"Ces chiffres ont un sens mais surtout une utilité", a assuré lundi Bruno Arcadipane, président du conseil d'administration d'Action Logement, en détaillant les premiers résultats de l'histoire de l'ex-1% Logement, créé en 1953 et géré de concert par le patronat et les syndicats.
Ils témoignent de l'importance du statut d'Action Logement, non seulement en tant qu'acteur du logement social - il détient près d'un cinquième des HLM français - mais aussi du logement en général.
Le groupe est assis sur un patrimoine de 83 milliards d'euros - dont 55 milliards pour les seuls actifs immobiliers -, et a dégagé l'an dernier 8,5 milliards de revenus et 1,15 milliard de bénéfice net. A titre de comparaison, le premier groupe immobilier privé français, Nexity, n'a enregistré qu'un chiffre d'affaires de moitié et un bénéfice d'un tiers.
Action Logement, qui a engagé voici quelques années une réforme destinée à le transformer en groupe plus classique, est, de fait, une béquille régulière de la politique publique du logement.
Il a notamment annoncé début 2019 un plan de 9 milliards d'euros afin d'améliorer de diverses manières - rénovation, construction, aide à la mobilité - le logement des salariés. Les premières mesures doivent être mises en oeuvre en septembre.
Quand le gouvernement a réduit en début d'année les économies demandées à l'ensemble du monde HLM, c'est aussi Action Logement qui a été mis à contribution - quelque 300 millions d'euros prévus par an - pour compenser l'essentiel du manque à gagner pour l'Etat.
Emprunts sur les marchés
Avec les chiffres donnés lundi, "il me semble que vous disposez maintenant de (réponses à) la question qui nous est régulièrement posée, d'abord par les gouvernements successifs: (...) la gestion paritaire est-elle efficace?", s'est félicité M. Arcadipane.
L'argument n'est pas innocent dans le contexte: les relations du groupe se sont récemment tendues avec l'Etat, qui fait partie de son conseil d'administration.
Début juin, Action Logement a décidé de remplacer son directeur général, Bruno Arbouet, par Koumaran Pajaniradja, à la tête de la branche immobilière du groupe et venu du cabinet du ministre du Logement, Julien Denormandie.
Mais, dans deux courriers relayés par le Figaro, les administrateurs de l'Etat ont à la fois protesté contre le montant des indemnités de départ de M. Arbouet et les conditions de désignation de M. Pajaniradja. Dans ce contexte, le groupe a finalement annoncé fin juin le maintien de M. Arbouet.
"Nos relations avec l'Etat sont essentielles", a assuré M. Arcadipane. "L'actualité récente a relayé quelques débats internes: (...) nous sommes un partenaire engagé, loyal et respectueux, (...) mais nous attendons en retour de l'Etat le même respect et la même confiance".
Assurant que les relations sont excellentes avec M. Denormandie, le président d'Action Logement a, pour autant, vite appelé à "tirer un trait" sur l'épisode pour se concentrer sur les chiffres du groupe, vite rejoint par M. Arbouet.
"La confiance a été renouvelée, mon mandat se poursuit", a éludé le directeur général. "Nous avons eu un certain nombre de débats internes et de débats avec l'Etat".
Mais "l'important, c'est que nos missions sociales puissent se déployer et que nous puissions mettre en oeuvre les engagements (...) signés avec l'Etat", a-t-il enchaîné.
A ce titre, le groupe se prépare à un changement profond de culture en mettant "fin à l'argent qui dort", selon les termes de M. Arbouet, qui souligne le niveau particulièrement élevé de la trésorerie disponible: huit milliards d'euros.
"Si cette ressource dort, l'Etat sera légitime à dire +Utilisons-la à nos propres fins+", a-t-il admis.
Le groupe va donc, pour la première fois, emprunter sur les marchés, pour mettre en oeuvre son plan d'investissement, et sera donc évalué par les agences de notation. Il compte faire doubler son ratio d'endettement d'ici à 2023.
"Les résultats ne sont pas une fin en soi", a conclu M. Arbouet. "Ils crédibilisent les marges de manoeuvre dont nous disposons".