La constitution d’un gouvernement et les orientations budgétaires sont encore à définir avec, en toile de fond, la menace d’un rejet parlementaire. Dans ce contexte, la crise immobilière, dont le point bas semble cependant avoir été atteint, se poursuit. Certains indicateurs comme les permis, les ventes de logement, les crédits habitat ou encore la confiance des entrepreneurs du bâtiment se redressent timidement tandis que les prix immobiliers et les taux d’intérêt continuent de se tasser ; des orientations encourageantes même si la conjoncture du logement neuf reste très dégradée. Du côté des travaux publics, les tendances en termes d’activité et de carnets sont restées plutôt bien orientées au cours de l’été. De fait, la production de granulats s’est nettement raffermie tandis que celle de BPE, en dépit d’une petite amélioration estivale, affiche encore un rythme de repli à deux chiffres.
Chiffres clés
(Mai-juin-juillet) 2024 / (Mai-juin-juillet) 2023
- Granulats : +5,2%
- BPE : -11,9%
(Production en volume, données CVS-CJO)
Des mois de juin-juillet plutôt meilleurs
Après un mois de mai particulièrement marqué par les intempéries, l’activité des matériaux s’est mieux tenue cet été. La production de granulats a observé un net rebond, de +13,3% en juin, avant de se stabiliser en juillet (+0%), laissant ainsi le niveau d’activité 5,2% au-dessus de celui de juillet 2023 (données CVS-CJO). Sur les trois derniers mois connus, la production de granulats affiche donc une progression de +1,3% au regard du trimestre précédent et se stabilise en comparaison des trois mois de mai-juin-juillet de 2023. En cumul sur sept mois, elle réduit son recul à -3,4% sur un an, tandis que sur douze mois glissants, ce dernier atteint -5,5%. Côté BPE, les livraisons ont également enregistré une hausse en juin (+4,6% par rapport à mai) avant de se stabiliser en juillet (+0,2%) ; mais les volumes s’inscrivaient encore en retrait de -11,9% sur un an (données CVS-CJO). Ainsi, au cours des trois derniers mois (mai à juillet), et surtout en raison du mauvais mois de mai, l’activité du BPE s’est encore contractée, de -4% par rapport aux trois mois précédents et de -14,1% au regard de la même période de l’an passé. Depuis janvier, les livraisons de BPE cèdent ainsi -13,8% sur un an. Le mois de juillet, dernier mois plein avant la coupure estivale, a sans doute bénéficié d’un effet « calendrier jours ouvrés » favorable, sans jour férié, ce qui n’a pas été le cas du mois d’août dont on attend d’ores et déjà une activité particulièrement ralentie.
L'indicateur matériaux de l'UNICEM, disponible jusqu’en juin, décrit également un léger redressement par rapport à mai (+1,3%) mais reste en retrait de -8,8% comparé à juin 2023 (données CVS-CJO). S’il s’est stabilisé entre le deuxième et le premier trimestre (+0,3%) l’indice recule encore de -8,8% sur un an. A la fin du premier semestre, le volume d’activité des matériaux affiche ainsi un repli de -9,7% sur un an, les mortiers et bétons secs tirant leur épingle du jeu (-2%) tandis que les tuiles et briques plongent encore de -25,4%.
Bâtiment : quelques signaux positifs
Selon les chefs d’entreprise du bâtiment interrogés par l’INSEE, le climat des affaires s’est éclairci en août, aussi bien dans le gros œuvre que dans le second œuvre. Ainsi, les soldes d’opinion, notamment sur l’activité prévue dans le logement neuf, ont marqué un rebond même s’ils demeurent encore très en-deçà des niveaux moyens de long terme ; ce moindre pessimisme, qui reste à confirmer, s’accompagne d’une légère hausse des carnets de commandes (à 8,8 mois dans le gros œuvre, contre 8,7 mois depuis avril et 6,5 mois en moyenne de longue période).
Du côté de la construction non résidentielle, les chiffres des permis comme des mises en chantier publiés par le ministère traduisent un léger redressement des tendances. À fin juillet, et comparé à il y a un an, les locaux autorisés reculaient de -2,2% sur trois mois contre -6,4% en cumul douze mois. Quant aux surfaces commencées, la baisse sur trois mois revient à -2% tandis que sur douze mois elle atteint -7,4%. Certains secteurs, comme le commerce ou les services publics et collectifs, se montrent plus dynamiques à l’inverse des bureaux. Dans le segment résidentiel, les mises en chantier de logements ont progressé de +4,2% sur les trois derniers mois comparés au trimestre précédent, lui-même en hausse de +1,6% (données CVS-CJO). Avec 272.900 logements commencés sur douze mois à fin juillet, l’évolution glissante sur un an demeure baissière de -20,2% tandis que, sur les trois derniers mois, elle revient à -4,3%, preuve que l’inflexion est bien engagée. Mais ce sont surtout les logements collectifs qui contribuent à « redresser » la tendance avec une progression de +11,8% des mises en chantier sur les trois derniers mois glissants (contre -25,2% pour l’individuel), ce segment étant dopé par les ventes aux institutionnels et le programme de rachat des stocks aux promoteurs. Quant aux permis, ils décrivent aussi cette même inflexion avec un cumul sur douze mois glissants à -12,1% (soit 348.200 autorisations) contre un repli trimestriel à -6,4%. Cette fois, c’est plutôt le segment de l’individuel groupé qui se distingue avec une progression trimestrielle de +8,4% sur un an.
Selon le dernier bulletin de Markemétron qui retrace l’activité des constructeurs de maisons individuelles, la situation tend à s’améliorer. Partant de très bas, la conjoncture du secteur reste, bien sûr, fortement dégradée avec des ventes encore en repli de -32,6% en cumul annuel glissant (49.300 maisons à fin juillet). Mais de façon inhabituelle, le marché s’est sensiblement ranimé en juin et en juillet, contribuant à amplifier la modération du rythme trimestriel du recul des ventes (-13,1% à fin juillet contre -40% début janvier). D’après les dernières données sur la commercialisation des logements neufs publiées par le ministère pour le deuxième trimestre, les réservations ont aussi progressé, de +3,3% par rapport au premier trimestre (données CVS-CJO) sur le marché des particuliers (qui représente 50,3% du total). Toutefois, avec 16.199 logements vendus, le niveau reste faible et en retrait de -11,9% par rapport au deuxième trimestre de 2023. Quant aux mises en vente, elles continuent de reculer (-4,1% en trimestriel et -35,7% sur un an) traduisant la prudence des promoteurs mais générant aussi une raréfaction de l’offre et une tension sur les prix. Ces derniers peinent en effet à baisser : si le prix moyen des appartements neufs a baissé de -1% par rapport au premier trimestre (-1,5% sur un an), celui des maisons a repris +0,7% (-2,3% sur un an). Le regain de l’offre bancaire (avec des crédits habitat en hausse de +27,5% sur un an, pour le neuf, sur trois mois à fin août) conjuguée à une baisse des taux d’intérêt (à 3,62% en septembre contre 4,2% en décembre 2023) et à une légère baisse des prix expliquent sans doute la meilleure tenue des transactions dans le résidentiel neuf. L’enquête de l’INSEE, menée en août auprès des ménages, confirme d’ailleurs un rebond de la part des ménages ayant l’intention d’acheter un logement. Pour autant, le chemin est encore long entre la « sortie de l’ornière » qui semble se dessiner dans l’immobilier et la reprise d’activité dans la construction et le secteur des matériaux...
Été serein pour les travaux publics
Selon la dernière enquête menée par la FNTP, l’activité s’est bien tenue cet été avec une hausse du volume des travaux réalisés de +2,9% en juillet par rapport à juin et de +4,1% sur un an (CVS-CJO), laissant le cumul depuis janvier sur une tendance de +1,9%. Dans le même temps, les prises de commandes ont également accéléré, de +8,7% par rapport à juin, portant le cumul sur sept mois à +10,8% sur un an. Les investissements des collectivités nourris par le cycle électoral, ainsi que les grands chantiers et projets des métropoles, notamment dans les transports urbains (métros Tisséo à Toulouse, Sytral à Lyon, tramway Inspire à Clermont-Ferrand...), continuent d’alimenter l’activité même si certains segments comme la route et les terrassements semblent rester à la traîne, une faiblesse qui pèse sur la dynamique du marché des granulats.
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