Au Bourget, aucun signe n'indique encore que la commune fait partie d'une "Terre de Jeux 2024". C'est "encore loin", déclare Asfour Mabrouk, qui y possède deux boulangeries. Mais il y voit "une aubaine", "les jeunes vont avoir du travail", se réjouit l'entrepreneur.
"C'est une bonne pub pour le département qui est un peu sinistré", estime Abdenour Bellache, un Bourgetin de 31 ans.
Pour Zouina Ould'Ali, gérante depuis vingt ans d'un salon de coiffure, les JO-2024 "vont montrer une image positive de la Seine-Saint-Denis. C'est un beau département, on y vit bien", assure cette élégante femme de 52 ans, pour qui des JO sans la Seine-Saint-Denis seraient "une déception".
Paris-2024 est "un vecteur d'espoir pour les habitants parce qu'on finance des équipements que moi je ne peux pas financer", explique le maire DVD du Bourget, Jean-Baptiste Borsali, à qui on a promis un nouveau gymnase, des courts de tennis, une piscine, une école et une passerelle qui doit relier sa commune à Dugny.
Incertitudes
Le vieux complexe sportif municipal doit être aussi remodelé pour accueillir une épreuve.
Pour le référent JO de la ville, Kamel Ouarti, le temps presse. "On aimerait bien que les choses soient figées. Les Bourgetins et les associations sportives de la ville sont inquiets", affirme le vice-champion du monde vétéran de judo.
La présidente du Bourget Tennis Club Martine Pasquier a le sentiment d'être "abandonnée". "On a pleuré de joie quand on a eu les JO et là on pleure de tristesse". "Un coup vous avez le volley-ball puis l'escalade. On vous promet un terrain de tennis et puis plus rien", fulmine la présidente, qui gère 400 adhérents dont 200 enfants.
Des panneaux annonçant des destructions bordent ses installations composées de 11 courts.
"On doit m'en raboter sept pendant les travaux et je n'ai plus la certitude de les récupérer", indique Mme Pasquier. "Je ne bouge pas de mon terrain quitte à m'enchaîner tant que je n'ai pas de réponse ferme de la Solideo", l'établissement public chargé des grands chantiers, affirme-t-elle.
Le boulodrome jouxtant le club de tennis va disparaître, assure Benoît Picout, président de l'association de pétanque. "Pour l'instant, c'est le grand flou, on ne sait pas où on va nous mettre", constate-t-il, "on parle d'un terrain provisoire dans un parc du centre-ville en attendant peut-être un nouveau terrain dans quatre ans".
'Ligne rouge'
"On ne pourra plus organiser des tournois, c'est un manque à gagner pour le club", regrette ce natif de Seine-Saint-Denis. "On nous a promis un nouveau boulodrome, j'espère que la promesse sera tenue. Les JO c'est bien si on nous laisse des équipements".
A Dugny, des lettres géantes aux couleurs olympiques marquent l'entrée de cette petite ville pauvre située à moins de 13 km au nord de Paris.
Elle doit accueillir le village des médias voué à être transformé en un millier de logements, commerces et écoles. "C'est le flou", confie le maire Quentin Gesell (DVD) qui essaie de négocier "600-700 logements" pour l'après-JO, sans garantie pour le reste des équipements.
Le "cluster" des médias doit héberger près de 2.800 journalistes sur 70 hectares aux abords du "poumon vert" du département, le parc Georges-Valbon.
Pour l'heure, cette grande pelouse qui accueille traditionnellement la Fête de l'Huma, est en friche.
"Le village des médias constitue la principale ligne rouge à ne pas franchir pour la Seine-Saint-Denis", avertit Stéphane Troussel, président PS du département. Il a intimé à "l'Etat de prendre ses responsabilités pour financer le projet" à la place du comité d'organisation.
Avec le village des athlètes situé aussi dans le département, c'est l'autre grande opération d'aménagement. Il "est au cœur de l'héritage matériel" pour les habitants, déclare M. Troussel.