"On n'a jamais de conférence sur cette problématique", reconnaît auprès de l'AFP Jean-Luc Guiral, directeur du développement à Infopro Digital, organisateur du Salon de l'immobilier d'entreprise (Simi).
Par contraste, "la sécurité, c'est important, (mais) ce n'est pas quelque chose qui semble suffisamment émergent", explique M. Guiral, évoquant plutôt une problématique "diffuse dans l'ensemble des activités".
Cela signifie-t-il que les questions de sécurité, notamment l'accès aux bâtiments, passent au second plan alors que, selon de multiples interlocuteurs de l'AFP, les tendances lourdes de l'immobilier de bureaux vont à l'encontre d'un immeuble conçu comme un bunker?
La vogue est à la construction des immeubles de bureaux dans des quartiers résidentiels et non plus réservés aux affaires, tout en les ouvrant parfois au public. Exemple, le géant immobilier Nexity projette de construire d'ici 2023 à la Défense un futur siège du groupe gazier Engie, au sein duquel un parc doit rester ouvert au public lors des week-ends.
"Les nouveaux usages ont tendance à ce que les frontières soient beaucoup moins étanches qu'avant... Mais ça ne se fera jamais au prix d'un risque sur la sécurité", tranche auprès de l'AFP Philippe Perello, directeur pour la France du cabinet en conseil immobilier Knight Frank.
"Il y a trop de risque pour un promoteur de rater un client car son immeuble est totalement perméable", ajoute-t-il, citant un exemple auquel il a été confronté. "Une grande entreprise du CAC 40 voulait louer un immeuble de 20.000 mètres carrés. Il était prévu qu'à certains endroits, le public puisse passer. Le patron a dit: +La condition de notre arrivée dans l'immeuble, c'est que ça n'existe pas+."
Escaliers inutiles
Les promoteurs font face à une contrainte double: pour se différencier, ils doivent innover, tout en restant réalistes pour ne pas se retrouver avec une offre inadéquate sur les bras.
"Si vous voulez avoir un immeuble qui peut recevoir du public au premier étage, vous devez doubler voire tripler la taille des escaliers" en raison des exigences de sécurité, détaille à l'AFP David Laurent, directeur de l'immobilier d'entreprise chez le promoteur Kaufman & Broad
"En plus, il faut dissocier physiquement les évacuations: vous aurez des escaliers en plus... Si, finalement, le premier étage ne reçoit pas du public, vous avez consommé du volume pour rien", ajoute-t-il.
Pour trouver un équilibre, les acteurs de l'immobilier s'intéressent aux lieux déjà habitués à accueillir un passage intense de visiteurs.
"On louche sur deux types d'acteurs: les transports en commun, comme la RATP, et les aéroports", explique à l'AFP François Desgardin, l'un des responsables de l'immobilier d'entreprise à Nexity, pour qui ces secteurs savent "ne pas faire attendre (les visiteurs) en maintenant la sécurité des bâtiments".
A son tour, cette problématique, qualifiée par M. Desgardin d'"accueil intelligent", est l'occasion d'une discrète course à l'innovation chez les professionnels des services aux entreprises.
Le principe d'un code-barre téléchargeable a émergé. Le visiteur le présente, via son téléphone, à un lecteur électronique pour accéder au bâtiment.
Ce système, qui a l'avantage de pouvoir être réglé pour un temps limité, va concerner "plutôt des gens ponctuels et extérieurs à l'entreprise", explique à l'AFP Laurent Le Mestreallan, responsable des questions de sécurité chez Spie, groupe proposant de multiples services techniques.
Parallèlement, face à l'afflux de visiteurs, c'est la vulnérabilité même des installations de filtrage qui est étudiée: si un lecteur de badge est piraté, toute la sécurité du bâtiment sera menacé.
"Ce qu'on va essayer de faire, c'est jouer aux poupées russes dans le bâtiment" en déportant les informations cruciales vers des zones plus sécurisées, détaille M. Le Mestreallan, "Un système de sécurité, c'est bien, mais il faut penser à la sécurité de ce propre système."