C'est la première fois qu'une banque française sera jugée en France pour des faits liés à la crise de 2008.
En novembre 2007, dans un communiqué sur ses résultats du troisième trimestre de l'année, Natixis indiquait que les risques portés par la banque sur les "subprime", un type de crédit hypothécaire distribué aux États-Unis, étaient "limités".
La crise coûtera finalement cher à la jeune banque, qui verra son cours s'effondrer, passant de 19,55 euros lors de son introduction en Bourse fin 2006, à moins d'un euro par action en 2009.
C'est à cette époque que de petits actionnaires emmenés entre autres par l'Association pour la défense des actionnaires minoritaires (Adam) saisissent la justice. L'organisation porte plainte pour "diffusion d'informations trompeuses" et "présentation de comptes inexacts".
Seuls deux communiqués de 2007 ont finalement fait l'objet d'une mise en examen en 2017, soit dix ans après les faits. Le renvoi devant le tribunal ne concerne que l'un des deux, celui portant sur les résultats du troisième trimestre, l'autre ayant abouti à un non-lieu du juge d'instruction.
Les audiences s'étendront sur six demi-journées, entre le 29 et le 31 mars, puis du 6 au 8 avril, au tribunal judiciaire de Paris.
Si la justice juge que Natixis a volontairement sous-estimé son exposition pour tromper le marché, la banque risque une amende pouvant aller jusqu'à 7,5 millions d'euros, un montant faible au regard du bénéfice net de l'établissement qui s'est élevé à 100 millions d'euros en 2020, et à deux milliards en 2019.
A cette amende, pourraient s'ajouter les demandes des parties civiles.
Lors de l'annonce du renvoi devant le tribunal en 2019, la filiale cotée du groupe BPCE avait rappelé que "l'émergence de cette crise constituait alors pour elle, comme pour toutes les banques de la place, une situation sans précédent dont il était impossible d'anticiper les conséquences en chaîne".
"Dans ce contexte, Natixis considère avoir fourni au public, en toute sincérité, les informations dont elle disposait sur ses expositions, au fur et à mesure de l'identification de leurs risques sous-jacents", avait ajouté la banque.
L'Autorité des marchés financiers (AMF), qui s'était penchée sur cette communication, avait décidé qu'il n'y avait pas lieu d'engager des poursuites.
La crise des "subprime" a fait basculer les États-Unis dans ce qui était alors la pire récession depuis la Grande Dépression de 1929 et a eu des répercussions mondiales.
Natixis avait été sévèrement touchée, accusant une perte nette de 2,8 milliards d'euros en 2008 et de 1,7 milliard d'euros en 2009 avant d'entamer un redressement.
Mais le cours de la banque n'est, lui, jamais revenu à ses niveaux d'avant-crise. Aujourd'hui, l'action Natixis vaut environ 4 euros, soit le prix annoncé en février par la maison mère BPCE, qui souhaite racheter la totalité des titres du marché et sortir sa filiale de la Bourse.
Lors de son introduction en 2006, 2,8 millions de particuliers avaient acheté des titres Natixis et l'opération avait été à l'époque qualifiée de succès.
"Ils n'ont pas arrêté de faire de la communication pour nourrir leur cours de Bourse, mais les gens n'ont pas été informés qu'ils détenaient un titre qui en réalité avait un fort potentiel de baisse", avait critiqué en 2017 la présidente de l'Adam, Colette Neuville.