La journée démarrera toutefois par le traditionnel conseil des ministres, qui se tiendra en visio-conférence, sauf pour les membres du gouvernement qui accompagnent le président de la République.
La séquence logement, pour détailler les moyens de lutter contre l'habitat indigne, se fera ensuite à l'occasion d'une visite à la résidence Est marseillais, une copropriété dégradée connue comme la cité "Benza".
Avec 40.000 taudis et huit personnes mortes dans l'effondrement de deux immeubles insalubres du centre-ville en novembre 2018 rue d'Aubagne, Marseille est particulièrement touchée par la crise du logement.
Une première opération va être le lancement d'un plan de sauvetage exceptionnel pour quatre grandes copropriétés privées dégradées de la ville, via des opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national (ORCOD-IN), un outil permettant de "mobiliser des moyens exceptionnels d'intervention et mieux lutter contre les marchands de sommeil", a déclaré mardi soir M. Macron au quotidien régional La Provence.
La mairie de Marseille a également fait état à l'AFP de ces quatre ORCOD-IN prévues, ainsi que d'un plan d'intervention sur d'autres copropriétés privées dégradées.
Ce dispositif ORCOD-IN, lancé depuis 2017 en Ile-de-France, permet aux pouvoirs publics d'exproprier ou de racheter plus facilement pour détruire ou rénover, de financer des travaux dans les parties communes et de mieux prendre en charge les questions de sécurité.
Industries vertes... et pollution
A la mi-journée, le président se rendra ensuite au port de Marseille-Fos, un des plus grands du pays, désormais présidé par son ancien ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, à la tête du conseil de surveillance.
Mardi, le président avait déjeuné avec un des principaux acteurs du port, Rodolphe Saadé, le patron de l'armateur CMA-CGM, un géant du secteur, basé dans la cité phocéenne.
M. Macron a réaffirmé mardi soir que le développement futur du Grand port maritime de Marseille (GPMM) devait se faire en profondeur, dans son "hinterland", vers le Rhône et la Saône et "jusqu'en Bavière", place-forte industrielle du sud de l'Allemagne.
Il a également insisté sur le développement des nouvelles industries vertes, notamment autour de la production d'hydrogène ou d'énergies renouvelables, avec plusieurs projets sur les importantes emprises du port vers Fos-sur-Mer, au nord de Marseille.
Mais les enjeux sont aussi à l'échelle de la ville elle-même, le GPMM détenant de très importantes réserves foncières sur lesquelles la municipalité n'a pas prise. Paradoxalement les installations du port bloquent aussi l'accès au littoral dans une bonne partie de la ville, notamment les quartiers nord, les plus pauvres et enclavés.
Autre gros dossier, la pollution générée par les navires qui accostent encore dans la partie marseillaise du port, notamment les ferries vers le Maghreb et la Corse et les gigantesques paquebots de croisière qui y font escale. Le port a entamé l'électrification des quais pour éviter aux navires de faire tourner leurs moteurs en escale, mais encore de façon limitée.
S'engageant à "faire de Marseille un port exemplaire en matière de décarbonation du transport maritime," le président Macron a promis par exemple mardi soir d'accélérer la décarbonation de flottes, que ce soit le fret, le cargo, les croisières et la plaisance.
En juillet la mairie de Marseille avait lancé une pétition "contre la pollution maritime" qui a rassemblé plus de 53.000 signatures en ligne. Début mars, des riverains et ONG ont déposé des plaintes contre X pour mise en danger de la vie d'autrui à propos des impacts des pollutions liées au trafic maritime.
Le président repartira ensuite de Marseille, qu'il présente comme sa "ville de cœur", après cette deuxième visite de trois jours, exceptionnelle par sa durée.
"Marchands de sommeil": Emmanuel Macron veut "exproprier beaucoup plus facilement"
"Il faut pouvoir exproprier beaucoup plus facilement et de manière plus punitive les marchands de sommeil", a estimé mercredi Emmanuel Macron depuis une copropriété dégradée de Marseille, promettant un changement de la loi qui "protège trop" les copropriétaires accumulant des dettes.
"La copropriété dégradée, l'habitat insalubre" est "une de nos priorités", a insisté le chef de l'Etat dans la deuxième ville de France, particulièrement touchée par la crise du logement, où il vient lancer l'acte II de son plan "Marseille en grand".
"C'est vraiment une cause nationale dont on se saisit", a affirmé Emmanuel Macron.
Nous allons "prendre dans la loi des dispositions pour davantage aider toutes celles et ceux qui vivent" dans des copropriétés dégradées privées, "accélérer les travaux d'urgence", a-t-il annoncé.
Il faut "pouvoir exproprier beaucoup plus facilement (...) les mauvais payeurs" de charges de copropriété car "c'est cela la clé", a encore détaillé le président, après s'être offert un long bain de foule auprès des habitants de la résidence Est marseillais, plus communément baptisée cité "Benza".
Ce grand ensemble de bâtiments roses délavés aux volets en fer très abîmés, où vivent un millier d'habitants environ, accuse 1,3 million de dettes et est placé sous administration judiciaire depuis fin 2017.
Dans les résidences privées comme celles-ci, "vous avez des marchands de sommeil, des propriétaires qui ne payent pas les charges et progressivement une dette s'accumule, les communs se dégradent, les ascenseurs ne sont pas réparés, les toitures ne sont pas réparées, les façades se délabrent et progressivement, année après année, la situation glisse", a décrit le chef de l'Etat, évoquant des "situations de détresse, parfois de désespoir extrêmement importantes" créées par "moins d'un tiers des propriétaires".
"Il faut pouvoir les isoler, faire payer ceux qu'on peut et ensuite exproprier beaucoup plus facilement et de manière plus punitive les marchands de sommeil et ceux qui ont placé l'ensemble de la copropriété dans cette situation", a-t-il poursuivi.
"On a des appartements T3 de 60 m2 à 10.000 euros qui sont loués 800 euros à Marseille, je vous laisse imaginer la rentabilité", a indiqué le maire de gauche de Marseille, Benoît Payan au chef de l'Etat, ajoutant que ces marchands de sommeil faisaient "vivre l'enfer aux autres propriétaires".
Le président a confirmé le lancement d'actions renforcées sur 13 copropriétés dégradées privées de Marseille.
Quatre --Les Rosiers, Consolat, la Maurelette et l'ensemble Grand Mail Gardians -- feront l'objet de moyens exceptionnels dans le dispositif baptisé "Opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national" (ORCOD-IN) ; "On va en quelque sorte nationaliser ces copropriétés : on se dote de dispositifs hors du droit commun, on exproprie, on indemnise et on reloge tous ceux qui sont en quelque sorte victimes de cette situation", ce qui permet "de faire les travaux beaucoup plus rapidement", a complété le chef de l'Etat, promettant que la situation serait désormais réglée en 18 à 24 mois contre 7 à 8 ans auparavant.
Ce dispositif a déjà été lancé depuis 2017 en Ile-de-France pour sauver des copropriétés à la dérive à Mantes-la-Jolie, Grigny, Clichy-sous-Bois et Villepinte, et il est aussi appliqué dans un ensemble de Nîmes.