"Nous avons pris une circulaire adressée à tous les acteurs de l'État pour leur demander de ne pas appliquer des pénalités de retard en cas de retard de livraison sur les marchés publics" liés à des pénuries de matières premières, a déclaré M. Le Maire à l'issue d'une réunion avec l'ensemble des organisations patronales et des fédérations professionnelles de la construction et des matériaux.
Il a souhaité que les collectivités locales fassent de même, regrettant "l'effet de ciseaux" dans lequel sont prises les entreprises du secteur, moteur de la reprise économique.
Elle sont confrontées à la fois à l'abaissement de la production des matériaux pendant la période de la pandémie et à une reprise de la construction "plus rapide que prévue".
"Pour une tonne d'acier, les prix sont passés de 500 euros à 1.500 euros" a-t-il expliqué.
Le gel des pénalités de retard qui est dû à un "cas de force majeure", concerne toutes les entreprises de la construction, mais surtout les TPE et PME, a lancé le ministre, répondant ainsi à la Confédération des PME (CEPME) qui lui avait demandé cette mesure "à minima jusqu'à fin 2021".
En revanche, M. Le Maire n'a pas souhaité maintenir les mesures d'indemnisation du chômage partiel utilisées pendant la crise sanitaire, alors que 30% des chantiers pourraient être menacés si les pénuries continuaient, selon une partie de la profession.
Lundi matin, le président du Medef Geoffroy Roux de Bezieux s'était lui aussi ému des "arrêts de chantiers" de certains entrepreneurs du bâtiment, qui travaillent à perte en raison des augmentations de prix.
Le ministre a simplement annoncé la mise en place d'un "comité de crise" chargé de faire "remonter les cas de comportements anormaux" au sein de la filière de la construction: "la règle doit être la solidarité" a-t-il dit.
Le dispositif de médiation destiné à apaiser les tensions crées par les problèmes d'approvisionnement, annoncé le 20 mai par Bercy, devrait lui, être mis en place dans quelques semaines, selon lui.
Il sera piloté, ainsi que le comité de crise, par Pierre Pélouzet, médiateur national inter-entreprises chargé de régler les différends entre entreprises avant de recourir à la voie juridique, a indiqué le ministre.
"Nous n'avons pas de préoccupations particulière sur la poussée d'inflation, qui est cohérente avec la reprise" a ajouté M. Le Maire.
La flambée et pénurie de matières premières menacent la reprise, selon les organisations patronales
Lundi, les organisations patronales françaises ont une nouvelle fois alerté sur les conséquences pour les entreprises du bâtiment de la flambée des prix de l'acier et de la pénurie de bois de construction, qui se retrouvent dans l'impossibilité de répercuter ces hausses sur leurs contrats déjà signés et de respecter les délais impartis.
Pour le Medef, "il s'agit d'un risque systémique pour les entreprises du secteur, puisqu'il affecte l'ensemble de leurs chantiers et [survient] dans un contexte où les marges opérationnelles dans la construction s'affichent encore en net retrait par rapport à la situation d'avant-crise".
"Ces tensions risquent de peser fortement sur la reprise économique", alors que "la filière du bâtiment, fer de lance de la reprise, a embauché 64.000 salariés supplémentaires au 1er trimestre 2021 par rapport à la moyenne de 2019", met en garde cette organisation dans un communiqué.
La CPME craint que "les prix élevés et la pénurie des matières premières impactent de manière non négligeable bon nombre d'activités économiques".
Après une réunion mardi au ministère de l'Économie avec le Medef, la CPME, l'U2P (artisans) et des fédérations du secteur (CAPEB, FFB...), le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a annoncé avoir "pris une circulaire adressée à tous les acteurs de l'État pour leur demander de ne pas appliquer des pénalités de retard en cas de retard de livraison sur les marchés publics" liés à des pénuries de matières premières.
Il a souhaité que les collectivités locales fassent de même, regrettant "l'effet de ciseaux" dans lequel sont prises les entreprises du secteur, avec notamment un prix de l'acier multiplié par trois.
Le ministre a aussi annoncé la mise en place d'un "comité de crise" chargé de faire "remonter les cas de comportements anormaux" au sein de la filière de la construction: "la règle doit être la solidarité", a-t-il dit.
Le dispositif de médiation destiné à apaiser les tensions créées par les problèmes d'approvisionnement, annoncé le 20 mai par Bercy, devrait lui, être mis en place dans quelques semaines, selon lui.
La FFB alerte depuis février 2021
La FFB alerte depuis février 2021 sur le choc brutal qui affecte les matériaux de construction. Elle a fait des propositions pour palier l’urgence : versement immédiat du carry back et crédit d’impôt proportionnel au poste « achat de matériaux » pour limiter l’impact des hausses de prix ; gel des pénalités de retard et compensation intégrale du chômage partiel en cas de rupture d’approvisionnement.
La FFB reste dans l’attente d’une réponse rapide aux propositions qu’elle a faites.
Olivier Salleron, président de la FFB salue « la mise en place du comité de crise annoncée par Bruno Le Maire et espérée pour les prochains jours. Il y a maintenant urgence car de plus en plus d’artisans et entrepreneurs sont contraints d’arrêter les chantiers et de mettre des salariés au chômage partiel ».
Pic dépassé
Bruno Le Maire n'a en revanche pas souhaité maintenir les mesures d'indemnisation du chômage partiel utilisées pendant la crise sanitaire, alors que 30% des chantiers pourraient être menacés si les pénuries continuaient, selon une partie de la profession.
Pourtant, la situation "est bien une suite logique du Covid", a argumenté à la sortie de la réunion le président de la Capeb (artisans du bâtiment), Jean-Christophe Repon.
Selon lui, "il faut continuer à accompagner" les entreprises en difficulté, qui, sinon vont être obligées de "licencier" des salariés qu'elles "ont mis un an et demi à recruter".
Le problème dépasse le secteur de la construction, s'étendant à l'électronique, l'automobile et aux industries utilisant des métaux non-ferreux.
"La sortie de crise sanitaire a pour nous des conséquences compliquées", a expliqué à l'AFP Georges Devesa, directeur général de Nutrisens, une entreprise lyonnaise spécialisée dans l'alimentation des personnes âgées ou hospitalisées.
"Viande et légumes augmentent de près de 20%, plastiques, cartons de plus de 40%, avec des délais très importants. Nos marges sont en grand danger du fait de ces hausses d'une ampleur jamais vue", détaille ce dirigeant qui dit qu'il n'aura pas d'autre choix que d'augmenter ses prix.
Cette flambée des cours sera-t-elle durable? La question inflationniste hante les esprits, alors que les cours mondiaux sont tirés par les reprises économiques plus vigoureuses et précoces en Chine et aux États-Unis qu'en Europe.
"Nous avons une augmentation considérable de la demande au moment où les capacités d'offre sont quand même encore un peu réduites", a expliqué à l'AFP Philippe Chalmin, économiste spécialiste des matières premières.
Selon lui, "le pic est derrière nous" pour l'acier et le bois, ce qui soulagerait le secteur de la construction, mais les prix du cuivre pourraient rester élevés, ce métal étant "un des bénéficiaires de la transition énergétique".