Le sujet de l'emploi des seniors est au coeur de discussions en cours entre patronat et syndicats.
Catherine Pons, 60 ans, tourne en rond
"A l'automne 2022, on m'a diagnostiqué un problème de santé grave, pour lequel j'ai dû être opérée au cerveau", confie avec pudeur Catherine, ancienne fonctionnaire de l'Etat.
"Mon service des ressources humaines m'a convoquée devant un médecin pour savoir si j'étais apte ou pas à la reprise d'un poste. Le problème, c'est que ce médecin est généraliste et non neurologue, plus à même de mesurer les conséquences de la maladie", regrette-t-elle.
Déclarée apte, elle n'a pas pu faire valoir une inaptitude pour prétendre directement à une retraite à taux plein. Elle est actuellement au chômage sans indemnisation et a multiplié les candidatures dans le public et le privé.
"Quand je postulais dans le privé, je ne communiquais pas mon âge. Et là des entretiens, j'en ai eu !", s'exclame-t-elle. "Mais dès que je remplissais les formulaires des RH, c'était fini: le recruteur constatait que j'avais 60 ans et quelque et se disait que j'allais partir dans les 18 mois à venir à la retraite."
"On tourne en rond !", s'agace la sexagénaire, pour qui travailler n'est pas une option même si elle s'estime "chanceuse d'être mariée". "Je serais une femme seule, comment ferais-je pour faire face à mes charges ?"
Pedro, 55 ans, avec une carrière "derrière soi"
Pedro, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille, est ancien dirigeant d'écoles supérieures privées, inscrit à France Travail (ex-Pôle emploi) depuis début novembre et indemnisé depuis fin novembre.
"Pour les 50 ans et plus, on a déjà une carrière derrière soi", relève auprès de l'AFP ce Grenoblois.
Alors, quand il "candidate à des postes de plus petits calibres, sur lesquels (il a) parfois plus d'expériences et de compétences que le directeur, on ne (le) prend pas au sérieux". Et à chaque fois, ses prétentions salariales semblent "importantes".
Alors comment accompagner au mieux ce cadre dirigeant ?
"J'ai déjà eu plusieurs contacts... avec différents conseillers", assure le quinquagénaire. Las. "La première m'a dit très vite que ce n'est pas elle qui allait s'occuper de mon dossier. Le deuxième voulait que je fasse un stage de création d'entreprise alors que j'ai créé mon entreprise depuis 1997. Le troisième, qui ne s'occupe que de cadres et exécutifs d'entreprise, doit m'appeler dans les jours prochains", égrène Pedro.
"Humainement, les agents sont là" mais c'est tout, "ils ne savent pas faire +matcher+ la réalité d'un CV avec l'intention de la personne ou son souhait de carrière".
Renan Ker, 63 ans, dans le trou
Son métier, c'est la cuisine, une passion qu'il a exercée à tous les niveaux, dans les plus grands restaurants étoilés avant de se retrouver sans emploi, et sans ressources.
France Travail bloque son indemnisation depuis septembre, et demande à ce Breton de faire prouver à la Caisse de retraite qu'il n'a pas tous ses trimestres. Une preuve qu'en moyenne les agents de ce service public mettent six mois à établir.
En attendant, sa situation se détériore chaque jour un peu plus: "J'ai demandé le versement à titre conservatoire de mes indemnités", confie le sexagénaire. En vain. "Je suis à -1.300 euros sur mon compte bancaire. Je n'ai pas payé mon loyer depuis deux mois, mes impôts... et je joue avec les différés de paiement à partir du 20 de chaque mois".
"J'ai l'impression de creuser un trou de plus en plus grand. A 63 ans, je dois mendier et quémander pour qu'on applique mes droits. Rien que cela, c'est rabaissant et humiliant", dit-il.
Renan estime aussi avoir "encore quelque chose à transmettre": "Je veux accompagner, mettre mes qualités et compétences au service des gens qui, comme je l'ai fait il y a 20 ans, veulent évoluer."