Le patronat s'est montré satisfait jeudi 28 mars de l'engagement du Premier ministre Gabriel Attal de ne pas augmenter les impôts sur les entreprises, tout en soulignant que c'est aux partenaires sociaux d'élaborer les contours d'une future réforme de l'assurance-chômage.
Le président du Medef a "bien entendu" la "ligne rouge" de M. Attal, mercredi soir sur TF1, de ne pas augmenter les impôts sur les entreprises, "parmi les plus taxées au monde et qui créent les emplois", a souligné Patrick Martin dans un communiqué.
"C'est aussi notre ligne rouge et nous serons vigilants à ce qu'elle ne soit pas franchie", a-t-il insisté.
M. Martin, à la tête de la première organisation représentative du patronat, a souligné que "les partenaires sociaux s'empareront, le moment venu, d'un projet de nouvelle réforme de l'assurance-chômage", ainsi que l'a souhaité le Premier ministre.
"Cette réforme est envisageable", a-t-il concédé, sans réagir directement aux mesures que semble souhaiter M. Attal, "mais l'objectif de plein emploi que nous partageons" sera d'abord atteint "si l'activité économique retrouve un niveau satisfaisant".
La CPME, deuxième organisation patronale, a également jugé "positive" la volonté de ne pas augmenter les impôts, et espéré que serait tenu l'engagement de supprimer complètement l'impôt de production CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, NDLR) d'ici la fin du quinquennat.
"Lorsque la France compte plus de trois millions de demandeurs d'emploi indemnisés et que, dans le même temps, les chefs d'entreprise ont le plus grand mal à recruter, il est indispensable d'agir pour favoriser le retour à l'emploi", poursuit la CPME.
Mais elle souligne également que c'est aux partenaires sociaux de "prendre les mesures qui s'imposent". Même si, a concédé sur Sud Radio son président François Asselin, "quand bien même nous arrivons à signer un accord, l'Etat reprendra la main pour mettre en place les curseurs qu'il a en tête".
La CPME est "favorable à ce que l'on revienne sur la durée minimale d'affiliation pour bénéficier de l'indemnisation" - actuellement six mois de travail au cours des deux dernières années - mais "ne souhaite pas diminuer le montant" de celle-ci.
M. Asselin s'est en revanche dit favorable à l'abaissement envisagé, de 18 à douze mois, de la durée d'indemnisation, car après une perte d'emploi, "il faut raccrocher le plus rapidement possible au marché du travail", selon lui.
M. Asselin a critiqué l'idée de M. Attal d'instaurer la semaine de travail en quatre jours. "Je veux rester le garant de l'organisation de mon entreprise", a-t-il dit.
La CPME déplore que M. Attal n'ait pas évoqué la dette publique ou "la réforme de l'action publique" et des effectifs de fonctionnaires, mercredi. "Ne se préoccuper que des seules dépenses des régimes sociaux ne suffira pas" à rétablir les finances publiques, estime-t-elle.
Marc Sanchez enfin, secrétaire général du SDI (Syndicat des indépendants et des TPE), qui représente 25.000 très petites entreprises, a estimé aussi que ces petits patrons étaient "soulagés" par la confirmation qu'il n'y aurait pas de hausse d'impôts.
"Pour autant, combler les déficits par le plein emploi relève de la méthode Coué déjà à l'oeuvre depuis plusieurs mois", a-t-il relevé dans un communiqué.
Selon lui, les TPE "sont loin d'être en capacité de recruter en masse dans un contexte économique dégradé sans changement drastique du poids des charges qui pèsent sur les salaires".
Pour le SDI, il faut une "remise à plat d'un système structurellement défaillant", solution "qui nécessite du courage politique", selon lui.
Une réforme "pour ramener les gens vers l'emploi", dit Vautrin
La ministre du Travail Catherine Vautrin a assuré jeudi sur franceinfo que la réforme de l'assurance chômage annoncée mercredi par le Premier ministre Gabriel Attal visait à "ramener les gens vers l'emploi" avec un effort d'accompagnement et de formation.
"Le Premier ministre a ouvert des pistes parce que notre priorité, c'est le dialogue social", a affirmé la ministre qui a assuré que "nous faisons cette réforme pour ramener les gens vers l'emploi".
Il faut pour cela "essayer d'accompagner au plus vite" car "plus vous restez longtemps au chômage, moins vous avez de chances de retrouver un boulot", a-t-elle fait valoir.
Interrogée sur l'excédent de l'assurance chômage, Mme Vautrin a assuré que "la trajectoire est à 11 milliards en 2027" et rappelé que ce régime "permet de financer la formation". "C'est un investissement social que d'accompagner celles et ceux qui sont dans une situation de chômage parce que c'est leur permettre de rebondir", a-t-elle ajouté.
Revenant sur les "pistes" évoquées par Gabriel Attal, qui a souhaité une nouvelle réforme "globale" de l'assurance chômage d'ici l'automne, Mme Vautrin a expliqué que "ce sur quoi on peut travailler, c'est, d'une part, les conditions d'affiliation".
"Combien de temps faut-il travailler sur une période donnée pour bénéficier du chômage?" Aujourd'hui "en deux ans, il faut avoir travaillé six mois. Ça se discute", a-t-elle lancé.
Un autre sujet serait "la durée d'indemnisation", aujourd'hui de 18 mois en règle générale, a-t-elle assuré, en rappelant que le Premier ministre ne privilégiait pas la piste du montant de l'indemnisation.
Les annonces du chef du gouvernement constituent "une position de négociation", a-t-elle martelé.
La réforme de l'assurance chômage jugée "inacceptable" pour la CGT
La CGT a qualifié d'"inacceptable" l'annonce mercredi 27 mars au soir par le Premier ministre Gabriel Attal d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage, tandis que la CFDT a estimé que ce régime ne pouvait pas être une "variable d'ajustement budgétaire".
"C'est inacceptable dans la méthode et dans le fond, la seule chose annoncée par Gabriel Attal ce soir, c'est encore taper sur les précaires ou les chômeurs", a déclaré à l'AFP Denis Gravouil négociateur pour la CGT dans les négociations sur l'assurance chômage.
"Il y avait déjà eu des baisses de droits pour les seniors dans la dernière réforme chômage et il faudrait encore y rajouter des baisses de droits pour les précaires, des dégressivités, des durées d'indemnisations plus courtes pour tout le monde", a-t-il dénoncé.
La numéro un de la CFDT Marylise Léon prévient pour sa part: "Attention, le régime d'assurance chômage ne peut pas être une variable d'ajustement budgétaire de l'Etat !".
"Une nouvelle réforme est annoncée, cela ne nous empêchera pas de terminer la négociation en cours et de respecter nos engagements, la CFDT continuera de pousser des revendications pour que les efforts soient équitablement répartis", a ajouté la leader du premier syndicat français dans un message transmis à la presse.
François Hommeril, président de la CFE-CGC, considère que l'annonce de Gabriel Attal est "la caractérisation de ce qu'est un discours populiste, c'est-à-dire méconnaître les faits, braver la réalité sans aucun état d'âme".
"Je suis médusé par le ton, par le cynisme absolu de ce discours qui méconnaît ce que c'est la situation d'un chômeur: on va lui imposer des mesures de rétorsion comme s'il était responsable en partie ou en totalité de sa situation. C'est faux", s'est-il alarmé auprès de l'AFP.
Le leader de la CFTC, Cyril Chabanier, s'est lui dit "très inquiet". "Rendre plus difficile l'accès au chômage ou baisser l'indemnisation, c'est quelque chose qui ne fonctionne pas, ça n'a jamais fonctionné".
Michel Beaugas (FO) a de son côté dénoncé "une belle fable" du Premier ministre "selon laquelle c'est l'assurance chômage qui empêche les employeurs d'embaucher".
Gabriel Attal a annoncé sur TF1 avoir demandé à la "ministre du Travail de préparer de nouvelles négociations" en vue "d'une vraie réforme, plus globale de l'assurance chômage" cette année, évoquant plusieurs pistes possibles comme réduire la durée d'indemnisation "de plusieurs mois".
Le chef du gouvernement a également évoqué les deux autres "pistes" pour réformer l'assurance chômage: à savoir toucher au temps minimal qu'il faut avoir travaillé pour bénéficier du chômage - aujourd'hui six mois lors des deux dernières années - et le "niveau d'indemnisation du chômage".