"Les hypothèses macro-économiques qui fondent ce budget sont assez optimistes, même si le taux de croissance prévisionnel a été ramené de 1,4% à 1,3%", a déclaré à l'AFP Patrick Martin, président délégué du Medef.
Brexit, tensions commerciales, une Allemagne qui pourrait entrer en récession et de possibles tensions sur le marché pétrolier: le numéro deux de l'organisation patronale souligne que la France n'est "pas un îlot de prospérité dans un océan déchaîné".
Il faudrait par conséquent selon lui "que le gouvernement envisage un plan B sur une hypothèse de croissance allant plutôt de 1% à 1,1%".
Après avoir bénéficié d'importants allègements à l'occasion des deux premiers budgets du quinquennat Macron, les patrons craignent aujourd'hui un changement de la politique économique du gouvernement, qui a donné pour 2020 la priorité aux mesures de soutien du pouvoir d'achat.
"Dans un contexte international qui s'assombrit, la France doit miser sur ses entreprises et poursuivre la politique de l'offre", a tweeté la semaine dernière le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux, estimant aussi que "le problème de notre pays, c'est que les dépenses publiques ne baissent pas".
Tandis que la dette publique devrait continuer à augmenter en volume l'an prochain, "les prélèvements obligatoires sur les entreprises vont augmenter", dénonce M. Martin.
"Ce que nous voulons, c'est de la stabilité et de la lisibilité", souligne de son côté François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).
Il demande qu'"on arrête de décrocher la palme de numéro un, et surtout qu'on ne dépasse pas les plafonds actuels, sur la fiscalité, le montant des prélèvements".
Le patronat "dépité"
Dans le détail, M. Martin du Medef évoque un alourdissement "de l'ordre d'un milliard d'euros" en tenant compte des mesures prévues dans le projet de budget de l'Etat (PLF) et dans celui de la Sécurité sociale (PLFSS), ainsi qu'un alourdissement de la pression fiscale au niveau local.
La limitation de la déduction forfaitaire spécifique (DFS) applicable sur les charges sociales dans certains secteurs (BTP, presse...) devrait quant à elle peser 400 millions d'euros.
A l'horizon 2021 viendront s'y ajouter un coup de rabot sur les frais de fonctionnement du crédit impôt recherche (CIR) pour 200 millions ainsi qu'une moindre réduction d'impôts liée aux dépenses de mécénat.
S'ajoute à ces mesures une baisse de l'impôt sur les sociétés moins rapide qu'initialement prévue, dont le manque à gagner pour 2020 est chiffré à 700 millions d'euros.
"On est assez dépités d'entendre ce discours qui ne correspond pas à une réalité comme quoi les entreprises ont eu beaucoup de choses, que le moment est venu non seulement de ne plus rien leur donner mais le cas échéant de leur reprendre", relève M. Martin.
Au moment où la conjoncture se dégrade, "il faudrait encourager les entreprises à poursuivre leurs investissements, à poursuivre les embauches et certainement pas faire le contraire".
La CPME, deuxième organisation patronale française dont un certain nombre d'adhérents figuraient l'an dernier parmi les "gilets jaunes", redoute par ailleurs que la nécessité de décarboner l'économie serve de prétexte à un nouveau matraquage fiscal.
Son président demande sur ce point de "l'incitation plutôt que de la sanction, et si ça passe par de nouvelles taxes, il faut qu'une taxe remplace une autre, et surtout pas une taxe supplémentaire".
M. Asselin reconnaît la nécessité d'une transition vers une économie moins émettrice de carbone.
Mais "si on doit à coup de taxes forcer les acteurs économiques à cette transition, attention de ne pas les tuer", met-il en garde.