme catalyseur
Les technologies et les approches traditionnelles ne suffisent plus aujourd’hui pour que les changements majeurs dans la façon dont les bâtiments interagissent avec l'infrastructure électrique soient viables. Les technologies intelligentes, y compris les compteurs intelligents, deviendront essentielles pour permettre aux bâtiments de réinjecter de l'énergie dans le réseau et pour fournir aux opérateurs de réseau des informations sur la consommation d’énergie de chaque bâtiment.
Le réseau d'un bâtiment individuel peut être rendu plus polyvalent et plus flexible grâce à la technologie numérique. Les systèmes électriques intelligents des bâtiments sont capables de réagir aux conditions du réseau, par exemple en chargeant les véhicules électriques aux heures de faible demande. Alors que le système électrique global continue de se transformer, les systèmes numériques offriront la flexibilité et l'adaptabilité nécessaires à chaque étape de la production et de l'utilisation de l'énergie. Ces changements amènent à une relation plus intelligente, plus réactive entre les bâtiments et l'infrastructure. Des projets démontrant la valeur de ce type d'approche sont déjà en cours, la gestion intelligente de l'énergie va devenir un élément essentiel de réponse à la crise climatique.
La sécurité des bâtiments redéfinie
Avec la pandémie, les autorités de santé publique tentent de comprendre la dynamique de la transmission virale et l'impact des interventions telles que l'augmentation de la ventilation sur le fonctionnement des systèmes de gestion des bâtiments. Il est important de trouver un équilibre entre la sécurité des personnes et le maintien des activités quotidiennes.
Parallèlement, il sera indispensable d'identifier le profil de risque de cybersécurité des bâtiments, car les systèmes intelligents peuvent constituer des failles dans leur structure, au niveau des tableaux de distribution électrique et des équipements de chauffage, ventilation et climatisation. Ces éléments doivent être considérés comme faisant partie d'un système global complexe et cohérent, et non comme des questions distinctes pouvant être traitées de manière isolée. Il est donc probable que de nouvelles normes de sécurité des bâtiments se développent au cours des prochaines années.
Des liens plus étroits entre les bâtiments et les autres secteurs d’activité
De nombreux facteurs tels que les préoccupations sur le climat ou bien la pression du public pour répondre à des besoins changeants vont impacter les évolutions de ce secteur. Il est ainsi nécessaire d’impliquer un ensemble large de parties prenantes confrontées à leurs propres défis de transformation.
La connexion entre les différentes industries peut être facilitée par le processus connu sous le nom de « couplage sectoriel », c’est-à-dire l’électrification des transports et des bâtiments tertiaires et industriels.
Un bon couplage sectoriel dans le secteur du bâtiment permettra de soutenir et d'accélérer la décarbonation grâce à un réseau plus résilient, à une production décentralisée et à une utilisation intelligente de l'énergie qui s'adapte à l'offre. Il s'agit là d'un élément essentiel de la transformation énergétique. L’évolution de l’utilisation des bâtiments offre à ce même secteur une occasion unique de contribuer au processus.
Tribune de Laëtitia Tran-Rodeghiero, Commercial Buildings Segment Manager chez Eaton Electrical France (LinkedIn).