"La hausse des prix se poursuit (...) mais elle s'atténue", a résumé jeudi la notaire Elodie Frémont, à l'occasion de la présentation des chiffres trimestriels du marché du logement ancien.
Celui-ci sort de plusieurs années de progression ininterrompue des prix, avec comme symbole le cas de Paris où le mètre carré a passé l'an dernier le seuil symbolique des 10.000 euros.
Depuis, une crise économique majeure s'est installée avec l'épidémie de coronavirus, et une récession massive est au programme cette année en France.
Les effets, pour autant, se font attendre sur le marché du logement.
Fait le plus notable: les ventes ont chuté à la suite du strict confinement mis en place au printemps. Fin septembre, il y en avait eu moins d'un million en un an, une première depuis fin 2019 et le ralentissement sera sûrement accentué par le nouveau confinement instauré tout novembre.
Mais le véritable enjeu est de savoir si les logements finiront par coûter moins cher. Et, sur ce plan, le mouvement demeure encore timide.
Au troisième trimestre, en gros l'été 2020, ils ont encore progressé de 5,2% par rapport à un an plus tôt, selon l'Insee. Cela reste un ralentissement, comparé au précédent trimestre (+5,6%).
Surtout, ce phénomène touche la province comme l'Île-de-France, même si cette opposition est simpliste et ne rend pas compte des différences entre campagnes, petites villes et grandes métropoles comme Lyon et Marseille.
"Les 11.000 euros du mètre carré parisien ne seront pas atteints en fin d'année et certainement pas en janvier", a admis Mme Frémont.
Plafonnement des loyers
Reste qu'il y a loin entre un ralentissement de la flambée des prix et une véritable baisse. Celle-ci n'est pas impossible mais elle attendra certainement de longs mois pour se concrétiser.
Les prix des logements français pourraient reculer de 2% l'an prochain, estime ainsi l'agence de notation Moody's.
Elle remarque que l'immobilier suit généralement de près la croissance économique. Or, avec un recul de quelque 10% du produit intérieur brut (PIB) attendu cette année, la baisse des prix est probable.
A priori, il s'agit d'une bonne nouvelle. S'il est plus facile de se loger pour les Français, cela contribue en retour à faire repartir l'économie, en facilitant par exemple le fait d'habiter près de son travail.
Seulement, selon Moody's, la baisse des prix ne voudra pas dire que les logements deviendront globalement plus abordables. Car tout le monde n'en profitera pas autant.
"C'est la première fois qu'une crise affecte les gens de manière aussi différenciée", soulignait en début de semaine Vincent Allilaire, l'un des experts de l'agence, lors d'une conférence.
"Les secteurs (...) les plus affectés sont ceux qui emploient des employés aux revenus les plus modestes et les plus jeunes", remarque-t-il, avançant que ces catégories risquent d'avoir du mal à emprunter de l'argent pour acheter un logement.
Cette sélection s'avère déjà sensible dans les chiffres sur les crédits immobiliers. Elle est d'autant plus marquée que les autorités financières demandent depuis un an aux banques de prêter à des conditions un peu moins favorables.
Puisque les logements deviendront de moins en moins accessibles financièrement, l'agence Moody's prévoit encore une autre évolution, cette fois politique.
"Il va y avoir de plus en plus de régulations à visée sociale", a estimé M. Allilaire, la plus emblématique restant le plafonnement des loyers.
De fait, plusieurs grandes villes, dont Lyon et Bordeaux, se sont portées candidates ces dernières semaines auprès du gouvernement pour lancer une telle mesure, rejoignant ainsi Paris qui l'a réinstaurée l'an dernier.