Ainsi, en s’appuyant sur des séries de données trimestrielles couvrant la période de 1996 à 2022 soit près de 30 années d’évolution, Wüest Partner a élaboré un nouveau modèle d’analyse qui compare pour la première fois en France la valeur fondamentale des logements, déterminée à partir des critères économiques, à leur valeur de marché, issue de facteurs davantage exogènes à l’économie comme les effets spéculatifs transitoires, par exemple. Sur la base de ces données empiriques, Wüest Partner a objectivé la valeur de l’immobilier en la rationalisant par rapport au développement économique pour mieux en estimer son évolution.
Résultat : pour l’année 2023, les prix pourraient baisser de 0.5% pour les appartements et augmenter de 1.9% pour les maisons si on considère les projections macroéconomiques actuelles. Des taux de nature à rassurer le marché sur un possible phénomène de bulle immobilière spéculative !
Valeur fondamentale et valeur de marché : retour sur 26 ans d’évolution
Que recouvre le prix d’un bien immobilier ? Est-il justement évalué ou faut-il s’en tenir au fait qu’il est, avant toute chose, le résultat d’une transaction consentie ? L’étude réalisée par Wüest Partner apporte un éclairage sur l’évolution des prix du marché immobilier, à l’aide d’un nouveau modèle d’analyse. Dans ce dernier, il y a lieu de distinguer tout d’abord la valeur fondamentale du bien immobilier de sa valeur de marché.
La valeur fondamentale est déterminée sur la base de 5 variables économiques : la population, le revenu des ménages, le taux des crédits immobiliers, l’inflation et les logements vacants. En effet, la croissance démographique a une influence sur la demande de biens immobiliers et sur les prix, au même titre que l’indice des prix à la consommation, car les loyers et les prix immobiliers ont tendance à se renchérir en période d’inflation. Le niveau de revenu des ménages (revenus nets d’activité et de propriété + prestations sociales, cotisations et impôts) détermine quand à lui en partie le niveau de la demande. Les taux d’intérêt des prêts immobiliers ont eux un impact direct sur le coût d’un projet d’acquisition et donc sur la demande Il en est de même de la disponibilité des logements vacants avec ses conséquences sur les prix.
La valeur de marché correspond au prix d’acquisition obtenu au cours d’un processus d’échange entre un acheteur et un vendeur potentiels. Elle dépend des fondamentaux économiques, mais également de facteurs exogènes à l’économie plus ou moins objectifs comme les effets spéculatifs transitoires, les conditions locales ou encore les situations de crise (la crise sanitaire est un bon exemple). Le modèle de Wüest Partner utilise l’indice Notaires-Insee qui mesure l’évolution des prix nets vendeur, différenciés pour les maisons et les appartements.
Cette étude montre comment la valeur fondamentale permet d’estimer la sur ou la sous-évaluation des prix ou, encore, analyser l’impact d’un critère économique sur l’évolution des prix. Un travail d’analyse qui s’appuie sur des séries de données trimestrielles couvrant les années 1996 à 2022, période ayant connu des fluctuations de prix importantes (hausses des années 2000, crise financière 2008-2010 et crise sanitaire 2020-2021).
Pour Bérengère Oster, Directrice Générale de Wüest Partner France : « On le voit à travers l’analyse empirique que nous avons menée, les prix des logements ont plus que triplé depuis 1996, affichant une hausse de 238% pour les maisons et 214% pour les appartements. Ces évolutions interrogent : la flambée des prix est-elle justifiée par l’évolution générale de l’économie durant cette période, ou les prix de l’immobilier sont-ils surestimés ? Et quels développements sont possibles ces prochaines années dans différents scénarios économiques ? C’est à ces questions que notre modèle tente de répondre. Dans le contexte actuel de forte remontée des taux que nous traversons, il est intéressant de pouvoir porter un regard « objectif » sur l’évolution possible des prix du logement à l’aide d’un modèle basé justement sur des fondamentaux économiques. »
Lorsque les deux valeurs (fondamentale et de marché) sont proches, cela peut traduire le fait que les prix de l’immobilier sont rationnels et ancrés dans l’économie du pays. De larges différences peuvent en revanche être le signe de spéculation ou d’attentes irrationnelles des acteurs du marché.
Sur la période 1996-2022 ainsi explorée, valeur du marché et valeur fondamentale évoluent étroitement ensemble : la valeur fondamentale explique en effet environ 75% des variations des valeurs du marché. Une surévaluation des prix du marché par rapport à la valeur fondamentale s’est toutefois observée dans les années 2005 à 2007 puis de nouveau entre 2010 et 2012 et a effectivement donné lieu à des corrections de valeurs ultérieurement.
En 2022, valeur de marché et valeur fondamentale affichaient moins d’1% d’écart. Un signal positif pour les marchés immobiliers français, qui restent fortement ancrés à l’économie du pays malgré le changement de contexte des taux d’intérêt en 2022.
Vers une stabilisation des prix en 2023
L’analyse empirique des données présentées plus haut permet ensuite d’estimer la sur-ou sous-évaluation des prix immobiliers par rapport à leur valeur fondamentale, de prévoir l’évolution des prix sous différents scénarios, ou d’analyser l’impact du contexte de taux d’intérêt faibles des dernières années sur la croissance des prix à venir.
Pour 2023, Wüest Partner s’est appuyée sur les projections macroéconomiques de divers instituts (Banque de France, Insee) présentées ci-dessous :
Wüest Partner a pu estimer l’évolution de la valeur fondamentale pour l’année 2023 en France. Elle serait de -0,5% pour les appartements et +1,9% pour les maisons. Les conditions économiques actuelles ne devraient donc pas donner lieu à de fortes turbulences sur les marchés immobiliers, et les prix pourraient rester stables. La baisse de prix des appartements serait en revanche un peu plus marquée à Paris, avec -2,1%.
L’avantage de ce modèle tient également au fait qu’il permet de réaliser des projections à cinq ans de l’évolution future des prix immobiliers sur la base de différents scénarios. Wüest Partner a analysé les cinq scénarios suivants :
- Récession : récession économique en France avec, chaque année, un recul de 1% du revenu disponible,
- Stagflation : inflation supérieure à la moyenne, sans croissance économique et avec augmentation des taux d’intérêt afin de limiter l’inflation (conséquences : hausse du taux de crédit immobilier, croissance démographique affaiblie, augmentation du nombre de logements vacants),
- Prix stables : maintien des prix des maisons et appartements avec une faible variation,
- Prévisions : prévisions de Wüest Partner quant au développement économique en France de 2023 à 2027,
- Croissance : croissance économique soutenue, croissance démographique dynamisée, stagnation du nombre de logements vacants, inflation et taux de crédit immobilier à des niveaux inférieurs à ceux de 2022.
D’autres résultats produits par cette étude sont aussi très intéressants. Ils s’expriment par exemple sous forme de questions auxquelles le modèle peut répondre :
« Que ce serait-il passé, de 2005 à 2021, si les taux d’intérêt étaient restés à un niveau élévé » ou encore « Que ce serait-il passé si la croissance démographique avait été plus faible depuis 2005 ? ».
Basé sur des données précises et solides, qui ne couvrent pour l’instant que le niveau national, le modèle peut être étendu afin de prendre en compte les disparités entre les zones rurales et les grandes villes. En attendant une version encore plus puissante, le modèle développé par Wüest Partner est novateur et la notion de valeur fondamentale est éclairante pour les professionnels de l’immobilier.
Ce nouveau modèle d’analyse fait l’objet d’un chapitre dédié dans l’Immo-monitoring 2023 de Wuest Partner.