"Travailler sur ces grandes structures en hauteur, c'est assez impressionnant," s'enthousiasme Titouan Durand, 20 ans, qui se forme à la maintenance éolienne à l'IUT de Tarbes (Occitanie). "Il y a de la mécanique, un petit peu d'hydraulique, de l'électrique... C'est très général, ça permet de voir un petit peu tout. "
En alternance à Amiens (Hauts-de-France) chez Siemens Gamesa, il se dit rassuré par "les engagements pris par les entreprises et l'État" en matière d'énergies renouvelables. "On est à peu près certain qu'on continuera à trouver du travail" estime-t-il.
"Ça s'est fait tout seul", abonde Claudio Rumolino, ancien chef d'entreprise reconverti "par conviction" dans l'éolien à 50 ans, aujourd'hui responsable des investissements participatifs chez Vallourec.
Quelque 2.000 emplois éoliens supplémentaires ont été créés en 2019, répartis sur plus de 900 sociétés. En 2020, le secteur représentait 20.000 emplois directs et indirects, une augmentation de plus de 25% par rapport à 2016, selon France Énergie Éolienne, qui souligne que "la filière est le premier employeur dans le secteur des énergies renouvelables à l'échelle nationale."
"D'une part on continue à investir dans l'éolien, d'autre part il y a des emplois de maintenance, qui correspondent à la quantité d'éoliennes en fonctionnement" détaille Philippe Quirion, directeur de recherches dans l'économie de l'énergie au CNRS.
"Dans la maintenance, il y a davantage d'emplois dans l'éolien que dans le solaire par exemple, car il y a plus de pièces mobiles et donc de l'usure", explique le chercheur, ajoutant que la construction des composants éoliens est essentiellement localisée en France, contrairement aux équipements photovoltaïques.
Subventions indispensables
"Entre 2014 et 2019 on a eu environs 1,4 GW supplémentaires par an installés, soit entre 40 et 50 nouveaux parcs par an, précise Lilian Carpene, économiste réseaux et énergies à l'ADEME. Ce qui explique que l'ensemble des marchés et des emplois éoliens aient augmenté".
La programmation pluriannuelle de l'énergie prévoit le doublement des capacités d'éolien terrestre installées d'ici à 2028. "Si on prend cet objectif et qu'on fait une simulation du nombre d'emplois créés, on arrive à un peu plus de 18.000 emplois directs, soit un peu plus de 20%", estime M. Carpene.
Les politiques publiques soutiennent la filière, explique-t-il, via des tarifs d'achat ou des compléments de rémunération. Au moment où de plus en plus de parcs deviennent rentables, ces soutiens restent "indispensables" pour la majorité du secteur, afin de susciter l'investissement et valoriser ces moyens de production par rapport aux moyens conventionnels.
"On aura une situation de stabilité de l'emploi s'il y a une stabilité de la politique", souligne le chercheur Philippe Quirion, membre de l'association d'énergéticiens militants négaWatt.
Potentiel de reconversion
Selon les études menées par l'association mais aussi par l'ADEME, la création d'emplois dans les énergies renouvelables pourra "compenser" les emplois supprimés dans les énergies fossiles.
"Ce qui ne veut pas dire que quelqu'un qui perd son emploi dans une raffinerie va pouvoir être embauché dans l'éolien", souligne M. Quirion. "Mais il y a des cas où les transitions sont faciles. Par exemple sur l'éolien maritime flottant, la technologie est largement la même que pour faire des plateformes pétrolières off-shore. Il y a des potentiels de reconversion."
Selon les derniers chiffres de France Énergie Éolienne (FEE), qui regroupe 90% des acteurs du secteur en France, les emplois se répartissent à 31% dans les études et développement, 23% dans la fabrication des composants, 27% dans l'ingénierie et construction et 19% dans l'exploitation et maintenance.
Les formations se sont elles aussi adaptées pour former les professionnels. On dénombre 220 établissements qui proposent des formations dans l'éolien, dont 70 dans l'enseignement supérieur, réparties dans 25 villes sur tout le territoire.
Toutefois, "la filière peine à recruter des techniciens pour l'exploitation et la maintenance des parcs", selon FEE. "Ces emplois sont pourtant hautement qualifiés, non délocalisables et s'inscrivent dans la durée, soit a minima vingt à vingt-cinq ans", ajoute la fédération.