Quels sont donc les principaux moteurs du changement ?
Les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies ont un impact significatif sur le secteur de la construction et ses objectifs de réduction de la consommation d'énergie, notamment en ce qui concerne la manière dont la technologie est utilisée pour améliorer l'efficacité énergétique, l'utilisation de matériaux durables et recyclés et la biodiversité.
Le pacte vert pour l’Europe, qui est lié à de nombreux autres documents législatifs, comprend des initiatives pour construire et rénover de manière efficace sur le plan énergétique. Il contribue également à faire en sorte que la conception des bâtiments neufs et rénovés soit conforme aux besoins de l'économie circulaire.
Le volume des documents d'orientation et de politique peut être impressionnant. Cependant, ils ont tous en commun la nécessité d'utiliser des méthodologies cohérentes pour permettre des comparaisons significatives.
Le rôle croissant des évaluations du cycle de vie
Le développement durable étant désormais une priorité pour de nombreuses organisations du secteur, la nécessité d'évaluer l'impact environnemental des projets de construction s'est accrue. L'analyse du cycle de vie (ACV) est une méthode qui permet une analyse complète de l'impact environnemental d'un produit ou d'un matériau utilisé dans un bâtiment tout au long de son cycle de vie, depuis sa fabrication jusqu'à son installation, son entretien et sa démolition éventuelle.
Grâce à l'ACV, les constructeurs peuvent prendre des décisions mieux informées sur les matériaux et les processus qu'ils utilisent, dans le but de créer des pratiques de construction plus durables et plus efficaces. Cependant, nombreux sont ceux qui ont encore du mal à comprendre comment ils peuvent recueillir les données dont ils ont besoin à cette fin et où se situe la responsabilité de l'ACV dans la chaîne de valeur de la construction.
Qu'est-ce qu'une ACV ?
L'ACV des produits de construction prend en compte un large éventail de facteurs environnementaux, notamment la consommation d'énergie, les émissions de gaz à effet de serre, l'utilisation de l'eau et la production de déchets. Ces facteurs sont utilisés pour évaluer l'impact environnemental global et la performance des projets de construction.
Pour réaliser l'ACV d'un mur, par exemple, il faut notamment prendre en compte sa transmission thermique (le taux de transfert de chaleur à travers la matière, également connu sous le nom de valeur U) par rapport à l'énergie nécessaire pour chauffer/refroidir un bâtiment, ainsi que les émissions résultant de cette production d'énergie.
La responsabilité de la mesure de l'ACV de ce mur incombe à plusieurs parties prenantes. Le premier point d'information est le fabricant, qui doit fournir des données précises sur les matières premières utilisées dans le produit et sur leur transport. Les entrepreneurs et les architectes sont ensuite tenus d'indiquer comment le produit est utilisé dans un projet de construction. Enfin, les personnes chargées de l'entretien du bâtiment doivent mesurer ses performances au fil du temps.
Défis liés au traitement des données dans le cadre des ACV
Il existe toutefois des obstacles à l'adoption généralisée des ACV. L'un des plus importants concerne la collecte et la cohérence des données. Les données complètes et précises nécessaires pour déterminer l'impact environnemental des différents matériaux et processus font souvent défaut.
Tout d'abord, tous les fabricants ne fournissent pas les données nécessaires pour évaluer les effets de leurs produits sur l'environnement. Cela peut être dû au fait qu'ils ne disposent pas des données souhaitées ou qu'ils choisissent simplement de ne pas les divulguer.
Un autre défi est le risque de divergences dans les données collectées, telles que des informations obsolètes ou des différences dans les sources de données et la méthodologie de collecte, ce qui peut conduire à des évaluations incorrectes ou incomplètes des résultats.
Le grand nombre d’entreprises et parties prenantes impliquées dans un projet de construction complique souvent le processus de collecte d'informations.
Résoudre le casse-tête de la collecte de données
Des changements sont en cours dans l'industrie pour résoudre ces problèmes de collecte de données. A titre d’exemple, l'ISO, l'organisme international de normalisation, a publié la norme ISO 22057 qui décrit une approche numérique normalisée, utilisant la méthodologie du modèle de description pour échanger des données EPD pour les produits de construction.
Ce modèle de données fournit à toutes les parties un langage technique commun qui leur permet de collecter et de partager de grandes quantités d'informations précises. Pour ce faire, il fournit aux acteurs de l'industrie des données accessibles basées sur des normes internationales et conformes aux réglementations sectorielles et nationales. Cela inclut désormais les données environnementales, actuellement disponibles dans le format normalisé EPD (déclaration environnementale de produits).
Dans le passé, le manque de données normalisées s'est avéré être un obstacle majeur à la réalisation d'ACV complètes et précises. Aujourd'hui, les organisations peuvent utiliser des outils tels que les EPD, les dictionnaires de données et les modèles de données pour développer une méthode commune de description des objets, des produits, des systèmes, des matériaux et des actifs. Cela permet d'éliminer l'ambiguïté du langage dans l'échange d'informations et de créer une source holistique de données dans laquelle les organisations peuvent puiser.
D’autres normes et méthodes sont progressivement mises en place pour mieux collecter l’information et mieux la structurer. Par exemple la norme ISO 7817 (dont la première partie est disponible et dont les parties 2 et 3 sont à venir), ou encore le concept LOIN introduit par la norme ISO 19650 et défini plus précisément par la norme européenne de la série 17412.
L'approche systémique des évaluations du cycle de vie jouera un rôle important en aidant les acteurs du secteur de la construction à atteindre leurs objectifs en matière d'émissions nettes de carbone. Les organisations doivent non seulement comprendre la méthodologie de réalisation de ces ACV, mais aussi réfléchir à la manière dont elles peuvent rendre leurs données précises et accessibles afin d'en faire bénéficier d'autres acteurs de l'industrie.
Cela n'est possible que si nous décrivons les choses de manière cohérente.
Tribune d'Enzo Blonk, Head of Market Europe chez Cobuilder (Linkedin).