La fin d'année risque de se solder par un coup de frein sensible alors même que les indicateurs et enquêtes témoignaient encore d'une relative solidité. Très largement supérieurs à leurs niveaux moyens de long terme dans le bâtiment comme dans les travaux publics, les indicateurs de confiance semblent cependant avoir atteint un point haut, suggérant que le cycle est arrivé à maturité.
Novembre confirme l'atterrissage
Selon les résultats provisoires de la dernière enquête mensuelle, les productions de matériaux auraient de nouveau reculé sur un an en novembre.
Légèrement meilleures qu'en octobre, qui avait été très décevant, elles affichent un repli de -1% du côté des granulats et -3,4% pour le BPE en glissement annuel. Les mauvaises conditions climatiques ont assurément retardé des chantiers dans de nombreuses régions de France, notamment dans le Sud-Est plus fortement impacté.
Ainsi, s'agissant des granulats, et sur les trois derniers mois connus, l'activité se contracte de -1,6% par rapport au trimestre précédent (données CVS-CJO) et de -1,2% par rapport à la même période de l'an passé. En cumul sur les onze mois de 2019, la production de granulats demeure sur une tendance haussière qui continue toutefois de se modérer (+1,1% sur un an) tandis que sur les douze derniers mois, le rythme reste proche de +1,5%. L'impact de la forte pluviométrie a sans doute été plus marqué du côté du BPE dont les livraisons de ces trois derniers mois ont baissé de -1,1% par rapport aux trois mois précédents et de -4,1% par rapport à il y a un an.
Le freinage des rythmes de croissance est plus sensible puisque, sur les onze mois, ce dernier est ramené à +0,9% sur un an, perdant près d'un demi-point en un mois.
Notre indicateur Matériaux s'inscrit dans le même mouvement et le recul de l'activité est confirmé à -0,6% sur un an au troisième trimestre (données CJO). Les résultats ne sont toutefois pas homogènes selon les matériaux, la contraction de l'activité des tuiles et briques se distinguant de la progression plus sensible des produits en béton, notamment à destination des chantiers TP. Pour autant, d'une façon générale, l'activité des ouvriers sur les chantiers du BTP calculée par l'INSEE a enregistré un net recul, le nombre d'heures travaillées ayant baissé de -4% au troisième trimestre 2019 par rapport à la même période de l'an passé. En novembre, le chiffre provisoire de l'indicateur pointe une nouvelle contraction, de -1,2% sur un an, ramenant le cumul sur les onze mois de l'année à +1,4%, soit une croissance désormais inférieure à celle enregistrée en 2018.
Bâtiment : résilience des enquêtes
Après avoir connu une légère inflexion en novembre, l'indicateur synthétique du climat des affaires dans l'industrie du bâtiment calculé par l'INSEE s'est stabilisé en décembre. Si les entrepreneurs sont un peu moins optimistes qu'en novembre sur l'évolution de leur activité des trois derniers mois, ils sont en revanche plus confiants concernant celle des prochains mois. C'est surtout le segment du logement et de l'entretien-amélioration qui fait le plus preuve de résilience, celui du non résidentiel cédant quelques points dans les soldes d'opinion.
Quoiqu'il en soit, les carnets de commandes apparaissent toujours aussi garnis, restant arrimés à 9 mois de stocks de travaux à réaliser pour le cinquième mois consécutif. Il est vrai que les tensions sur l'appareil productif restent fortes dans le bâtiment et environ un quart des entrepreneurs sont encore confrontés à des goulots de production dus au manque de personnel, soit un niveau bien plus élevé que la moyenne de longue période. Dans son dernier communiqué de presse, la Fédération Française du Bâtiment confirmait d'ailleurs que l'activité avait bien tenu en 2019 avec une hausse de +1,2% en volume, comparable à celle de 2018 (+1,3%), le non résidentiel contribuant largement à la progression d'ensemble (+5,1% contre +0,8% dans le logement neuf). La hausse des mises en chantier de locaux, attendue à +6,8% en 2019 par la FFB, devrait se poursuivre plus modérément en 2020 (+2,7%). Quant aux permis, après une progression estimée à +4,8% cette année, ils devraient se stabiliser l'an prochain (-0,4%). Du côté du logement neuf, l'année 2019 devrait se solder par une baisse d'un peu moins de 10 000 mises en chantier (à 408 000 unités environ), entièrement imputable au segment du collectif, l'individuel enregistrant même une très légère hausse portée par la maison individuelle en secteur diffus. Ce repli, qui pourrait se prolonger en 2020 (environ 13 000 mises en chantier en moins, soit -1,7%), serait là encore atténué par la bonne tenue du segment de l'individuel dont les ouvertures de chantier augmenteraient de 5 000 unités. L'embellie dans le segment individuel se confirmerait aussi, avec des permis qui pourraient encore grimper de +2,6% en 2020 (à 204 000 environ) tandis qu'ils continueraient de se contracter dans le collectif (-5,3% à 223 000 environ). Au total, et compte tenu des délais de production, la FFB table sur une croissance de son activité de +0,8% en volume pour 2020, surtout portée par le secteur de l'amélioration-entretien et le non résidentiel (+2,8%), le segment du logement reculant de -1,0%. Des perspectives qui apparaissent cohérentes avec les récentes projections des matériaux, à +0,5% pour le BPE.
TP : atterrissage en vue…
Selon les derniers résultats de l'enquête menée auprès des professionnels des travaux publics, l'activité se montrait encore très dynamique en octobre, en dépit du freinage amorcé dans les rythmes de progression (+8,8% en octobre sur un an). Sur un an et depuis janvier, les travaux réalisés accélèrent de +12,6% en volume et le dernier trimestre devrait rester en territoire positif malgré l'approche des élections. En effet, même si le marché reste porté par les grands projets et les opérateurs privés, une modération de l'activité est attendue après l'échéance des municipales. Le repli des prises de commandes et la baisse des heures intérimaires constatés en octobre en sont sans doute les premiers signaux selon la FNTP. Mais l'activité demeure solide et devrait continuer d'alimenter la demande de granulats, attendue à +1% en 2020.