Le premier chantier sera invisible mais complexe et piégeux. La gouvernance, la répartition des maroquins et des influences dans le futur comité d'organisation des jeux (Cojo), devront absolument échapper aux luttes de pouvoir entre le mouvement sportif, la Ville de Paris, la Région Ile-de-France et l'Etat, sous peine de compliquer la tâche des organisateurs. L'unanimité qui a présidé à l'adoubement de Tony Estanguet comme futur président du Cojo ne doit pas masquer ce risque.
"Les tractations ont commencé entre la Ville, la Région, les collectivités", confie un proche du dossier, "pour placer untel ou untel dans le futur organigramme. Le mouvement sportif va devoir lutter pour conserver le leadership."
Dissous le 30 septembre, le comité de candidature devra avoir accouché du Cojo en février prochain, selon les règles du CIO. "On sent déjà la volonté de la Ville et de la Région de reprendre la main sur le dossier dans l'intervalle", explique cette même source.
Parallèlement au Cojo se mettra en place le Solideo, chargé de superviser la livraison des équipements à construire (village des athlètes et centre nautique), en liaison avec les différentes maîtrises d'ouvrages - la Caisse des dépôts et consignations pour le Village olympique, la Ville de Paris pour le centre aquatique. Présidé par Anne Hidalgo, la maire de Paris, le Solideo sera doté de 60 millions d'euros et pourra se substituer à une maîtrise d'ouvrages en cas de défaillance financière.
Premiers coups de pioche en 2019
"Il faut que le Cojo puisse travailler l'esprit libre à l'organisation de la fête olympique, sans le souci des constructions à livrer", justifie Bernard Lapasset, co-président de la candidature avec Tony Estanguet.
Enfin, une structure Héritage-Paris-2024 sera dédiée aux legs matériels et sociétaux de l'évènement.
Concrètement, les premiers tractopelles devraient commencer à travailler en 2019 sur l'Ile-Saint-Denis, site du village olympique, et sur le terrain du centre nautique, en face du Stade de France, pour livraison prévue à partir de 2023.
"Les études environnementales - qui durent un an - ont déjà été lancées pour ne pas être bloquées par le calendrier", a précisé Etienne Thobois, directeur général de la candidature et du futur Cojo. "Pour le village, les délais ne sont pas tendus mais il ne faut pas perdre trop de temps".
Les installations provisoires qui équiperont les monuments parisiens destinés à accueillir des épreuves (Trocadéro, Champs-de-Mars, Invalides), ainsi que celles qui seront construites au Bourget ou au Parc des expositions de la porte de Versailles, seront mises en place dans les mois précédant août 2024.
"On ne va pas s'amuser à construire un an avant des installations et les laisser en plan", reprend Thobois. "Les sites temporaires, comme le Champ-de-Mars, les Invalides ou le Grand Palais, ont l'habitude d'accueillir de l'événementiel. On commence à connaître les sites. On n'a pas forcément besoin de refaire à l'identique une compétition", poursuit-il, évoquant les traditionnels "tests-events", imposés par le CIO un an avant les Jeux et destinés à tester les équipements.
Les billets vendus dès 2022
Jusqu'à début 2019, le Cojo - qui survivra durant plusieurs années avec un effectif très réduit - n'aura aucune ressource propre et vivra des subsides du CIO (1,7 milliard de dollars/1,45 milliard d'euros au total). Ce n'est qu'au 1er janvier 2019 en effet que les contrats de partenariats pourront être activés.
D'ici là, et jusqu'en 2024, les chasseurs de sponsors devront avoir séduit une trentaine de partenaires - le nombre habituel pour les dernières éditions - qui viendront abonder le budget du Cojo pour un montant espéré d'un milliard d'euros.
Un autre milliard est attendu des ventes de billets qui commenceront dès 2022. Ajoutés à la contribution du CIO (1,45 md EUR), ces montants devraient couvrir le budget de fonctionnement du Cojo, estimé à un peu plus de 3 milliards d'euros.
Une loi olympique entrera par ailleurs en vigueur à l'orée des Jeux. "Rien ne sera contraire au droit commun", promet Etienne Thobois. Elle permettra notamment de délivrer des visas multi-entrées, d'exonérer les gains des athlètes et de protéger les sponsors du "marketing d'embuscade".