Le texte, concluant une commission d'enquête qui en six mois a entendu 174 personnes, a été présenté mercredi par son rapporteur, Guillaume Gontard (EELV).
Les parlementaires font 23 propositions pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments, qui avec leur usage représentent 48% de la consommation d'énergie de la France et 28% de ses émissions de gaz à effet de serre.
Le pays est très loin du rythme de rénovations qui permettrait d'atteindre l'objectif de sa Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), notent les sénateurs, puisque 50 à 100.000 rénovations sont menées à bien chaque année contre un objectif de 370.000 avant 2030 et 700.000 au-delà.
Le but est d'atteindre, d'ici 2050, la norme Bâtiment bas-carbone (BBC) pour l'ensemble du parc, soit à peu près l'équivalent d'étiquettes énergétiques A et B, lesquelles représentent actuellement quelque 5% du bâti.
"Consensus politique"
Constatant un "consensus politique" sur cette question, les parlementaires préconisent d'augmenter nettement les dépenses de l'Etat dans la rénovation, sans donner de chiffrage global.
Des propositions qui tranchent avec les intentions affichées du gouvernement de faire des économies en matière de logement, un mois après des annonces dans le cadre du Conseil national de la refondation qui ont unanimement déçu.
"Bien évidemment, ça a un coût si on veut véritablement atteindre des objectifs", a justifié la présidente de la commission, Dominique Estrosi-Sassone (LR), soulignant que ces dépenses pouvaient créer des emplois, et que quelques mesures, notamment de lutte contre la fraude, pouvaient aussi rapporter.
La prochaine loi de finances, et la loi de programmation pluriannuelle de l'énergie, seront l'occasion d'intégrer certaines dispositions, a dit Dominique Estrosi-Sassone, les sénateurs n'excluant pas non plus de pousser des propositions de loi.
"Nous allons regarder en détails les propositions pour alimenter les travaux en cours (...) en vue notamment des débats PLF (projet de loi de finances, NDLR) et du projet de loi de programmation énergie climat", a communiqué à l'AFP le ministère délégué à la Ville et au logement, assurant partager les orientations mises en avant par la chambre haute.
Moyens et stabilité
Sur le fond, les sénateurs demandent en particulier de porter à 4,6 milliards les moyens de MaPrimeRénov', clé de voûte de l'aide à la rénovation, contre 2,5 milliards engagés pour 2023. Ils souhaitent aussi muscler les prêts (éco-PTZ, prêt avance rénovation), notamment pour les ménages modestes.
Pour mieux rénover les logements sociaux, ils réclament 1,5 milliard d'euros supplémentaires pour les bailleurs, une revendication récurrente des bailleurs sociaux qui fustigent les économies budgétaires auxquelles ils ont été soumis sous la présidence d'Emmanuel Macron.
Ils mettent cependant en garde contre les changements constants dans ces dispositifs. "Parfois, c'est plusieurs changements par mois!", a justifié Guillaume Gontard, jugeant que cette instabilité "amène de l'attentisme et de la confusion".
Le rapport préconise également de réformer à nouveau le diagnostic de performance énergétique (DPE), obligatoire pour louer ou vendre un logement et dont le mode de calcul, réformé à la hâte en 2021, fait toujours l'objet de critiques.
Les sénateurs proposent d'en "corriger les biais en défaveur des petites surfaces", d'intégrer dans son calcul la protection contre la chaleur, et d'établir un DPE spécial pour les bâtiments construits avant 1948, au nom de leur valeur patrimoniale.
Ils entendent aussi s'attaquer à un sujet sensible: les copropriétés, point de blocage majeur dans la rénovation du fait de la difficulté d'y prendre des décisions.
Les sénateurs proposent d'abaisser les seuils pour engager des travaux ou contracter des prêts, et de prendre en compte le DPE collectif -pour l'ensemble de l'immeuble-, plutôt que celui de chaque appartement individuellement, pour appliquer les règles d'interdiction progressive de louer.
Plus largement, ils souhaitent soutenir les filières industrielles liées à la construction écologique, comme les matériaux biosourcés ou les équipements de chauffage et refroidissement, ou davantage former les professionnels du bâtiment aux enjeux de la rénovation.
Image d'illustration de l'article via Depositphotos.com.