Selon la ministre du Travail Élisabeth Borne, les entreprises se saisissent désormais "massivement" de ce "bouclier anti-licenciement" avec "4.300 accords couvrant plus de 300.000 salariés", dont 80% dans des PME de moins de 50 salariés.
Le motoriste Safran a été dans les premiers à négocier un tel accord qui couvre 6.000 salariés sur 44.000 en France. Pour eux, la réduction d'activité est en moyenne de 20%, donc un jour par semaine, indique-t-on chez Safran. "C'est plutôt bien perçu. Quand on regarde ce qui peut se passer ailleurs, on est quand même contents de voir qu'on peut sauvegarder l'emploi", même si "on fait effectivement des sacrifices", dit-on. L'APLD autorise une réduction du temps de travail jusqu'à 40% d'heures chômées sous condition d'un accord d'entreprise ou de branche, de six à 24 mois, validé par l'administration et comprenant des engagements sur l'emploi et la formation.
L'État rembourse à l'entreprise l'indemnité versée au salarié, à hauteur de 85% ou 100% suivant les secteurs. Le salarié perçoit 70% de sa rémunération brute (84% nette) sur les heures chômées. L'entreprise peut aller plus loin, comme Valeo qui a porté l'indemnisation à 80% du brut ou Bosch à 75%.
Les entreprises mettent en avant la "visibilité" à moyen terme apportée par ces accords, après le chômage partiel classique utilisé par certaines "en urgence" face au Covid-19 et dont les règles fluctuent. En terme de formation, l'accord chez Safran prévoit seulement que le salarié peut se former avec l'accord de son manager, l'entreprise envisageant sur ce volet un nouvel accord "d'ici la fin de l'année".
"Bémol" sur la formation
Fin octobre, le ministère du Travail a d'ailleurs fait état d'un "bémol" sur la formation alors que la logique du dispositif est d'y consacrer le temps chômé. "C'est pauvre sur la formation. Les accords visent davantage à se donner du temps sur l'emploi plutôt qu'à préparer le futur", déplore Jean-François Foucard, en charge de la formation à la CFE-CGC.
Chez Xelians (archivage), qui vient de signer un accord pour sa principale filiale, le président Jacques Thibon explique à l'AFP que l'entreprise a pris des "engagements d'accroissement des efforts de formation". Mais il ajoute qu'"en terme de formations réelles, ça dépendra des demandes des salariés".
L'accord, qui couvre environ 85% des quelque 500 salariés, prévoit "une réduction du temps de travail de 20%". Il est organisé sous la forme d'une semaine de travail ramenée à 4 jours, un dispositif "assez simple" et "plutôt bien vu" par les salariés dont la rémunération nette n'est réduite que de "3 à 4%".
Pour Michel Beaugas, secrétaire à l'emploi à FO, les syndicats soutiennent l'APLD car "les salaires sont à peu près préservés" et cela "vaut mieux que des licenciements avec une prime one-shot". Mais, nuance-t-il, le succès auprès des employeurs s'explique aussi parce que "les engagements ne sont pas vraiment contraignants".
De fait, un accord APLD n'interdit pas de négocier parallèlement un PSE et l'employeur n'est pas tenu de rembourser les aides si "les perspectives d'activité se sont dégradées" dans l'intervalle.
Plusieurs grosses entreprises (Airbus, Air France...), confrontées à des situations différentes suivant leurs sites ou leurs métiers, ont d'ailleurs mixé l'APLD avec d'autres dispositifs. Aéroports de Paris la négocie, en même temps que des ruptures conventionnelles collectives (RCC) et un accord de performance collective (APC).
Pour l'instant, seules six branches dont la métallurgie ont conclu un accord. Une trentaine d'autres sont en discussion, mais certaines n'avancent guère dans la restauration ou la coiffure. Ces accords de branche permettent aux employeurs, notamment des PME, de rédiger si besoin un document unilatéral. Ces derniers représentent déjà 44% des 4.300 accords.
Pour 2021, la budgétisation de l'activité partielle (courte ou longue) est de 6,6 milliards d'euros, de quoi financer 450.000 salariés en APLD, une enveloppe indicative que le ministère espérait en septembre ne pas atteindre. Mais c'était avant le reconfinement.