"L'Europe est confrontée à une crise du logement", a déclaré Mme von der Leyen jeudi devant les eurodéputés à Strasbourg. "Les gens ont du mal à trouver un logement abordable. C'est pourquoi, pour la première fois, je nommerai un commissaire directement responsable de la question du logement".
L'élue conservatrice allemande, qui accédait là à une demande de groupes de gauche, en particulier des socialistes, a également annoncé un plan européen pour le logement abordable, pour "débloquer les investissements publics et privés nécessaires".
De quoi répondre à des difficultés grandissantes sur ce front dans plusieurs Etats membres de l'UE.
"Importance de la crise"
"Peut-être qu'elle a pris conscience, lors de son dernier mandat, de l'importance de la crise du logement qui traverse l'Europe", veut croire Sarah Coupechoux, chargée des affaires européennes à la Fondation Abbé Pierre.
La Commission avait déjà soutenu la création, en 2021, d'une plateforme européenne de lutte contre le sans-abrisme, visant à harmoniser le recensement des personnes sans domicile et à élaborer des stratégies pour réduire leur nombre.
Dans l'Eurobaromètre du printemps 2024, le logement est cité comme le premier problème national dans trois Etats membres (Irlande, Luxembourg, Pays-Bas) ; et parmi les trois premiers dans deux autres (Portugal, Allemagne).
Entre 2015 et 2022, le prix des logements dans l'Union a grimpé de 47% et celui des loyers de 18%, face à une inflation cumulée de 28%. Et en 2022, le logement représentait en moyenne 19,6% des dépenses des ménages européens selon l'organisme Eurostat.
La crise énergétique déclenchée par la guerre en Ukraine a encore aggravé la situation, en mettant sous pression les budgets, notamment des ménages les plus pauvres.
Elle a également, dénoncent les fédérations patronales, renchéri les coûts de construction de nouveaux logements, provoquant un ralentissement de la production neuve.
Que pourra alors faire le ou la commissaire en charge du logement ?
"Il n'y a pas, dans les traités, de mention du logement, de même qu'il n'y a pas de directive européenne spécifiquement sur la question du logement", détaille Julien Dijol, directeur des politiques publiques de Housing Europe, fédération européenne de l'habitat public, social et coopératif.
Renverser la "dynamique"
"En revanche, il y a beaucoup de directives qui ont un impact direct ou indirect sur le logement", comme celle fixant des objectifs de rénovation énergétique.
La Commission pourrait aussi investir, via la Banque européenne d'investissement, dans la production de logements neufs, dit-il.
"Il y a eu une chute importante des investissements publics dans la production de logement il y a quelques années. La nomination d'un commissaire au logement, c'est aussi, peut-être, impulser auprès des Etats un renversement de la dynamique sur la production de logements", détaille Sarah Coupechoux.
La politique de cohésion, qui finance des projets pour les régions les moins développées ainsi que des projets sociaux et de transition industrielle, "peut aussi s'adresser en priorité à des projets pour les personnes les plus dans le besoin, notamment aux sans-domicile", espère-t-elle.
A partir de septembre, les négociations autour du respect des critères budgétaires du Pacte de stabilité pourraient aussi être l'occasion de soutenir la production de logements, espère Julien Dijol, la Commission pouvant choisir de se montrer plus flexible dans les trajectoires budgétaires pour les Etats qui investiraient dans le logement.