Cette professeure retraitée de 65 ans et son époux Francisco Vigil, 61 ans, font partie d'un groupe d'une trentaine de retraités qui ont fait construire ensemble six maisons à Malinalco, village de caractère à 100 km au sud-ouest de la capitale.
Sur un terrain entouré de forêts et de montagnes, six personnes vivent déjà à plein temps à La Guancha (le nom du projet), tandis que les autres vont et viennent, dans l'attente de se fixer à Malinalco pour le restant de leurs jours.
"Dans ma vie professionnelle, j'ai donné et je me suis livré parce que je recevais un salaire", explique M. Vigil au sujet de l'esprit du cohabitat, modèle collaboratif d'habitations qui vient du Danemark.
"Maintenant c'est différent car il s'agit de collaborarer", poursuit l'ex-salarié de l'industrie automobile. "J'ai appris que donner est bien plus satisfaisant de ce que j'aurais pu imaginer".
Face à un grand jardin et une piscine qui agrémentent les parties communes, le couple explique vouloir vieillir dans de meilleures conditions que leurs propres parents. Et vouloir que leurs enfants volent de leurs propres ailes.
Les personnes âgées "ne reçoivent jamais l'attention dont ils ont besoin, elles sont très seules", affirme Mme Martinez, dont le père est mort à 91 ans en passant par un asile.
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La Guancha est née en 2009 sous la forme d'un projet universitaire porté par la docteure en sciences sociales Margarita Maass sur l'amélioration des conditions de vie des seniors.
"Dans les dernières décennies, le Mexique a connu une transformation démographique avec la baisse de la fécondité et de la natalité, et la hausse de l'espérance de vie", écrit l'universitaire dans un article. "Cela a provoqué l'augmentation du nombre de personnes adultes âgées".
Proportionnellement, le Mexique reste moins touché par le vieillissement que l'Union européenne (UE), où plus de 20% de la population dépassent les 65 ans, tout comme au Québec.
Un "vieillissement modérément avancé" est cependant à l'oeuvre dans ce pays de près de 130 millions d'habitants, selon l'expression du gouvernement.
La proportion des plus de 60 ans est passée de 12,3% à 14,7% entre 2018 et 2023, d'après l'Institut nationale de statistiques (INEGI). Le taux de fécondité est passé de 2,07 à 1,6 enfant par femme en moyenne.
Avec plusieurs partenaires, Mme Maass a acheté un terrain où quelques années plus tard, les propriétaires ont construit en installant des panneaux solaires pour chauffer l'eau.
Ils ont égamement planté des arbres fruitiers (mangues, oranges, goyaves...). "La nature est quelque chose qui me remplit l'âme", affirme Tesha Martinez.
Pour la collectivité, Francisco Vigil a conçu un système informatique pour établir la liste des courses en fonction des menus collectifs.
"Le cohabitat est une très bonne solution pour les personnes qui se retrouvent seules", détaille Mme Maass. "Pour les personnes qui n'ont pas beaucoup d'argent, parce qu'il s'agit de partager les frais, et pour les personnes qui ont des problèmes de maladie, parce qu'en étant ensemble elles se partagent le médecin".
Ce modèle se distingue de la structure des maisons de retraite parce que le groupe "décide comment il veut sa maison, où il la veut, de quelle taille, avec quelles personnes, et avec quelles ressources économiques", détaille-t-elle.
"Nouvelle vie"
Margarita Maas prend l'exemple d'un pensionnaire mort de la maladie d'Alzheimer, pour qui l'expérience de La Guancha fut bénéfique, car il pouvait partager son temps entre les dominos, le cinéma et la natation.
Tesha Martínez s'est intégrée à la vie de Malinalco, où plus de la moitié de la population est pauvre. Elle a profité de son expérience de professeur pour enseigner l'anglais et participer à des cours de céramique. "Une nouvelle vie", assure-t-elle.