Ce long bâtiment "bio-climatique" en béton, sobre et élégant, semi-enterré et de plain-pied d'une surface de 18.500 mètres carrés, au toit végétalisé en déclivité (de 11,5 à 3,5 mètres), a été inauguré mardi. Il est sorti de terre en deux ans seulement.
L'implantation du Louvre dans le bassin minier se renforce: il voisine le Louvre-Lens, qui depuis son ouverture en 2012 a vu défiler 3,5 millions de visiteurs.
Un "boulevard des oeuvres" traverse l'intérieur bétonné encore vide telle une moderne cathédrale. Y transiteront toutes les oeuvres avant de trouver leur port d'attache.
Dans une température constante (entre 18 et 22 degrés), des armoires de stockage amovibles, 27 km de rayonnages et des grilles coulissantes attendent chaque pièce qui leur aura été "adressée", selon un rangement qui se veut "cohérent".
Quelques statues grecques ou tableaux de la Renaissance abîmés reposent déjà, un peu seuls, enfermés dans des cages ou suspendus à une grille.
Peur des grandes crues
La peur des inondations des réserves due aux grandes crues de la Seine comme en 1910, a conduit à cette externalisation, nul lieu en région parisienne ne s'étant présenté.
Lors de la montée des eaux de 2016, même s'il n'y avait pas eu de dégats, les collections n'avaient pu être toutes remontées rapidement. Certaines sont abritées depuis dans divers lieux provisoires internes ou externes au musée.
Dans les cinq prochaines années, une noria de camions acheminera donc 250.000 oeuvres, en commençant par les plus volumineuses. Des emplois potentiels à la clé pour les chauffeurs de la région...
Le cabinet britannique Rogers Stirk Harbour + partners a conçu ce bâtiment, "un très bel outil, beau, sobre et élégant", a salué le président-directeur du plus grand musée du monde, Jean-Luc Martinez.
9.600 mètres carrés seront dédiés à la conservation, dans des espaces adaptés selon qu'il s'agit de grands ou petites formats, tapis, lapidaires, peintures, cadres, etc...
Eclairés par de grandes baies vitrées, 1.300 mètres carrés seront réservés aux chercheurs pour l'étude et la consultation de oeuvres.
Ce centre est appelé à devenir "un haut lieu de la recherche et de l'innovation en matière muséale", a insisté le ministre de la Culture Franck Riester, saluant aux côtés du président des Hauts-de-France Xavier Bertrand, une implantation culturelle dans une zone économiquement naufragée, soutenue financièrement par l'Union européenne, qui a été vivement remerciée.
Le projet a coûté 60 ME. Il a été financé pour 34,5 ME par le Louvre, grâce à des fonds provenant de la licence de marque accordée au Louvre Abou dhabi, pour 18 ME pour l'UE, pour 5 ME par la région, et 2,5 ME par le ministère de la Culture.
Une participation faible que critique l'Intersyndicale du musée, selon laquelle "ce projet n'affectera pas seulement les équipes du musée mais mettra en danger les interventions et la recherche menées sur les oeuvres qui seront rendues particulièrement difficiles, en raison de l'éloignement".
Au contraire, pour Jean-Luc Martinez, il s'agit d'un "chantier structurant pour le musée, éparpillé en 68 lieux".
Il pourra accueillir provisoirement des oeuvres des musées de la région, y compris pour des restaurations, et même des oeuvres d'art de pays en conflit armé. Les conservateurs y viendront par TGV après avoir étudié les images sur leur ordinateur.
Selon M. Martinez, les oeuvres transférées seront des pièces non destinées à être présentées à Paris. Figureront par exemple de nombreux fragments de fouilles, indispensables pour la compréhension d'une collection mais inmontrables.
La collection des dessins reste à Paris. Quelque 1.000 tableaux vont être amenés à Liévin, alors que 700 autres trouveront place dans une "réserve de proximité" au 2e étage du musée parisien.
Selon le patron du Louvre, "en quelques années, un travail énorme de connaissance des collections" a été réalisé en raison de la préparation du projet Liévin. A la fin de l'année, 60% des oeuvres du musée auront été mises en ligne.