Un salarié peut-il être payé en dessous du Smic?
Non. Le Smic correspond au salaire horaire minimum légal en dessous duquel un salarié ne peut pas être rémunéré. Il s'applique à tout salarié majeur. Le salaire brut mensuel divisé par le nombre d'heures travaillées doit donc être au moins égal au Smic horaire (10,48 euros au 1er octobre).
L'employeur peut être condamné à une amende d'un montant de 1.500 euros s'il verse au salarié une rémunération inférieure au Smic.
Pourquoi le gouvernement appelle à revaloriser les minima de branche inférieurs au Smic?
Si le minimum conventionnel est inférieur au Smic, l'employeur doit combler l'écart. Mais pour la ministre du Travail, Élisabeth Borne, avoir des minima en dessous du Smic est "un très mauvais signal" en termes d'attractivité, à l'heure de tensions sur le recrutement. Elle a appelé dimanche toutes les branches concernées à les "revaloriser".
Les quelque 220 branches ont l'obligation de négocier périodiquement sur les salaires, mais pas d'aboutir à un accord. Certaines ont engagé des discussions et signé des accords à l'instar de la propreté ou du commerce de détail.
Actuellement, selon le ministère du Travail, 45 branches ont un minima conventionnel inférieur au SMIC, une situation liée à la revalorisation automatique du 1er janvier pour 25 d'entre elles et plus ancienne pour les autres faute d'accord.
La hausse du 1er octobre ne va pas arranger la donne: dans l'hôtellerie-restauration, où les discussions viennent de débuter, il y aura un décrochage de 75 euros par rapport à ce salaire minimum, qui sera versé aux cinq premiers niveaux de la grille salariale. Dans les transports routiers, "l'ensemble du coefficient est au Smic" sauf le plus haut "à un centime au dessus à l'embauche: 10,49 euros brut", déplore Patrice Clos, secrétaire général de FO Transports.
Les branches concernées seront reçues par le ministère et une réunion de bilan sera organisée en novembre avec les partenaires sociaux interprofessionnels.
La situation est loin d'être inédite. Selon la Dares, avant la revalorisation automatique de janvier 2020 qui avait concerné 2,25 millions de salariés (13% des salariés), 16% des branches présentaient un premier niveau de grille inférieur au Smic (contre 22% l'année précédente).
Y a-t-il un risque de créer des trappes à bas salaires?
Les salariés rémunérés au voisinage du Smic sont surreprésentés dans les métiers qui ont poursuivi leur activité durant le confinement, notamment les "deuxième ligne".
Lorsque les minima de branches sont rattrapés par le Smic, cela génère souvent une concentration accrue de salariés dont le salaire devient ancré sur le Smic.
"Dans l'évolution de la grille des salaires, potentiellement même avec l'ancienneté, vous restez au Smic. Ca c'est un vrai problème", explique Mathieu Plane, économiste à l'OFCE.
"Le problème n'est pas forcément au niveau du Smic, mais sur le tassement des salaires autour du Smic", insiste-t-il, ajoutant qu'il s'agit d'agir "sur la dynamique des salaires, de recréer une progression de carrière et ne pas rester collé" au salaire minimum.
Selon une étude de l'Insee de 2018, une augmentation de 1% du Smic rehausse les salaires de base individuels de 0,08% en moyenne, tandis qu'une hausse similaire des minima conventionnels les augmente de 0,14%.
Pour les syndicats, qui mettent en avant les "deuxième ligne", la hausse automatique du Smic est clairement insuffisante.
A la CGT, qui revendique un Smic à 2.000 euros brut, Boris Plazzi explique que l'intérêt d'augmenter le salaire minimum est que "ça touche tout le monde, petites comme grandes entreprises". Mais, dit-il, il faut aussi "ouvrir des négociations dans les entreprises et dans les branches" et "une hausse de l'ensemble des salaires" car "si on ne fait qu'augmenter le Smic on ne paye pas les qualifications".
Pour la CFDT, "le vrai sujet c'est la revalorisation des minima de branche". Augmenter le Smic est "un pis-aller qui ne répond pas au problème", estime Luc Mathieu. Outre le fait d'"écraser les catégories hiérarchiques", la question de l'attractivité d'un certain nombre de métiers "ne se réduit pas à la question des salaires" et a aussi trait aux "conditions de travail, parcours, à l'articulation des temps...".
"C'est en travaillant sur l'ensemble qu'on améliore la situation des travailleurs de deuxième ligne", dit-il.