Quelles dépenses, pour quelles économies? Face à une croissance plus faible que prévu, l'exécutif a dû tenir compte des fortes contraintes pesant sur l'équation budgétaire 2019 pour procéder à ses derniers ajustements.
Parmi ces arbitrages de dernière minute: le geste fiscal promis pour 100.000 retraités modestes afin de compenser la hausse de CSG. Ce dispositif sera "bel et bien mis en place", a indiqué à l'AFP une source proche du dossier.
Cette mesure correctrice, dont le coût n'a pas été précisé, avait été annoncée fin mars par Edouard Philippe. Mais jusqu'à présent, l'exécutif n'avait pas communiqué les modalités de ce dispositif, laissant planer le doute sur sa mise en oeuvre réelle.
Selon la même source, la solution retenue permettra aux 100.000 contribuables concernés d'être "complètement exonérés" l'an prochain de la hausse de 1,7 point de la CSG, entrée en vigueur au 1er janvier 2018.
Elle s'appliquera aux personnes dont le revenu fiscal de référence se situe "juste au-dessus" du seuil prévu pour cette augmentation, à savoir 14.404 euros pour une personne seule, et 22.051 euros pour un couple.
Selon Le Figaro, qui a révélé l'information, seuls les retraités ayant franchi le seuil fiscal de référence deux ans de suite seront soumis à la hausse. "Ceux qui le dépassent durant une seule année seraient" ainsi "exemptés", écrit le quotidien.
Contacté par l'AFP, le secrétaire général de la Fédération générale des retraités de la fonction publique (FGR-FP), Michel Salingue, a salué "une bonne nouvelle pour les 100.000 retraités concernés". Mais "ça ne va pas régler le problème de fond", a-t-il rappelé.
Quelque 60% des retraités, soit 7,5 millions de personnes, sont actuellement concernés par la hausse de la CSG -- les 40% restants étant exonérés de CSG ou soumis à une CSG à taux réduit. La perte de pouvoir d'achat pour les retraités concernés atteint plusieurs centaines d'euros.
"Fiscalité rampante"
Pour tenir ses objectifs budgétaires, le gouvernement a par ailleurs confirmé la mise en oeuvre de mesures d'économies sur les aides publiques aux entreprises, pour un montant de près d'un milliard d'euros.
Selon le gouvernement, ce coup de rabot se traduira par la suppression du taux réduit de la taxe sur les carburants (TICPE) dont bénéficient certains secteurs industriels qui consomment du gazole non routier (GNR). Cela permettra à l'Etat de faire "près de 950 millions d'euros d'économies", précise-t-on.
D'après le quotidien Les Echos, cette suppression concernera notamment les entreprises du BTP, de la chimie, ou de la métallurgie, mais pas les agriculteurs et l'industrie ferroviaire.
"Une phase transitoire" permettra aux distributeurs de GNR de "s'adapter progressivement à cette nouvelle fiscalité", a indiqué à l'AFP le ministère de la Transition écologique, sans plus de précision.
Cette mesure risque d'avoir un "impact très fort sur le BTP", "de l'ordre de 400 à 500 millions d'euros", s'est inquiété auprès de l'AFP le président délégué du Medef, Patrick Martin.
"C'est encore un élément de fiscalité rampante. Mis à bout à bout, ces éléments peuvent représenter des sommes considérables, et ça touche à la marge des entreprises", a renchéri le président de la CPME, François Asselin.
Cette décision intervient après plusieurs annonces fiscales d'importance pour les entreprises, concernant notamment le régime fiscal des brevets, qui devrait être durci pour mettre la France en conformité avec les règles européennes.
Et selon Les Echos, de nouveaux arbitrages pourraient être pris prochainement: le gouvernement envisagerait ainsi de faire évoluer les dispositifs fiscaux en faveur du mécénat, jugés coûteux (930 millions d'euros par an).
"Rien n'est décidé à ce stade", souligne toutefois Bercy, qui présentera son projet de budget lundi prochain en Conseil des ministres.
Ce budget s'avère plus difficile à boucler que prévu, l'exécutif étant tiraillé entre une croissance molle (1,7% attendus par Bercy) et les promesses à Bruxelles de bonne conduite budgétaire. Selon Bercy, le déficit public devrait ainsi atteindre 2,8% du PIB en 2019 contre 2,6% cette année.