Le nombre de permis délivrés entre avril et juin a reculé de -3,2% par rapport au premier trimestre 2023, où ils étaient en hausse (+10,7%), selon des estimations publiées vendredi par le ministère de la Transition écologique.
Cette baisse est largement due à un effet de calendrier liée à un record de délivrances en 2022, mais les acteurs du secteur ne cessent d'alerter sur une crise structurelle plus profonde, tant de l'offre que de la demande.
Promoteurs et constructeurs sont de fait pris en étau entre la hausse des coûts de construction et les difficultés d'accès au crédit des acquéreurs. Ils dénoncent aussi régulièrement la frilosité des maires à signer des permis.
En juin, le nombre de permis s'est légèrement redressé (+4%), avec 32.300 autorisations délivrées par rapport à mai, où ils avaient dégringolé.
Mais les 412.100 logements autorisés entre juillet 2022 et juin 2023 représentent 19,6% de moins que lors des douze mois précédents et 10,5% de moins qu'au cours des douze mois précédant la crise sanitaire.
L'année 2022 a été marquée par un pic des permis délivrés, qui a culminé en août, du fait d'un afflux de demandes déposées fin 2021, avant l'entrée en vigueur d'une réglementation environnementale plus stricte.
En cause, la validation début 2022 de nombreuses demandes déposées fin 2021, juste avant l'entrée en vigueur d'une réglementation environnementale plus stricte sur la construction neuve (RE2020); et un afflux d'autorisations délivrées en août, dernier mois pour bénéficier d'une aide à la relance de la construction.
"Véritable filière"
Depuis ce pic, le nombre de permis s'est établi à un niveau oscillant entre 30.000 et 35.000 par mois, inférieur à son niveau d'avant la crise sanitaire (autour de 40.000 par mois).
En juin, le nombre de mises en chantier, qui suit traditionnellement celui des permis de construire avec quelques mois d'écart, recule de 3,7% par rapport à mai, à 26.500.
Sur trois mois, ces mises en chantier sont stables (+0,3%) mais reculent de 12,4% de juillet 2022 à juin 2023 par rapport aux douze mois précédents, avec seulement 337.200 démarrages.
Ce sont les maisons qui connaissent la plus forte diminution (-17,2%) devant les logements individuels groupés (-10,6%), les logements collectifs ordinaires (-10%) et les logements en résidence (-8,7%).
Selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), ce deuxième trimestre "prolonge le repli entamé en début d'année sur tous les segments d'autorisations de logements", avec des volumes qui "demeurent en retrait de ceux constatés cinq ans auparavant, année standard".
Malgré la crise de l'offre et de la demande solvable, les besoins en logements neufs "continuent de s'accroître dans les zones tendues, les plus attractives en emplois", alerte la FPI.
"On continue de descendre car l'année 2022 avait été artificiellement gonflée. On a une crise de l'offre et de la demande qui est très forte avec un taux de désistement qui avoisine les 50%", a réagi auprès de l'AFP Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobilier.
"J'en appelle tout de suite au nouveau ministre qui vient d'être nommé", a-t-il ajouté, à l'attention de Patrice Vergriete.
"Cela fait environ trois ans que nous voyons les signes avant-coureurs de cette crise", a abondé vendredi Xavier Huillard, PDG du groupe de construction Vinci, estimant que les réponses des décideurs n'étaient "pas à la hauteur" et "que la situation commençait à être "réellement problématique (...) pour la cohésion sociale de notre pays".
"Il faut bien comprendre que c'est une véritable filière, qui commence par le logement d'urgence (...), qui passe ensuite au logement social puis au logement intermédiaire puis aux logements libres, qu'ils soient achetés par des particuliers ou par des investisseurs pour ensuite les louer. Et lorsque ça bloque au niveau du haut, c'est-à-dire du logement libre, eh bien cela empêche les populations des étages précédents (...) de sortir de la situation dans laquelle elles sont", a ajouté le PDG de Vinci.