Il y a quelques jours, le ministre de la transition écologique et solidaire se félicitait de la pose d' « une Pompe à Chaleur (PAC) à un euro » en remplacement d'une chaudière fioul chez un consommateur. « C'est bon pour la planète et pour le porte-monnaie » tweetait-il.
Le porte-monnaie de qui exactement ? La « PAC à un euro » repose, en grande partie, sur le dispositif des Certificats d'Économies d'Énergie (CEE), lequel est financé par… l'ensemble des consommateurs qui payent, dans leurs factures d'énergie, depuis 2006, une taxe déguisée qui augmente par période triennale. Les CEE représentent une manne financière de 3 milliards d'euros par an, piochés directement dans la poche du consommateur. Ce qui permet à l'État de faire de la com' à bon compte… et à bon compte de résultat pour EDF qui voit là une occasion unique de récupérer les 4 millions de ménages qui se chauffent aujourd'hui au fioul domestique.
L'empressement du ministre de la transition écologique pose questions : pourquoi convertir à marche forcée ces 4 millions de ménages à l'électricité (car l'essentiel n'est pas raccordé au gaz) ? Doit-on y voir la justification du prolongement à venir des centrales nucléaires, du report de l'abaissement de la part du nucléaire dans la production d'électricité… et de la construction d'un ou plusieurs EPR ?
Ajoutons-y quelques investissements nécessaires sur le réseau électrique. Que se passera-t-il en effet en plein hiver, avec plusieurs centaines de milliers, voire un million de chauffages électriques en plus ? Alors que, sans remonter bien loin dans l'agenda, le 10 janvier dernier, vers 21h00, le réseau électrique était déjà au bord de la rupture[1]… Mais de cela, le ministre ne parle pas.
Par ailleurs, tous les experts le disent : l'isolation est la 1ère source d'économies d'énergie. Il est indispensable d'isoler avant tout autre action. Changer de matériel de chauffage sans isoler, c'est comme chauffer sa maison avec les fenêtres ouvertes (ce qui n'est bon ni pour le porte-monnaie ni pour la planète !). Mais d'isolation, le ministre n'en souffle mot.
Une annonce à venir sur un dispositif gouvernemental pour remplacer les chaudières au fioul intervient quelques jours après le lancement du Grand Débat. Le Président de la République, dans sa lettre aux Français, posait à tous ses concitoyens la question suivante : « Comment rend-on les solutions concrètes accessibles à tous, par exemple pour remplacer sa vieille chaudière » ? Manifestement, Monsieur le ministre de la transition écologique a décidé de passer outre les avis et les recommandations des Français.
La profession des distributeurs d'énergies hors réseaux, représentée par la FF3C, c'est 1.200 entreprises implantées au cœur des territoires et 12.000 emplois. Des chefs d'entreprises et des salariés, tout-à-fait conscients des enjeux liés au réchauffement climatique et déjà impliqués, depuis de nombreuses années, dans la transition énergétique. Ces professionnels apportant un service de qualité à 10 millions de personnes, principalement dans des territoires ruraux, s'indignent d'être stigmatisés dans une communication gouvernementale et de ne pas avoir été écoutés.
Depuis plusieurs mois, la profession est engagée dans un processus de transformation et a déjà proposé une alternative au fioul domestique d'origine fossile : le bioliquide[2] de chauffage, intégrant de l'EMAG[3] de colza, un produit qui a vocation à se substituer complétement au fioul domestique, si possible dès 2024.
Une bonne isolation couplée à une chaudière très haute performance énergétique (THPE) biocompatible : ça, c'est une solution bonne pour la planète et pour l'environnement. Le dossier a d'ailleurs été remis au ministre il y a plusieurs mois. Mais, curieusement, il n'en a jamais parlé non plus. Cela dit, il est vrai qu'EDF ne produit pas de colza…
[1] Source : communiqué de la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE)
[2] Au sens de la directive Européenne sur les énergies renouvelables, on appelle bioliquide, « un combustible liquide destiné à des usages énergétiques autres que pour le transport, y compris (…) le chauffage, et produit à partir de biomasse ».
[3] Ester méthylique d'acide gras