Entre mars 2020 et juin 2022, près de 700.000 PGE ont été accordés par les banques pour un montant total dépassant 143 milliards d'euros.
Ces prêts ont permis à de nombreuses entreprises de tenir le coup pendant la pandémie et de renflouer leur trésorerie à des conditions avantageuses, leur taux d'intérêt ne dépassant pas 2,5%, garantie de l'Etat comprise.
Dès 2021, 45% des PGE ont commencé à être remboursés, et une grosse vague d'entreprises devaient entamer le paiement de leurs échéances à partir du printemps 2022 (plus de 200.000 PGE), a indiqué à l'AFP le médiateur national du crédit à la Banque de France, Frédéric Visnovsky.
En cas de défaut de l'emprunteur, l'Etat garantit aux banques un remboursement de 90% pour les TPE, PME et ETI.
Au total, les PGE représentent près de 11% de l'encours total du crédit bancaire aux entreprises.
Pressées par le gouvernement d'accorder ces prêts rapidement, au moment du premier confinement au printemps 2020, les banques ont-elles été peu regardantes dans l'attribution de ces crédits, au regard du faible risque encouru?
Le risque de défaut n'était pas considéré comme élevé au départ: il avait été estimé à l'origine à 5,1% des PGE contractés, puis revu à la baisse en 2021 à 3,1% avec le rebond de l'activité, avant d'être réévalué en hausse cet été à 4,6%, rappelle Frédéric Visnovsky. Selon lui, ce chiffre pourrait encore augmenter, "mais pas de manière significative".
Pour l'heure, les banques ne semblent pas inquiètes.
"Nous constatons à date un taux de défaut en montant d'impayés extrêmement minime (de l'ordre de 0,07%)", a répondu à l'AFP le groupe BPCE, qui a accordé 228.000 PGE pour 35 milliards d'euros.
Pour la Société Générale, "les prêts garantis par l'Etat continuent de s'amortir progressivement et le taux de défaut associé reste limité".
Les difficultés, à venir en 2023
Du côté des entreprises, l'heure des difficultés n'a pas encore sonné. Le retournement de conjoncture "ne se matérialise pas encore aujourd'hui, ni dans les trésoreries de manière effective, ni dans les demandes de médiation classiques, ni dans les demandes de restructuration de PGE", constate le médiateur du crédit.
Mais à Bercy, le Comité interministériel de restructuration industriel (Ciri), dont la tâche est d'aider les entreprises en difficultés d'au moins 400 salariés, note un accroissement "significatif" de ses interventions.
"Sur une cinquantaine de dossiers traités actuellement au Ciri, jusqu'à la moitié sont concernés par une restructuration de PGE", qui se fait dans le cadre d'un étalement d'un dette plus large, selon une source au sein du ministère, qui ne publie pas les noms des entreprises concernées.
Un seul cas est devenu public, celui du groupe touristique Pierre & Vacances, qui a vu son PGE converti en capital pour plus de 200 millions d'euros acquis par les banques.
Même dans une telle opération, l'Etat refuse de faire une croix sur sa créance. "Quand les banques vendront leurs titres, elles reverseront sa quote-part à l'Etat" au titre du PGE, précise la source au ministère.
En revanche, si une entreprise est liquidée, il y a très peu de chances que l'Etat récupère sa garantie car le remboursement du PGE passe après le paiement des salaires et des dettes sociales et fiscales.
Or les défaillances d'entreprises, qui ont fortement diminué durant la crise sanitaire, repartent à la hausse.
"La situation va se compliquer en 2023 avec le coût de l'énergie" et - suite à la relance des procédures de recouvrement fin août - avec la reprise des assignations en justice de l'Urssaf pour non-paiement par les entreprises des cotisations sociales et fiscales, anticipe Frédéric Visnovsky, qui s'attend à voir augmenter le nombre de saisines de la médiation du crédit.
Les deux secteurs les plus fragilisés sont la construction qui "centralise tous les problèmes, de recrutement, d'approvisionnement, de facturation" et l'hébergement-restauration, selon le médiateur du crédit.