"On a des morts à la rue et toujours pas de ministre du logement. On est en apesanteur", dénonce l'écologiste Julien Bayou.
"Technique" et "sans vision globale", le texte au programme de l'Assemblée de lundi après-midi à jeudi est malgré tout "bienvenu", juge l'élu parisien, afin de lutter contre des "marchands de sommeil qui s'opposent aux travaux et font régner la terreur dans des copropriétés".
Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, sera au banc du gouvernement. Il était déjà le ministre de tutelle de Patrice Vergriete, qui aimerait être reconduit au logement quand l'équipe gouvernementale sera complétée.
Les deux intéressés et leurs équipes échangent d'ailleurs encore sur ce projet de loi contre "l'habitat dégradé" et les 340 amendements déposés, a appris l'AFP.
Ce texte doit "simplifier les procédures judiciaires et administratives (...) pour accélérer le travail sur les copropriétés dégradées", expliquait Patrice Vergriete en décembre. "Plus on tarde à intervenir sur une copropriété en difficulté, pire c'est à la sortie", soulignait-il.
Entre 400.000 et 420.000 logements du parc privé métropolitain ainsi que 100.000 en Outre-Mer sont aujourd'hui considérés comme potentiellement insalubres ou présentant des risques pour la sécurité de leurs habitants.
Le projet de loi est inspiré d'un rapport remis fin octobre par les maires de Saint-Denis Mathieu Hanotin (PS) et de Mulhouse Michèle Lutz (LR).
Concrètement, il prévoit la création d'une nouvelle procédure d'expropriation des propriétaires de logements frappés par un arrêté de police (arrêté de péril ou d'insalubrité, ndlr), avant que la situation ne devienne irrémédiable et ne nécessite la démolition de l'immeuble.
"Bombe sociale"
Pour mieux outiller les communes contre l'arrivée de marchands de sommeil, il entend simplifier le recours au droit de préemption par les collectivités.
En matière de prévention, le texte veut faciliter les travaux en amont d'une dégradation définitive, en créant par exemple un prêt collectif pour les copropriétés, afin d'accéder au crédit.
Il rend en outre plus effectif le devoir d'alerte des syndics professionnels et introduit une obligation d'information des copropriétaires ou occupants d'un immeuble où un logement est concerné par des procédures de lutte contre l'habitat indigne.
Le projet de loi prévoit enfin des mesures visant à accélérer la construction de logements dans le cadre d'opérations dites "d'intérêt national", dotées d'un régime juridique particulier.
"C'est un projet de loi très technique, qui comporte des mesures allant plutôt dans le bon sens mais qui se limitent aux copropriétés alors que l'habitat indigne concerne aussi l'habitat individuel", estime Manuel Domergue, à la Fondation Abbé Pierre.
"L'enjeu principal face à l'habitat indigne n'est pas vraiment le législatif, mais de donner des moyens opérationnels pour que les collectivités jouent leur rôle", considère-t-il.
Plutôt consensuel, le projet de loi avait été adopté à l'unanimité des présents en commission, en l'absence de LFI et du RN au moment du vote, selon le rapporteur Renaissance Lionel Royer-Perreaut. Globalement, "je n'ai pas senti de postures politiciennes, ni d'éléments bloquants", ajoute-t-il.
Mais alors que sévit une grave crise du logement, les députés vont surtout réclamer de nouveau la "grande loi" promise sur le sujet. Nombre d'élus, jusque dans la majorité, alertent sur la "bombe sociale" en cours.
Avec "l'habitat dégradé", le premier projet de loi "du gouvernement Attal mis en débat est sur le logement. C'est un signal", soutient le député macroniste Royer-Perreaut.
L'Assemblée doit ensuite examiner à partir du 29 janvier une proposition de loi pour réguler les meublés touristiques comme Airbnb face à la pénurie de logements, rappelle-t-il.