L'économie française est-elle repartie début 2021, ou faudra-t-il encore attendre une nette amélioration sur le front sanitaire pour tourner le dos à la récession?
Début mars, l'Insee tablait sur une croissance de 1% pour le premier trimestre, après la récession record de 8,2% en 2020, et un recul du produit intérieur brut (PIB) de 1,3% sur le seul dernier trimestre.
La France se situe sur "une ligne de crête" sanitaire et économique, estimait alors Julien Pouget, chef du département conjoncture de l'Insee.
C'était avant le durcissement des restrictions imposé mi-mars dans 19 départements, dont ceux d'Ile-de-France, suivi par l'annonce d'un troisième confinement dans toute la France.
Depuis, l'Insee n'a pas actualisé sa prévision, mais la Banque de France a dit s'attendre à une "légère croissance" du produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre, inférieure à 1%. Le consensus d'analyste compilé par Factset table sur +0,1%.
Fin 2020 et début 2021, "globalement ce sont des trimestres perdus, qui n'ont pas fait avancer l'activité par rapport au retard accumulé en 2020", juge Philippe Ledent, économiste chez ING, qui table sur une stabilité du PIB.
Ainsi, selon la Banque de France, le PIB français serait ainsi en mars encore 4% en dessous de son niveau d'avant crise (en janvier et février 2020), contre -5% environ en décembre.
"On a toujours une image très hétérogène", de l'économie, avec des secteurs "qui restent très directement affectés par les mesures sanitaires" comme l'hôtellerie-restauration, l'évènementiel, les activités récréatives, les services de transports et la fabrication des matériels de transport (aéronautique, automobile), détaille Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas.
A l'inverse, certains sont plus proches de leur niveau d'avant-crise, comme l'immobilier et les services publics non marchands, ajoute-t-elle.
L'industrie en particulier semble s'être bien repris, tirée par la demande internationale, à en croire différents indicateurs publiés ces dernières semaines.
Rebond reporté mais pas perdu
La consommation des ménages, moteur traditionnel de la croissance française, ne devrait en revanche pas beaucoup progresser par rapport à fin 2020.
"Au premier trimestre, il n'y avait pas encore l'effet psychologique de la vaccination. On était plutôt dans l'attente et la peur d'une troisième vague", estime Philippe Ledent.
La France devrait toutefois afficher de meilleurs résultats trimestriels que ses principaux voisins européens. Une comparaison flatteuse seulement due au "timing de la gestion de la pandémie", selon Philippe Ledent, avec un durcissement des restrictions décalé en janvier en Allemagne par exemple.
En revanche, le deuxième trimestre sera sans doute encore mitigé, avec le reconfinement censé durer jusqu'à la mi-mai. "On va en sortir sans doute encore plus progressivement que du précédent, donc cela va continuer de contraindre l'activité sur une bonne partie du deuxième trimestre", avance Hélène Baudchon.
Ce début d'année difficile, recule donc la perspective du rebond de l'économie française, que le ministre de l'Economie Bruno Le Maire prédit "très fort" à partir de l'été, visant une croissance de 5% sur l'ensemble de 2021.
La Banque de France table elle sur 5,5%, une progression supérieure à la moyenne attendue pour la zone euro.
"Le rebond est reporté", mais si la vaccination se passe bien, "le potentiel de rebond ne sera pas remis en cause", estime Hélène Baudchon.
A condition qu'aucun nouveau variant ne vienne menacer la sortie de la crise sanitaire. La France n'aura alors pas totalement tourné le dos à la crise, mais commencera doucement à voir le bout du tunnel.