La commission des sanctions de l'AMF a débattu de l'opération autour du rachat du parc de la société immobilière Terreïs par Swiss Life, officiellement annoncé au marché le 12 février 2019. Terreïs a ensuite racheté ses propres titres pour sortir de la Bourse.
Le projet avait d'abord été imaginé sous la forme d'achat de titres par Swiss Life, donnant lieu selon l'AMF à une première information privilégiée en fin d'année 2018, avant de prendre la forme du rachat des actifs immobiliers, la seconde information privilégiée début 2019.
Le gendarme des marchés reproche à plusieurs personnes, via des "faisceaux d'indices graves précis et concordants", d'avoir eu connaissance des négociations et en avoir profité pour réaliser des plus-values significatives.
Via sa société THD, Thierry Decré, négociant de vins et président de LD Vin, a réalisé une plus-value de 434.000 euros en ayant investi durant la première information privilégiée.
Selon la représentante du collège de l'AMF, il aurait pu être mis au courant via ces liens avec des responsables de la société Ovalto, notamment son président Jacky Lorenzetti, qui contrôle Terreis et qui a investi dans sa société LD Vin.
Elle a requis un million d'euros d'amendes contre THD et 200.000 euros contre M. Decret.
Les liens avec Jacky Lorenzetti, pas mis en cause par l'AMF, sont aussi considérés comme pouvant établir un "circuit plausible de transmission" de l'information privilégiée avec son frère, Pascal Lorenzetti, et sa société Option 7. Pour une plus-value de 278.000 euros, l'AMF a requis 650.000 euros d'amende contre la société et 150.000 euros contre Pascal Lorenzetti.
L'utilisation de l'information privilégiée est aussi reprochée à un responsable de Razier, un sous-traitant de Terreïs, Jacques-Antoine Condat. Le collège de l'AMF reproche à ce dernier d'avoir recommandé à sa partenaire, Ghania Begriche, et à son frère, Jean-Roger Condat d'investir, la première fois qu'une telle accusation est portée devant la commission. Des amendes respectivement de 300.000 euros, 75.000 euros et 125.000 euros ont été requises.
Pour des faits similaires, 550.000 euros ont été requis contre Benjamin Parisielle, alors directeur administratif et financier du groupe Rougnon, qui contrôle de Razier, 40.000 euros contre un haut encadrant du club de rugby du Racing 92, propriété de Jacky Lorenzetti, Christophe Mombet, et 20.000 euros contre l'ancien gestionnaire d'actifs de Terreïs Kilian Heim.
La défense des mis en cause a demandé de ne pas prendre en compte certains éléments obtenus par les enquêteurs via des fadettes, des relevés téléphoniques, ce qui est illégal dans ce type d'enquête selon elle. Elle conteste aussi l'existence de la première information privilégiée sur le projet de rachat de titres par Swiss Life et qui n'a finalement pas abouti en raison d'un prix jugé trop faible.
Les avocats ont aussi tenté de justifier pour chacun de leur client que les investissements significatifs sur les actions Terreïs avaient une autre origine qu'une éventuelle connaissance des négociations.
Par ailleurs, la représentante du collège de l'AMF a demandé "une sanction dissuasive", de 200.000 euros contre Terreïs pour manquement sur la tenue de la liste des initiés. C'est également la première fois que ce motif a été abordé devant la commission.
La commission des sanctions doit rendre sa décision dans les prochaines semaines.