"C'est historique, c'est 2005 sans les émeutes", ose Jean-Philippe Acensi, président de Bleu-Blanc-Zèbre, association co-organisatrice du rassemblement.
"On ne peut plus se contenter de discours fumeux".
Les signataires, "réunis spontanément et sans aucune idée partisane", se sont retrouvés à Grigny (Essonne) pour cet appel. Une ville symbole: elle abrite une grande partie de La Grande Borne, l'une des cités les plus sensibles d'Ile-de-France, en lisière de laquelle des policiers avaient été attaqués il y a un an avec des cocktails Molotov.
Partageant le constat que la politique de la ville "est entrée dans une phase critique et de désespérance", les maires ont listé dix mesures "urgentes" à appliquer "avant le budget 2018".
Ils ont d'abord appelé le gouvernement à revenir sur ses annonces récentes, notamment la suppression de 46,5 millions d'euros de crédits alloués à la politique de la ville et la réduction des contrats aidés, dont bénéficient de nombreuses associations dans les quartiers.
Le financement de la politique de la ville sera "sanctuarisé" à partir de 2018 et pour tout le quinquennat et les contrats aidés donnés en priorité aux quartiers prioritaires, avait assuré il y a dix jours Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, pour apaiser les élus.
"Quand on retire un euro, ce sont des moyens en moins pour aider les personnes sans emploi, sans logement", a averti la maire PCF de la petite commune de La Verrière (Yvelines), Nelly Dutu.
Doubler le budget de la politique de la ville - 411 millions d'euros actuellement -, créer un fonds d'urgence immédiat de 100 millions d'euros pour les 100 quartiers les plus en difficulté: les signataires ont demandé de nouveaux crédits.
"Nous aimerions avoir des êtres humains en face de nous. Nous ne sommes pas des numéros, nous en avons assez d'être en face de gens qui ne raisonnent qu'en chiffres", a plaidé le maire PCF de Montreuil Patrice Bessac.
Virage
Alors qu'Emmanuel Macron s'apprête à lancer le chantier de la réforme de la formation professionnelle, les signataires ont demandé que "deux milliards d'euros sur les 15 annoncés" soient réservés aux publics "les plus éloignés de l'emploi".
Autre préoccupation des maires, "le rétablissement et le renforcement des effectifs de police et des moyens de justice" alors que nombre d'entre eux ont sur leur commune des quartiers classés en zone de sécurité prioritaire (ZSP).
Récemment contrainte de faire appel à sa police municipale pour assurer le calme dans sa ville, la maire de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire), Marie-Claude Jarrot (LR), a exprimé son "ras-le-bol de devoir bricoler sur des sujets aussi importants".
Le texte appelle également à la désignation d'un ministre de la Ville au rang de ministre d'Etat, et non plus intégré comme actuellement dans le ministère de la Cohésion des territoires. Ce serait un "signal politique fort", d'après les signataires.
Cette journée doit être "un virage, une alerte, le début d'une séquence démocratique", a lancé l'ancien ministre Jean-Louis Borloo. Artisan du premier programme de rénovation urbaine des quartiers dans les années 2000, il a été régulièrement cité en exemple et applaudi par les maires.
"Quand on voit tous les élus rassemblés, c'est une vraie réussite. On a créé un rapport de force" avec le gouvernement, affirme le maire de Sevran (Seine-Saint-Denis), Stéphane Gatignon (Parti écologiste).
De nouveaux "états généraux" similaires sont d'ores et déjà annoncés: à Paris en novembre lors du congrès des maires, à Roubaix en décembre et Mulhouse en janvier.