Mais conjuguées à une poursuite de la baisse des taux d’intérêt, elles devraient permettre de prolonger le mouvement de redressement du marché immobilier neuf, amorcé depuis quelques mois. Seront-elles suffisantes pour en accroître l’ampleur ? La remontée du chômage, une faible croissance… ne risquent-elles pas d’altérer la confiance des ménages ? Pour l’heure, la production de crédits habitat, les ventes et les perspectives des promoteurs sont mieux orientées. L’activité constructive résidentielle demeure à la peine mais commence doucement à relever la tête tandis que, du côté des travaux publics, le climat est plus serein. Dans ce contexte, le marché des matériaux de construction se ranime timidement après une année difficile où les productions ont cédé - 4% dans les granulats et - 11,6% en BPE pour atteindre des niveaux historiquement bas.
Nouvelle hausse en décembre
Selon les premiers résultats, l’activité des matériaux aurait de nouveau progressé en décembre. Ainsi, en granulats, la production se redresse de +3,5% sur un mois (après +4,2% en novembre), et de +0,3% comparé à décembre 2023 (données CVS-CJO). De sorte que, au quatrième trimestre, l’activité gagne +1,6% par rapport au trimestre précédent mais aussi au regard d’il y a un an (+0,7%). C’est la première fois depuis près de trois ans que les granulats affichent une progression trimestrielle sur un an ! Au total en 2024, le recul de la production de granulats atteindrait ainsi -4%, soit un chiffre plutôt conforme à nos dernières prévisions. Côté BPE, les livraisons se seraient également raffermies en décembre (+2,4% après +1,9% en novembre) mais elles sont encore en retrait de -9,3% en comparaison de l’an passé (données CVS-CJO). Au dernier trimestre 2024, le BPE enregistre ainsi une quasi-stabilisation de sa production par rapport au trimestre précédent (-0,5%), le recul sur un an se modérant à -7,5%. Sur l’ensemble de l’année 2024, les livraisons de béton prêt à l’emploi s’enfoncent cependant de -11,6%, une contraction importante mais alignée sur nos attentes. Ces évolutions tirent le volume de production vers ses plus bas historiques : en BPE, il atteindrait 33,3 millions, un cubage jamais atteint depuis 25 ans tandis que, côté granulats, le volume extrait (hors recyclage) ressortirait à 275 millions de tonnes, soit tout simplement le plus bas niveau jamais enregistré depuis 40 ans.
L'indicateur matériaux de l'UNICEM décrit lui aussi une tendance légèrement positive : après +1,2% en octobre, il affiche +1,6% en novembre (à 85,9). Cela permet de renouer avec une hausse en glissement annuel (+1,2%), ce qui n’était pas arrivé depuis deux ans (données CVS-CJO). Au cours des trois derniers mois (septembre à novembre), l’index se redresse de +0,7% par rapport aux trois mois précédents mais reste en retrait de -2,2% sur un an. En cumul glissant sur les onze mois de 2024, l’indicateur d’activité du panier de matériaux observe un repli de -6,7%, le recul allant de -2,1% pour la pierre taillée à -20,1% pour les tuiles et briques.
Bâtiment : la route est encore longue
A l’instar du BPE, du granulat et d’autres matériaux, l’année 2024 restera marquée dans la construction résidentielle par l’atteinte de points bas : 330.400 logements collectifs ont été autorisés dans l’année (-12,3%), un niveau jamais connu depuis des décennies qui laisse craindre une vraie pénurie d’offre dans les années à venir ; quant aux mises en chantier, avec 263.100 logements commencés, elles s’enfoncent encore de -11,1% en 2024 et franchissent aussi des seuils historiquement faibles. Les récentes évolutions suggèrent toutefois que le creux de la vague est passé : en effet, entre le troisième et le quatrième trimestre, les permis affichaient une hausse de +5% (dont +3,7% dans l’individuel et +5,8% dans le collectif, données CVS-CJO) tandis que les mises en chantier grimpaient de +5,2% (dont +2,9% pour les maisons et +6,5% pour les appartements). Comparé à il y a un an, la tendance redevient même positive au dernier trimestre pour les mises en chantier (+3,9%) mais reste baissière pour les autorisations (-8,1%). L’activité sort donc doucement de sa profonde léthargie mais le chemin vers la sortie de crise reste long et semé d’embuches. Côté non résidentiel, les surfaces de locaux commencées ont également beaucoup reculé en 2024, de -10,6%, à 20 millions de m². Les autorisations, en revanche, se sont stabilisées entre 2023 et 2024, à 37,6 millions de m² et seraient même, selon le ministère, en hausse de +2,9% sans l’effet des déclarations reçues avec retard. Elles progressent en tout cas de +3,2% en glissement annuel au quatrième trimestre, le segment de l’industrie et des services publics tirant la dynamique.
Plus en amont, les promoteurs sont moins pessimistes sur la demande de logements qui leur est adressée (enquête INSEE de janvier 2025). Si leurs perspectives de mises en chantier se sont redressées depuis un an, ils restent très réservés, notamment sur le segment de la location, et les soldes d’opinion restent bien en dessous de leur moyenne de longue période. Il est vrai que l’offre immobilière s’assèche : moins de 10.000 logements ont été mis en vente au quatrième trimestre 2024 (soit -31,7% sur un an). Sur l’année, c’est 50% de logements neufs en moins mis sur le marché par rapport à 2022 en raison d’opérations raréfiées, retardées, stoppées voire annulées. Fin 2024, 31% des logements des programmes neufs ont vu leur commercialisation suspendue ou arrêtée (contre 3% début 2022). Les acheteurs reviennent pourtant doucement : selon la FPI, les ventes aux propriétaires occupants se sont stabilisées en 2024 (+0,7% à 37.179 logements), grâce à un rebond au second semestre (dont +18,2% sur un an au quatrième trimestre), la baisse des taux et l’offre bancaire ayant permis de resolvabiliser la demande. A contrario, les investisseurs se sont massivement désengagés en 2024 : les ventes en bloc (aux institutionnels) ont reculé de -9,7% à 32.885 logements (dont -33,3% en fin d’année en raison de la fin du plan de rachat de CDC Habitat et d’Action Logement). Quant aux investisseurs privés, en dépit de l’arrêt du dispositif Pinel fin 2024, les ventes ont plongé de -11,7% sur l’année (18.440 logements), le rebond du second semestre (+8,1% sur un an), n’ayant pas permis de sauver l’année. Le marché de la maison individuelle semble aussi se ranimer. Selon Markemétron, 2024 s’est bien terminée, avec des ventes en hausse sur un an de +35,2% en décembre et de +17,6% au quatrième trimestre. Sur l’année, 50.700 maisons ont finalement été vendues (-13,2% par rapport à 2023), un chiffre bas mais bien meilleur qu’en janvier (-40%). Le redressement peut-il se poursuivre à ce rythme ? En dépit de nouvelles baisses du taux directeur de la BCE, les marges de recul des taux d’intérêt en 2025 seront probablement plus faibles qu’en 2024, l’instabilité politique et l’ampleur des déficits publics contribuant à tendre les taux obligataires. De même, dans un contexte de croissance molle (moins de 1% prévu en 2025) et de remontée du chômage, la confiance des ménages, essentielle pour engager des projets d’investissement, pourrait se fragiliser. Il faudra alors compter sur l’effet incitatif des mesures gouvernementales, récemment votées, pour dynamiser la demande. Le rétablissement du PTZ, élargi à tout le territoire et tous les types de logements jusque fin 2027, la défiscalisation des donations / successions pour l’achat d’une résidence principale et d’autres mesures de simplification réglementaire, pourraient permettre de relancer le marché...
2024, année positive dans les TP
Après une hausse de +4,2% en volume en 2023, l’activité des travaux publics a progressé de +2,3% en 2024 même si la FNTP souligne un freinage des travaux réalisés entre novembre et décembre (-5%, données CVS-CJO). Les marchés conclus, en très fort rebond en 2023 avec l’attribution des réacteurs nucléaires de Penly, ont mécaniquement perdu en intensité en 2024 (-9,9%) mais leur niveau reste supérieur à 2022. Mesurée début janvier, l’opinion des chefs d’entreprise sur l’activité à venir s’améliore avec la clientèle privée tandis qu’elle se dégrade avec la clientèle publique. L’approche de la fin du cycle électoral conjuguée à l’effort de réduction de déficit public demandé aux collectivités (2,2 Mds d’euros contre 5 Mds prévus sous Barnier) pourraient peser sur l’investissement local en 2025, notamment dans les départements.
Chiffres clés
Des productions mieux orientées au quatrième trimestre : +1,6% (granulats) et -0,5% (BPE) comparé au trimestre précédent.
Image d'illustration de l'article via Depositphotos.com.