Ici "c'est notre premier projet en France: ce parc a été créé en 2010 et on l'a acquis en 2015", explique le directeur général adjoint de CGNEE, Liu Yuguang.
Ce site de Charmont-sous-Barbuise, six turbines au milieu d'une centaine d'autres fichées dans cette région rurale, et ventée, l'entreprise l'a racheté avec tout un portefeuille. Aujourd'hui, elle possède 71 sites éoliens en Europe, dont 39 en France, et 2,4 gigawatts de puissance installée.
"Pour l'instant nous avons des actifs à hauteur de 3 milliards d'euros. Nous espérons doubler nos capacités de production d'ici 3 à 5 ans, et passer de 2,4 à 5 GW de capacités", a dit M. Liu à quelques journalistes.
L'entreprise, qui se classe elle-même comme "4e ou 5e opérateur européen" de renouvelables, propose aussi des installations solaires (notamment sur des hangars agricoles, projet qui avait fait sensation en France fin 2015). Mais elle reste "à 90%" concentrée sur l'éolien.
"En Europe, le marché de l'éolien est plus vaste que le solaire", explique M. Liu.
Pour CGNEE, tout a commencé en 2014 par le rachat, à 80%, de parcs anglais à EDF Renouvelables. Une acquisition permise par les liens entre la maison-mère CGN, géant de l'électricité, et le français EDF, partenaires dans le projet de construction d'EPR au Royaume-Uni.
Aujourd'hui "on est en France, en Grande-Bretagne, en Irlande, en Belgique, aux Pays-Bas, en Suède, et on compte aller en Europe du sud, y compris Espagne et Italie, et potentiellement en Europe centrale et de l'est", énumère le responsable.
CGNEE porte un projet photovoltaïque au Sénégal, avec une société italienne, et ne cache pas ses ambitions en Afrique, du nord notamment.
"On aimerait bien se développer, ensemble avec d'autres entreprises françaises, dans des pays tiers. Et pour moi le meilleur marché pour une coopération franco-chinoise dans nos métiers est en Afrique".
Basée à La Défense, CGNEE emploie 119 personnes dont "78% de salariés locaux", notamment quatre techniciens à Troyes (Aube), souligne M. Liu: "pour bien se développer sur un marché étranger, il faut s'implanter, par exemple avec des embauches d'experts locaux".
Sapin de Noël et drapeau chinois
A Charmont, sous un chapiteau chauffé, techniciens français et staff chinois se plient à l'exercice des portes ouvertes, accueillant chaleureusement les visiteurs pour cette 3e "journée du vent" - ce jour-là des classes de CE1 avec parents et enseignants.
Près d'un sapin de Noël, entre un drapeau chinois et un drapeau français, un calicot souligne que les six éoliennes évitent 420.000 tonnes de CO2 sur 20 ans.
"Comme la plupart des grands groupes énergétiques à travers le monde, CGN n'entend pas se contenter de son marché national", analyse Francis Perrin, directeur de recherche à l'IRIS (Paris), interrogé par l'AFP.
"La Chine est un leader dans les énergies renouvelables et cette domination passe à la fois par des ventes d'équipements à l'étranger et des investissements à l'international. CGN est l'un de ses outils, et non le moindre".
Le chercheur souligne "l'attractivité" de l'Europe, tant par ses objectifs climatiques que son soutien aux renouvelables. Et "la guerre commerciale et économique sino-américaine est un élément supplémentaire", ajoute-t-il.
"Technologiquement il n'y a pas de grande différence" entre parcs chinois et parcs européens, répond M. Liu quand on l'interroge sur les grands enseignements de ces 5 ans de présence. Mais "oui bien sûr, on a appris beaucoup de choses, par exemple sur les standards de sûreté ou de protection de l'environnement: on a embauché des ingénieurs français qui nous amènent des compétences".
CGNEE s'est aussi associée avec Eolfi pour conduire un projet pilote d'éoliennes flottantes en Bretagne.
Un choix stratégique, là aussi. "En Europe les ressources terrestres ont des limites", dit M. Liu. Contrairement aux éoliennes offshore posées sur le fond, "les flottantes peuvent être plus éloignées des côtes. Et (à terme, ndlr) leur coût sera moins élevé que l'offshore posé".