"La France et l'Italie sont les deux pays les plus proches historiquement, culturellement et même affectivement de tous les peuples européens", a affirmé le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire, aux côtés de son collègue Giovanni Tria, lors du Forum économique franco-italien organisé par le Medef (patronat français) et son équivalent italien Confindustria.
M. Le Maire a ainsi donné le ton d'une réunion marquée par la volonté d'apaisement de la part des deux gouvernements, après les tensions qui ont trouvé leur point culminant lors du rappel par Paris de son ambassadeur il y a un mois. Il est de retour à Rome depuis le 15 février.
Cet esprit de réconciliation n'a pas empêché M. Le Maire, dans son intervention, de dénoncer longuement le nationalisme, évitant toutefois d'utiliser le terme "populisme" pour ne pas froisser la susceptibilité de la coalition... populiste au pouvoir en Italie.
"Le nationalisme économique, c'est la crise économique assurée, c'est l'appauvrissement de nos nations et c'est la relégation garantie de l'Europe sur la scène internationale", a-t-il affirmé avec virulence.
Pour sa part, M. Tria s'en est pris à l'Europe d'une manière générale: "Nous devons consacrer beaucoup plus de temps à décider ce que nous voulons faire ensemble et passer moins de temps à discuter sur ce que le voisin doit faire", a-t-il dénoncé.
Lyon-Turin : "évolution positive"
Après ces prises de position, les deux ministres se sont efforcés de dissiper les malentendus de ces derniers mois face à un parterre de chefs d'entreprises franco-italiens qui les ont appelés "à construire un dialogue solide et indispensable au développement économique" des deux pays dans la déclaration finale du Forum.
M. Le Maire a tenté de rassurer son homologue italien sur la fusion des Chantiers de l'Atlantique (ex-STX France) et de l'italien Fincantieri, une question qui a avivé les tensions entre les deux pays au cours des derniers mois.
"Je crois à cette fusion. Je crois au rapprochement de la France et de l'Italie en matière navale", a-t-il affirmé, démentant que la France ait fait appel aux autorités européennes de la concurrence pour empêcher ce rapprochement.
Début janvier, la Commission européenne s'était dite préoccupée par le projet de rachat des Chantiers de l'Atlantique par Fincantieri, estimant que cette "opération pourrait nuire à la concurrence au niveau européen et mondial".
Pour sa part, M. Tria, qui a rappelé que son gouvernement soutenait cette fusion, a laissé entrevoir un déblocage du projet ferroviaire Lyon-Turin.
"Il y a un débat au sein du gouvernement italien, mais je crois que l'évolution est positive", a-t-il assuré, cherchant à son tour à rassurer Paris.
De son côté, M. Le Maire a réitéré le soutien du gouvernement français à ce projet ferroviaire.
En Italie, ce projet provoque une vive crispation entre la Ligue de Matteo Salvini (extrême droite), dont la base de petits entrepreneurs du Nord y est très favorable, et le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème), qui a promis de mettre fin à ce qu'il considère comme un gaspillage d'argent public. Aucun des deux ne peut se permettre de céder avant les élections européennes.
Plusieurs réunions entre les partenaires de la coalition se sont tenues cette semaine, mais les décisions sont renvoyées à la semaine prochaine. Selon les médias italiens, le chef du gouvernement Giuseppe Conte s'est saisi du dossier et travaillerait sur un projet moins ambitieux.
Selon les médias, Rome pourrait valider les appels d'offres qui doivent être lancés avant le 11 mars, sous peine de perdre 300 millions d'euros de subventions européennes, mais en y ajoutant une clause suspensive le temps d'élaborer le nouveau plan. Les services du Premier ministre ont démenti vendredi ces informations de presse comme "dénuées de tout fondement", assurant que M. Conte "n'a lancé aucune hypothèse de mini-Lyon-Turin".