Les volumes produits se contractent par rapport à leur niveau plutôt élevé de fin 2017 mais se maintiennent sur ceux d'il y a un an. Les derniers indicateurs disponibles suggèrent que la dynamique de la demande reste solide du côté du bâtiment comme des travaux publics. De fait, l'activité des matériaux devrait retrouver un certain élan dans les prochains mois, dans un contexte où les grèves SNCF risquent d'affecter sensiblement l'approvisionnement des chantiers.
Le mois de mars “normalise” les tendances
Après des mois de janvier et février dont la lisibilité conjoncturelle a été rendue compliquée par les facteurs climatiques et par une comparaison à un début d'année 2017 “exceptionnel”, le mois de mars tend à rentrer dans la norme avec des productions en hausse de +2,3% par rapport à février dans les granulats et de +7,9% dans le BPE (données cvs-cjo). Du côté des granulats, l'activité de mars reste malgré tout assez modérée, se situant à moins d'un point au-dessus de celle d'il y a un an (+0,9%). Au premier trimestre, les volumes accusent donc un repli de -2% par rapport au dernier trimestre de 2017 mais restent supérieurs de +1,2% à ceux du premier trimestre 2017. En cumul sur les douze derniers mois, l'activité granulats demeure toutefois en hausse de +2,6% par rapport aux douze mois précédents. Dans le BPE, l'impact du froid en février ayant été plus sensible, les livraisons de mars ont nettement rebondi, se situant, elles aussi, un peu au-dessus de leur niveau de mars 2017 (+0,6%), un des meilleurs mois de l'année. Néanmoins, la production du premier trimestre gardera quelques stigmates hivernaux : avec un repli de -1,7% par rapport au trimestre précédent, elle se maintient à son niveau de l'année passée (-0,1%). En cumul sur douze mois, le rythme de progression des volumes livrés se modère et perd un point par rapport à février, à +5,8%. L'indicateur matériaux pâtira lui aussi de ces effets, avec une progression de l'activité nettement ralentie au premier trimestre (+1% sur un an en données provisoires cjo, contre +6,8% fin 2017).
Si les perturbations climatiques ont cessé fin mars, celles liées au transport ont en revanche pris le relais début avril. Avec environ 60% des trains de fret supprimés au départ des carrières, les grèves SNCF compliquent fortement l'acheminement des granulats dont 10 millions de tonnes sont expédiées annuellement par voie ferrée (40% à destination de l'île-de-France). Si l'approvisionnement des chantiers et des plateformes a, pour le moment, pu être assuré grâce aux stocks existants et au report modal par la route, il se traduit pour les carriers par des surcoûts importants, des retards de livraison, des pertes de chiffre d'affaires, voire des pertes de marchés. Dans un contexte de pénurie de chauffeurs routiers et de baisse des stocks chez les clients, ces grèves, si elles devaient se poursuivre, affecteront à n'en point douter la tenue des délais et des budgets des chantiers, notamment sur le Grand Paris.
Le non résidentiel soutient le bâtiment
Selon les chefs d'entreprise du bâtiment interrogés par l'INSEE en avril 2018, le climat des affaires est stable, le solde d'opinion se maintenant bien au-dessus de sa moyenne de longue période. Si l'activité passée est apparue moins vigoureuse, les professionnels s'attendent en revanche à une accélération dans les mois à venir et jugent leurs carnets de commandes plutôt bien garnis (7,4 mois de travail contre 5,5 mois en moyenne sur longue période). Du côté des promoteurs, la dernière enquête menée par l'INSEE en avril marque une amélioration, ces derniers étant en effet plus nombreux qu'en janvier à estimer que la demande de logements neufs est forte. Ainsi, après deux trimestres de repli, les perspectives de mises en chantier se redressent un peu, celles concernant les logements destinés à la vente demeurant encore au-dessus de leur moyenne de long terme. De fait, les promoteurs signalent un net repli de leurs stocks de logements invendus.
Le maintien de ce climat conjoncturel favorable fait écho à la situation du marché de la construction qui demeure plutôt solide. Certes, les données de mises en chantier de logements du premier trimestre confirment le mouvement de modération amorcé depuis quelques mois, avec une contraction de -2,5% par rapport au trimestre précédent (cvs-cjo) et de -3,5% au regard de l'an passé. Cet essoufflement concerne d'ailleurs plus le segment du collectif que celui de l'individuel qui reste en progression de +2,6% et +2,9% respectivement. Du côté des permis, la tendance du premier trimestre 2018 est restée haussière par rapport au quatrième trimestre 2017 (+3,4%) mais est devenue négative au regard de la même période d'il y a un an (-1,6%), notamment sous l'effet de la chute des autorisations de logements en résidence (-30,2%), les segments de l'individuel groupé et du collectif demeurant haussiers (+7,4% et +6,7% respectivement). En revanche, côté non résidentiel, tous les voyants restent au vert ! Les locaux mis en chantiers ont bondi de +12,9% au premier trimestre sur un an, dont +29,2% dans l'industrie et +35,5% dans les services publics et collectifs. Quant aux surfaces autorisées, elles grimpent de +12,3% sur un an, dont +81,8% pour les bureaux, les secteurs de l'industrie et des services collectifs demeurant très vigoureux.
TP : des perspectives bien orientées
La bonne orientation des indicateurs se constate également du côté des travaux publics. Certes, en liaison avec les conditions climatiques difficiles du début d'année, l'enquête menée en avril par la FNTP traduit un fléchissement de l'activité au premier trimestre mais les professionnels sont en revanche plus nombreux qu'en janvier à prévoir un raffermissement au cours des trois prochains mois, tant du côté de la demande publique que du côté de la demande privée. Les soldes d'opinions sur l'activité future se situent désormais bien au-dessus de la moyenne de longue période et les perspectives d'embauche se redressent en liaison avec les tensions sur les facteurs de production. En effet, selon la FNTP, 38% des entreprises font face à des insuffisances de personnel, soit 2,5 fois plus que la moyenne.
Les prises de commandes demeurent solides, un constat partagé par le segment des travaux routiers pour lequel les carnets affichaient une hausse de 12,3% sur un an en février.