La rencontre entre le Premier ministre et les chefs de partis ou de groupe consultés jusqu'à présent, qui a débuté vers 15H00, vise selon Matignon à la "formation rapide" d'un gouvernement.
Hervé Morin, président du parti Les Centristes, a souhaité en arrivant que "tout cela aboutisse". Après lui sont entrés dans la cour de Matignon Marc Fesneau et Maud Gatel (MoDem), Hervé Marseille (UDI) Franck Riester (parti Renaissance), Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau (Les Républicains), Gabriel Attal (groupe Ensemble pour la République) et Edouard Philippe (Horizons).
Michel Barnier a aussi rencontré jeudi matin séparément la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, puis le président du Sénat, Gérard Larcher.
Dans un message aux députés de son groupe, Gabriel Attal a indiqué qu'il allait demander au Premier ministre "quelles sont les grandes lignes de l'action qu'il entend conduire avec son futur gouvernement, et comment l'architecture de celui-ci permettra d'incarner l'union républicaine dont notre pays a tant besoin".
Un échange téléphonique est prévu avec les élus du groupe centriste Liot, actuellement rassemblés en Corse.
Tensions avec les macronistes jusqu'au président, ambitions des LR, fin de non-recevoir de la gauche: deux semaines après sa nomination à Matignon, les embûches continuent pourtant de s'accumuler pour Michel Barnier.
Des tiraillements ont notamment pointé au sommet de l'exécutif.
Emmanuel Macron, qui assure ne pas vouloir intervenir dans la composition du gouvernement, a reçu Michel Barnier mardi puis encore mercredi.
Selon les récits qui filtrent, leur déjeuner de mardi se serait mal passé.
Un proche du chef de l'Etat a rappelé que la tâche assignée au Premier ministre était "d'aller vers l'union nationale et de respecter les équilibres".
Mais "le compte n'y est pas" pour le président, selon un cadre de son camp. Il aurait signifié à Michel Barnier que la droite ne pouvait pas avoir deux gros postes comme les Finances et l'Intérieur, seulement l'un ou l'autre, agaçant son interlocuteur, rapporte un cadre de LR.
"Rien à perdre"
Ce n'était "qu'une première liste, la base d'une négociation", a tempéré le porte-parole des députés LR, Vincent Jeanbrun jeudi sur BFMTV/RMC.
"Sur les noms évoqués" ainsi que "sur l'équilibre des sensibilités, cela ne représente en rien le projet de gouvernement souhaité" par Michel Barnier, a précisé Matignon mercredi soir.
Le risque est que personne ne soit satisfait du résultat final. "Quand Michel Barnier cherche à élargir à gauche, il parle d'impôts mais braque à droite et au centre", résume le cadre du camp présidentiel.
Michel Barnier "veut faire un gouvernement RPR" et "il y a des résistances" dans la majorité, mais "pas tant de Macron" qui "ne veut pas de crise" et pourrait valider l'équipe, croit savoir un ténor de la majorité.
Le camp macroniste "invente l'idée selon laquelle LR voudrait tout, mais ce n'est pas du tout le style de Barnier. Je suis persuadé qu'il va faire une proposition raisonnable et responsable", décrypte une source sénatoriale LR. Avant de mettre en garde: "Je crois que cette fois, ce sera +cette proposition ou je me tire+. Il n'a rien à perdre, il a 73 ans, il n'attend rien derrière. A l'impossible nul n'est tenu".
Les frictions sont montées d'un cran mercredi avec une série de rendez-vous manqués. Une première réunion entre Michel Barnier et le groupe des députés macronistes Ensemble pour la République, qui réclame une "clarification" notamment en matière fiscale, a été reportée, avant qu'une deuxième avec la droite ne soit à son tour annulée.
Le Premier ministre a expliqué avoir découvert une "situation budgétaire très grave" qui mérite "mieux que des petites phrases".
L'appétit des LR, qui ont obtenu Matignon avec seulement 47 députés, mais sont devenus pivots, agace dans le camp macroniste et à gauche.
"Crise de régime"
Le temps presse côté budget, dont le calendrier a été grandement retardé cette année par la dissolution et la nomination très tardive d'un Premier ministre.
Matignon a transmis finalement jeudi aux commissions des Finances de l'Assemblée nationale et du Sénat "les documents budgétaires élaborés par le gouvernement démissionnaire" en vue du projet de loi de Finances pour 2025. Ces documents sont, en temps normal, disponibles durant l'été.
Le locataire de Matignon peine aussi à trouver des personnalités de gauche, auprès desquelles il a essuyé plusieurs refus.
Et Marine Le Pen, cheffe de file des députés Rassemblement national, affirme dans le Parisien qu'elle ne souhaite pas que Xavier Bertrand, son adversaire dans les Hauts-de-France, ou Eric Dupond-Moretti, Garde des Sceaux sortant, figurent dans son équipe.
Cette situation inextricable fait dire à certains élus que sa mission est devenue impossible.
"Il y aura peut être une crise de régime si on ne fait pas tous l'effort de trouver des solutions", a estimé le député LR Olivier Marleix.