- Après 3 années marquées par les crises, les difficultés multifactorielles (remboursement des dettes COVID-19 et PGE, hausse des taux, inflation, augmentation des prix de l’énergie, pénuries, etc.) viennent accentuer les fragilités des chefs d’entreprise, alors même que les assignations Urssaf n’ont pas encore repris.
- Un âge médian de 46,3 ans qui interpelle sur le rebond professionnel des entrepreneurs.
- Les gérants de TPE, avec un chiffre d’affaires inférieur à 500.000€, résistent plus difficilement aux aléas économiques.
Le nombre d’entrepreneurs en situation de « chômage » se rapproche du niveau d’avant crise
Après une année 2021 en retrait, les difficultés s’accélèrent pour les chefs d’entreprise et engendrent une augmentation des pertes d’emploi : 38.670 personnes se sont retrouvées en situation de “chômage” en 2022 (+ 34,1%).
Pour Anthony Streicher, Président de l’association GSC : « Chaque jour, plus de 100 chefs d’entreprise perdent leur emploi. Les chiffres de 2022 nous alertent sur une réalité que nous connaissions déjà. Les entrepreneurs doivent faire face à un contexte économique particulièrement difficile dans lequel les fragilités se multiplient et s’alimentent. Les pénuries de main-d'œuvre, la majoration des coûts énergétiques compliquent les défis auxquels ils devaient faire face. Alors que les tensions sur la trésorerie se font déjà sentir, la reprise des procédures d’assignation de l’Urssaf en 2023 pourrait encore accélérer la remontée des défaillances déjà observée en 2022. »
L’âge médian des entrepreneurs impactés se rapproche de celui d’avant la crise Covid-19 et s’établit à 46,3 ans. La catégorie des « seniors » reste particulièrement exposée. Plus d’un tiers des chefs d’entreprise (36,8%) ont plus de 51 ans. La question du rebond professionnel reste centrale pour cette population mature.
L’augmentation est légèrement inférieure pour les jeunes entrepreneurs de moins de 26 ans: 929 se sont retrouvés en situation de perte d’emploi, soit + 31,6% sur un an.
Pour Anthony Streicher : « Ces signaux, qui laissent présager un retour aux niveaux d’avant crise dès 2023, doivent nous amener à réfléchir collectivement à l’avenir que nous souhaitons proposer à ces femmes et ces hommes. Près de 2 entrepreneurs sur 3 n’ont pas anticipé une éventuelle perte d’emploi (1).. Chacun doit être libre de sécuriser ou non son parcours professionnel mais ayons conscience qu’il s’agit collectivement de la capacité de reprise de la France. »
Une accélération très forte pour les chefs d’entreprise de PME
Les trois quarts (75,2%) des entrepreneurs impactés se trouvaient à la tête d’une structure de moins de 3 salariés. La masse salariale représente un coût important pour ces entreprises auxquelles s’ajoutent les difficultés économiques conjoncturelles (remboursement des PGE, inflation, hausse des taux, facture énergétique, etc.). L’augmentation la plus forte observée vise les entreprises de plus de 50 salariés : 131 étaient concernées en 2021 contre 198 en 2022 (+51,1%).
17.224 gérants de SARL et 14.955 de SAS étaient impactés par la perte de leur activité. Ces hausses, de respectivement 34,9% et 55,5% par rapport à l’an passé, s’expliquent notamment par l’augmentation des créations d’entreprise sous ce dernier statut juridique. Les artisans-commerçants, en première ligne face à la flambée des coûts énergétiques, sont 3.392 à s’être retrouvés au chômage en 2022.
Pour Frédéric Barth, Directeur Général d’Altares : « Crise sanitaire, géopolitique, énergétique, climatique… Les secousses s'enchaînent. Pourtant, l’économie fait encore preuve d’une surprenante résistance, au point que la menace d’une récession un temps redoutée semble s’éloigner. Les indices sont meilleurs qu’attendus en ce début d’année mais les dirigeants d’entreprises vont devoir composer avec des risques encore bien présents. Parmi ceux-là, la défaillance de leurs partenaires commerciaux voire de leur propre entreprise. En effet, tombées à un plus bas de plus de trente ans en 2021, les cessations de paiements s’envolent désormais chez les TPE mais aussi les PME fragilisées par cette “permacrise” qui s’est invitée au fil des mois. 9.300 entreprises sont déjà tombées en faillite en janvier-février 2023, c’est un millier de plus que début 2020 avant que la pandémie ne paralyse l’économie »
Près de 8 entrepreneurs sur 10 (79,8% soit 17 085 femmes et hommes) touchés se trouvaient à la tête d’une société dont le chiffre d’affaires était inférieur à 500.000 euros, confirmant ainsi que les petites structures demeurent les plus vulnérables. À l’inverse, seuls 306 chefs d’entreprise déclaraient un chiffre d’affaires supérieur à 5 millions d’euros.
Les activités du BtoC particulièrement exposées, le bâtiment pas epargné
Malgré des carnets de commandes remplis, les entrepreneurs du bâtiment sont pénalisés par les difficultés d’approvisionnement, les coûts des matières premières et la pénurie de main d’œuvre. Ainsi, 8.607 chefs d’entreprise du secteur se sont retrouvés en situation de chômage.
Le changement de comportement des consommateurs, dans un contexte inflationniste, a un impact particulièrement fort sur les femmes et hommes exerçant dans le commerce, les services aux particuliers ou dans l’hébergement, la restauration et les débits de boisson. Ces trois activités représentent à elles seules 40% des liquidations judiciaires en 2022. Dans le détail, 3.942 restaurateurs ont perdu leur emploi (+ 92,3%), 1.698 commerçants garagistes (+ 29%) et 1.288 artisans de la coiffure, soins de beauté et corporels (+ 78,1%).
Le professionnels du bâtiment exerçant dans le second œuvre du bâtiment ne sont pas épargnés avec 4.553 artisans (+38,6%) qui ont perdu leur emploi.
Une hausse des entrepreneurs en situation de « chômage » qui s’opère dans les territoires
L’Ile-de-France, territoire qui compte le plus grand nombre d’entreprises, représente moins d’un quart des pertes d’emploi (8.366 chefs d’entreprise, + 27,2%), en raison de son dynamisme économique en 2022. Dans une région Sud-Provence Alpes-Côte d’Azur portée par le tourisme, le nombre de chefs d’entreprise en situation de chômage connait une hausse modérée de +28,8% et s’établit à 3.838.
A l’inverse, les Hauts-de-France, accusent une sévère dégradation (+ 73,3%), en particulier dans l’Aisne qui dépasse déjà les chiffres d’avant la crise Covid-19 (317 entrepreneurs en 2022 contre 277 en 2019).
Dans deux régions, la hausse des pertes d’emploi est supérieure à 50% : la Normandie (1.406 ; + 56%) et l’Occitanie (3.266 ; + 53,1%).
4.316 chefs d’entreprise en Auvergne-Rhône-Alpes ont perdu leur emploi en 2022 soit une augmentation de 47,3%.
Méthodologie
Les données sont issues de l’analyse des entreprises, hors sociétés civiles et associations, placées directement, par conversion ou par résolution du plan en liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce ou Judiciaire. Ne sont pas intégrées les procédures de fermeture ou dissolution à l’amiable de même que les révocations des mandataires sociaux.