La ministre Elisabeth Borne avait promis la publication d'une telle liste après l'effondrement du viaduc autoroutier italien, qui a fait 43 morts le 14 août.
La liste publiée sur le site internet de son ministère ne concerne pour l'instant que 164 ouvrages importants, 42 directement entretenus par l'Etat et 122 autres confiés aux sociétés autoroutières, sur les quelque 24.000 ponts que compte le réseau national.
L'idée est d'allonger petit à petit le listing, qui classe l'état des ouvrages en cinq catégories du 1 très satisfaisant aux 3 et 3U nettement plus préoccupants.
"Cette classification de l'état des ponts est un outil pour indiquer le niveau des réparations nécessaires et leur degré d'urgence. Elle ne traduit pas de risque de sécurité", souligne-t-on au ministère.
"Le réseau est sûr en France", y insiste-t-on. "Il est vraiment sous surveillance renforcée !"
En cas de problème, les autorités n'hésiteront pas à limiter la vitesse ou le poids des véhicules autorisés, voire à fermer préventivement l'ouvrage.
Dans la liste publiée jeudi, un seul ouvrage est classé en catégorie 1, "en bon état apparent". S'ajoutent le viaduc de Millau (sur l'autoroute A75, Aveyron) et le tandem constitué du pont de Normandie et du viaduc sur le grand canal du Havre (N1029, entre Seine-Maritime et Calvados), eux aussi en très bon état même s'ils sont bizarrement placés hors catégorie.
La plupart des ponts tombent dans la catégorie 2, avec des "défauts mineurs", ou 2E, sous-catégorie de la précédente "dont les risques d'évolution des désordres peuvent à court terme affecter la structure".
La catégorie 3, celle des "ouvrages dont la structure est altérée et nécessite des travaux de réparation, sans caractère d'urgence", comprend 21 ponts.
Caronte, Echinghen et Gennevilliers
Enfin, la catégorie 3U comprend deux "ouvrages dont la structure est gravement altérée et nécessite une intervention urgente": le viaduc d'Echinghen près de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) sur l'A16 et celui de Caronte sur l'A55 à Martigues (Bouches-du-Rhône).
Les deux ouvrages sont en travaux, et le second est virtuellement déjà sorti de l'infamante catégorie 3U mais il faudra une nouvelle inspection pour confirmer cette amélioration, selon le ministère des Transports.
Quant au viaduc de Gennevilliers sur l'A15 (entre les Hauts-de-Seine et le Val-d'Oise), dont un mur de soutènement s'est affaissé en mai, il est classé en 2E.
De fait, la classification des ouvrages est parfois un peu datée, puisque les visites d'évaluation ont lieu tous les trois ans en moyenne. Elles s'intercalent entre des contrôles annuels et des inspections détaillées tous les six ans (les actions de surveillance étant plus fréquentes en cas de problème).
"On a des ponts qui ne sont pas tous tout neufs", a sobrement commenté Elisabeth Borne, mercredi matin sur CNews. "Je n'ai pas attendu la catastrophe de Gênes pour agir sur l'entretien, la remise en état du réseau national".
Un audit indépendant du réseau non concédé qu'elle a commandé l'an dernier en arrivant aux affaires montre en effet qu'il faut refaire plus de la moitié des chaussées et qu'un tiers des ponts doivent être réparés, même s'il ne s'agit souvent que de petites réparations destinées à prévenir l'apparition de plus gros problèmes.
Dans 7% des cas, les dommages ont été jugés plus sérieux, présentant un risque d'effondrement à terme si rien n'est fait.
L'audit préconisait d'augmenter le budget consacré à l'entretien du réseau à environ 1 milliard d'euros par an. Le gouvernement entend le faire passer à 930 millions d'ici 2023.
Quant aux très nombreux ponts entretenus par les collectivités, Mme Borne a dit être en contact avec elles "pour voir si elles ont bien toutes les ressources pour faire les diagnostics sur ces ouvrages". "Et puis on aura à réfléchir avec elles sur les moyens de remettre en état, le cas échéant, ces ponts", a-t-elle promis.